Piratage : le Parlement européen rejette la riposte graduée
Publié par La rédaction le | Mis à jour le
Ce principe serait contraire aux droits de l'Homme. La France va-t-elle devoir revoir sa copie ?
La lutte contre le piratage des oeuvres sous copyright sur le Net devra-t-elle se passer de la riposte graduée ? Les députés européens ont en tout cas affiché leur défiance vis-à-vis de ce dispositif.
Le Parlement de Strasbourg a en effet adopté ce jeudi une résolution
qui engage les États membres « à éviter l'adoption de mesures allant à l'encontre des droits de l'Homme, des droits civiques et des principes de proportionnalité, d'efficacité et d'effet dissuasif, telles que l'interruption de l'accès à internet », rapporte le collectif la Quadrature du Net.
Si le Parlement européen appelle à « assurer le respect et la protection de la propriété intellectuelle, la criminalisation des consommateurs qui ne cherchent pas à réaliser des profits ne constitue pas la bonne solution pour combattre le piratage numérique ».
L'avis du rapporteur de la résolution, le Français Guy Bono (PS), est sans appel : « Sur ce sujet, je m'oppose fermement à la position de certains États membres, dont les mesures répressives sont des mesures dictées par des industries qui n'ont pas été capables de changer leur modèle économique face aux nécessités imposées par la société de l'information. La coupure d'un accès internet est une mesure disproportionnée au regard des objectifs. C'est une sanction aux effets puissants, qui pourrait avoir des répercussions graves dans une société où l'accès à l'internet est un droit impératif pour l'inclusion sociale ».
Et d'ajouter : « Il ne faut pas se tromper d'objectif: ce ne sont pas les 13% d'Européens qui téléchargent illégalement qui menacent notre culture ».
Cette résolution vise particulièrement la France qui souhaite appliquer ce type de mesure au plus vite. Le rapport Oliviennes, un plan concocté par les membres de la mission de réflexion dirigée par Denis Oliviennes, ex-patron de la Fnac, préconise en effet la riposte graduée, opérée par une Autorité de régulation des mesures technique. C'est elle qui enverra des mails d'avertissement aux peertopistes. Surtout, elle pourra demander des sanctions « allant de l'interruption de l'accès à l'internet à la résiliation du contrat internet », pour les plus gros téléchargeurs peut-on lire dans le rapport. C'est donc un camouflet assez fort porté par les eurodéputés envers les choix français.
Pour autant, cette résolution n'a rien de contraignant pour les Etats membres. Seule une directive de la Commission européenne a force de loi. En attendant, la Quadrature du Net souligne que cette résolution « démontre que le dispositif de riposte graduée que Nicolas Sarkozy souhaite voir adopter en France rapidement, pour qu'il soit étendu au niveau européen pendant la présidence française de l'UE, est considéré comme contraire aux droits fondamentaux par une majorité de députés européens. (Et que) ce vote vient en soutien de la position du gouvernement suédois qui avait déjà rejeté la riposte graduée ».
Rappelons que le rapport Attali plaide également pour l'abandon de la riposte graduée au profit du versement d'une licence globale par les FAI. Une proposition rejetée en bloc par Christine Albanel, ministre de la Culture et de la Communication.