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Fiscalité du numérique : Le CNN enterre la taxe Colin-Collin

Publié par La rédaction le | Mis à jour le

Dans son rapport remis à Bercy, le Conseil national du numérique s'oppose à l'adoption d'une taxe spécifique au secteur et appelle à la transparence fiscale au niveau international.

Le Conseil national du numérique (CNN) a remis mardi 10 septembre au ministre du Budget Bernard Cazeneuve et à la ministre en charge à l'Économie numérique Fleur Pellerin son avis complété d'un rapport de 120 pages sur la fiscalité de la filière.

Alors que la mission d'expertise pilotée par Pierre Collin et Nicolas Colin préconisait en début d'année de nouvelles règles fiscales en la matière, dont la taxe sur les données personnelles, l'instance consultative «indépendante » saisie par Bercy déconseille au gouvernement français d'instaurer une taxe sectorielle.

Une taxe « numérique » pénaliserait l'écosystème français

Après quatre mois de travaux et d'échanges avec les acteurs de la filière, le Conseil national du numérique recommande « d'éviter la mise en ouvre unilatérale et immédiate d'une taxe nationale sectorielle ». Celle-ci risquerait « de pénaliser l'écosystème français et d'obérer la position de la France dans les négociations internationales », a souligné Godefroy Beauvallet, directeur du Fonds AXA pour la Recherche et vice-président du CNN en charge du groupe fiscalité.

Le Conseil observe, par ailleurs, qu'un consensus s'est dégagé sur le fait « qu'il est stratégiquement inopportun de taxer le cloud à l'heure où la France souhaite favoriser le cloud souverain et l'installation de datacenters en France ».

Concernant les propositions du rapport Colin-Collin pour une fiscalité incitative sur la collecte et l'exploitation de données, le CNN met l'accent sur les interrogations de la filière à propos des finalités d'une taxe nationale provisoire. Si ces propositions  « n'ont pas été radicalement contestées », il serait nécessaire « d'affiner le périmètre des données concernées, de clarifier les méthodes de valorisation et d'évaluer les rendements finaux ».

En matière de lutte contre les abus fiscaux, le CNN plaide pour « une initiative immédiate au niveau international et infra-européen ». Il s'agit de rééquilibrer la pression entre entreprises françaises du numérique, qui paient leur TVA et l'impôt sur les sociétés en France, et les poids lourds américains (Google, Microsoft, Amazon.), qui usent de techniques d'optimisation fiscale pour ne payer dans le pays d'origine de leurs profits qu'un faible pourcentage de taxes. Ces pratiques, souligne le Conseil, leur permettent de « créer un différentiel de compétitivité fiscale, bénéficier de régimes de double exonération, et capter des parts de marché au détriment des acteurs locaux ».

Mobiliser l'Europe contre l'optimisation fiscale « agressive »

Lutter plus efficacement contre les abus passe par « un renforcement de la transparence et des contrôles ». Il faut aussi engager « un travail à l'échelle infra-européenne » pour mettre en ouvre « un cadre fiscal adapté à la transformation numérique », indique le CNN. Il est donc essentiel de mobiliser les membres de l'UE « en faisant appel à des économistes, fiscalistes et juristes reconnus à l'international ». Dans ce but, un colloque international sera organisé en amont du Conseil européen des 24 et 25 octobre dédié au numérique.

« Il est indispensable de tisser des alliances avec les pays qui, comme la France, ont porté le fer dans la lutte contre l'optimisation fiscale agressive, à commencer par le Royaume-Uni et l'Allemagne. La tâche est considérable, mais pas plus que ne l'était il y a quarante ans celle qui a mené à la généralisation du modèle français de taxe sur la valeur ajoutée », a déclaré Benoît Thieulin, président du CNN et dirigeant-fondateur de l'agence La Netscouade.

Enfin, si l'OCDE et le G20 restent des espaces de négociation privilégiés, la Commission européenne est un lieu « décisionnaire stratégique » à l'échelle de l'Europe. L'exécutif européen devrait donc éclairer les problématiques de fiscalité, d'entrepreneuriat, mais aussi de concurrence, consommation et propriété intellectuelle, pour favoriser le déploiement d'une « industrie numérique européenne » forte.

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