Le logiciel libre repart à l'assaut de la loi Numérique
De la promotion du logiciel libre dans l'administration à la communication du code source aux citoyens, des sénateurs tentent de réintroduire dans le projet de loi pour une République numérique d'Axelle Lemaire des dispositions écartées en commission des lois.
L'examen en séance publique du projet de loi pour une République numérique et de ces amendements a débuté ce mardi 26 avril au Sénat. Préférence au logiciel libre, communication non faussée du code source. Des parlementaires tentent, à cette occasion, de réintroduire dans le texte des dispositions sensibles qui ont été écartées en commission des lois. C'est notamment le cas de la disposition visant à promouvoir le logiciel libre et les formats ouverts dans les administrations.
Préférence au logiciel libre
Initié par la sénatrice Les Républicains Joëlle Garriaud-Maylam, l'amendement n° 393 vise à rétablir l'article 9 Ter du texte adopté par l'Assemblée nationale fin janvier, soit un simple encouragement à l'utilisation du libre dans les services et établissements publics. Une orientation qui avait tout de même été supprimée par un vote de la commission des lois du Sénat début avril. L'amendement n° 393 précise : « Les services de l'État, administrations, établissements publics et entreprises du secteur public, les collectivités territoriales et leurs établissements publics donnent la priorité aux logiciels libres et aux formats ouverts lors du développement, de l'achat ou de l'utilisation d'un système informatique. Les modalités d'application du présent article sont définies par décret en Conseil d'État ».
Joëlle Garriaud-Maylam reprend ainsi la notion de « priorité » promue avant elle par des députés, sans succès jusqu'ici, le gouvernement pointant le « risque constitutionnel » d'une telle préférence gravée dans la loi. Pour la sénatrice, malgré tout, « la priorité au logiciel libre n'induit pas de discrimination entre les acteurs économiques et donc pas de rupture avec le fonctionnement classique d'un marché public, dans le respect des principes d'égalité de traitement et de liberté d'accès ». Elle note, par ailleurs, que « le respect de ces principes de la commande publique dans le cadre d'un marché public imposant le recours à un logiciel libre a d'ailleurs été reconnu par le Conseil d' État dans un arrêt de septembre 2011 ». Et que « l'inscription dans la loi d'une priorité au logiciel libre a été votée en 2013 lors de l'adoption du projet de loi enseignement supérieur et recherche ». Le rapporteur du texte au Sénat, Christophe-André Frassa, y est défavorable, contrairement aux partisans du logiciel libre, dont l'April, qui pense aussi qu'une telle priorité est compatible avec le code des marchés publics.
Communication du code source
L'April, association qui promeut et défend le logiciel libre, milite également pour une inscription dans la loi d'une communication non faussée du code source des logiciels aux citoyens. Le code source étant considéré comme un document administratif communicable, comme l'ont réaffirmé les députés en janvier. Mais les sénateurs sont plus divisés sur le sujet.
Les amendements n °181 et n °438, que souhaitait voir adopter l'April, ont ainsi été rejetés. Ils devaient écarter notamment le 3ème alinéa de l'article 1er bis, et lever tout « obstacle disproportionné et sans fondement technique à la communication du code source », pour l'un, « les extensions aux dérogations à la communication des codes sources », pour l'autre. Ces amendements ont été déposés respectivement par la sénatrice écologiste de Maine-et-Loir, Corinne Bouchoux, et les sénateurs Eliane Assassi, Jean-Pierre Bosino et Patrick Abate du groupe communiste républicain et citoyens.
La question de la communication des codes sources est d'ailleurs loin de faire l'unanimité. D'autres parlementaires s'y opposent, même s'ils ont fini par retirer en fin d'après-midi leur amendement n°273 rectifié. Ce dernier visait à supprimer l'alinéa 1 du texte, soit la possibilité de communiquer les codes sources des logiciels produits par et pour l'administration. Au motif que « la communication des codes sources aura des effets dissuasifs sur l'innovation, tant pour les entreprises chargées d'une mission de service public que pour leurs partenaires, dès lors que la transmission des codes sources permettra à toute personne de s'approprier les nouvelles technologies sans avoir à effectuer le moindre investissement ».
Rappelons que la communication du code source d'un logiciel de l'administration fiscale a été confirmée en début d'année par le tribunal administratif de Paris. Une décision prise plus d'un an après l'avis favorable de la Commission d'accès aux documents administratifs (Cada).
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