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Dossier : 5 scénarios pour l’Internet des objets en entreprise

Publié par Jacques Cheminat le | Mis à jour le

L’internet des objets (IoT) ne vont pas concerner que les applications B2C, mais aussi les entreprises. 5 sociétés témoignent de leur approche.

L’édition 2016 du CES l’a montré une nouvelle fois : l’imagination des startups en termes d’objets connectés est sans limite. Bracelets, montres, ceintures, microphones et capteurs en tous genres, tout ce qui nous entoure sera un jour connecté, qu’on le veuille ou pas. La dernière étude sur l’IoT d’Intel nous annonce 200 milliards d’objets connectés à l’horizon 2020, soit 26 objets par personne. C’est colossal, mais ce que dit aussi cette étude, c’est que 40,2% des objets connectés qui seront utilisés par les entreprises, que ce soit pour optimiser leur Supply Chain, leurs chaînes de production et, bien évidemment, alimenter leurs algorithmes Big Data.

Tout le monde connaît maintenant les services de maintenance prédictive des moteurs d’avion ou des pompes telles que General Electric les propose à ses clients depuis quelques années ou encore la télémesure de consommations électrique ou de gaz. Des applications de l’Internet des objets qui vont être rapidement rejointes par de nombreuses autres car, tout comme dans le B2C, les applications des objets connectés connaissent un regain d’intérêt soudain dans les entreprises. L’arrivée de nouveaux réseaux de type très bas débit comme celui de Sigfox ou ceux des opérateurs compatibles avec la norme LoRa suscite énormément d’intérêt dans les entreprises qui travaillent sur de nouvelles applications communicantes. Ces réseaux qui exploitent une fréquence jadis réservée par la Marine afin de communiquer avec les sous-marins en plongée provoquent un vrai engouement.

Car si leurs performances sont très limitées en termes de débit (au maximum 140 messages de 12 octets par jour sur le réseau Sigfox), ces réseaux ont de multiples avantages pour les industriels. Ils sont mis en œuvre par des opérateurs qui fournissent le réseau radio et l’infrastructure de collecte des messages. L’entreprise n’a pas à se soucier de ce point. En outre, le prix d’accès à ces réseaux est bien inférieur à celui des réseaux cellulaires (GPRS, 3G et 4G). Autre point clé, la consommation électrique bien plus faible. Un point qui n’a rien d’un détail puisqu’il devient possible de créer un objet connecté capable de fonctionner pendant des années sans entretien et sans source électrique extérieure.

Des applications qui, jusqu’à aujourd’hui, étaient techniquement ou économiquement inimaginables deviennent possibles. Et s’il devient possible d’élaborer un business model viable mettant en œuvre des objets connectés, de nombreuses entreprises conçoivent de nouvelles solutions. C’est le cas de startups telles que FFly4U qui imagine une Supply Chain temps réel, de FuelProtect qui inventer de nouveaux outils de sécurité dans le transport routier. Des entreprises leaders sur leurs marchés telles que Colas Rail ou Manitowoc renforcent la sécurité sur les chantiers grâce à l’Internet des objets. C’est aussi un outil de conquête commerciale pour ENGIE Cofely qui peut adresser de nouveaux clients grâce à la baisse des coûts apportée par les objets connectés de nouvelle génération. La rédaction de Silicon.fr vous présente 5 cas d’utilisation des objets connectés dans l’univers B2B.

FFly4U, une nouvelle ère connectée pour la supply chain

Startup toulousaine, FFly4U veut appliquer les nouvelles technologies des objets connectés au monde de la supply chain. Son fondateur, Olivier Pages, n’est pas un nouveau venu dans le secteur. C’est lui qui a créé Pick and Go en 2010, une société qui a introduit des palettes plastiques en location dans l’industrie et la distribution, en remplacement des palettes en bois traditionnelles. « Nous avons été les premiers à placer des étiquettes RFID passives sur nos supports de manutention. 150 000 palettes ont été mises en circulation. Nous faisions alors le pari que les industriels allaient ainsi tracer à la fois le contenant, mais aussi le contenu. Une possibilité qui n’a pas été utilisée. »

Pour cet expert de la supply chain, si coller un tag RFID ne coûte presque rien, de l’ordre de 20 cents pièce, les investissements requis en termes d’infrastructure, notamment dans les portiques de lecture a placer devant chaque quai de déchargement est considéré comme démesuré par les industriels et la grande distribution au regard de la valeur ajoutée apportée. « L’investissement en terme de technologies à mettre en place et en termes de maintenance est trop élevé pour une valeur ajoutée trop faible. Le besoin est bien là, notamment chez les distributeurs, mais la réponse n’était pas la bonne », estime Olivier Pages.

Les réseaux très bas débit à la place des lecteurs RFID

Alors que le RFID ne délivre que des informations de passage du contenant sous le portique, les technologies récentes, notamment le réseau SigFox, autorisent désormais une nouvelle approche. « Le besoin du distributeur (ou de l’industriel) est de savoir où se trouve un contenant, un contenu ou un actif à intervalles réguliers, le premier besoin étant de savoir si une marchandise est arrivée au bon endroit au bon moment » explique Olivier Pages. « Avec SigFox, et bientôt LoRa, nous pouvons apporter une solution qui est cohérente avec le business model de la supply chain, ce qui n’était jusqu’à maintenant pas possible avec les réseaux GPRS. » Les réseaux à très bas débit permettent enfin d’envisager des déploiements en boucle ouverte où la marchandise et/ou son contenant sont suivis tout au long de la supply chain, plus seulement dans les installations du donneur d’ordre, mais pendant son transport, et sur des sites logistiques tiers.

A l’heure actuelle, FFly4U a mis au point deux trackers. Le premier, destiné à un usage indoor, dispose d’une batterie qui lui permet de fonctionner pendant 7 années. Cet objet connecté envoie 4 informations par jour, typiquement un relevé de température. Le second tracker se destine plutôt à un usage outdoor puisqu’il transmet un relevé GPS deux fois par jour. Le service est commercialisé sous forme de service tout compris à partir de 1 et 2 euros par mois et par objet. FFly4U a choisi d’héberger sa plateforme de collecte des données chez un fournisseur de Cloud public. Les projets pilotes vont être menés tout au long de l’année 2016, Olivier Pages espère avoir déployé entre 30 000 et 500 000 trackers en 2017.

Le bouchon connecté de ProtectFuel comme anti-fraude à l’essence

C’est pour faire face aux vols de plus en plus fréquents de carburant sur les poids-lourds que ProtectFuel s’est allié à Kuantic afin de mettre au point un bouchon de réservoir communicant. Selon la FNTR (Fédération Nationale des Transporteurs Routiers) ce sont 20 millions de litres de fuel qui sont volés chaque année et 99% des transporteurs français font face à ce problème issu tant du banditisme que des pratiques de certains employés indélicats. Le marché est donc potentiellement énorme pour cette startup.

Equipé d’un module radiofréquence, ce bouchon connecté remplace le bouchon de réservoir standard et ne nécessite aucune modification du camion. Le Protecfuel est capable de communiquer l’information de l’ouverture et de la fermeture du réservoir de fuel avec le boitier télématique du camion. L’alerte est transmise en temps réel au transporteur ou à une société de gardiennage en fonction de règles prédéfinies par le transporteur. Le bouchon lui même dispose d’une batterie intégrée qui lui assure une autonomie théorique de 5 années. Le module radiofréquence 868 MHz, une fréquence classique dans le domaine des appareils domestiques qui ne nécessite pas de licence. Le module est aussi compatible 433 MHz, l’ancienne norme qui reste en vigueur aux Etats-Unis. Le boitier télématique est pour sa part connecté via cellulaire (GPRS/3G) aux serveurs de Kuantic, un spécialiste du M2M qui est en outre un MVNO spécialisé sur les objets connectés.

Un couplage bouchon et télématique du camion

Stéphane Chaussat, directeur des opérations de Kuantic précise : « Le boitier télématique de type Dynatik qui est installé dans le camion est équipé d’une carte SIM européenne. La quantité de données transmises par le boîtier est trop importante pour être transmise via les réseaux très bas débit type Sigfox ou LoRa. »

Car outre l’information d’ouverture/fermeture du réservoir, le boîtier transmet bien d’autres données aux serveurs du prestataire, notamment la géolocalisation temps réel du camion. Une information clé qui permet d’envisager de multiples scénarios d’utilisation du bouchon connecté.

Alertes, géolocalisation et détection de fuite

Il est non seulement possible de générer des alertes en cas d’ouverture en dehors de plages horaires préprogrammées mais, grâce à l’information de géolocalisation, il est aussi possible de déterminer des zones géographiques, des pays non autorisés ou mieux, circonscrire les zones où le bouchon peut être ouvert. Ces zones peuvent être celle de la pompe sur parc qui appartient au transporteur lui-même ou il peut s’agir de POI (Points of Interest) comme les stations-services avec qui le transporteur dispose d’un compte fidélité.

Kuantic assure l’hébergement des données générées par ses boitiers télématiques. L’accès peut être réalisé via une interface Web, mais aussi au moyen de Web Services pour les transporteurs qui souhaitent interfacer les données émises par leurs camions avec leurs solutions de Fleet Management.

Le bouchon lui-même ne mesure pas la quantité de carburant introduite dans le réservoir (qui peut atteindre jusqu’à 1 000 litres sur certains camions). Par contre, il peut être couplé à une jauge Continental VDO Fuel Monitor qui va estimer la consommation de carburant du camion, mais aussi détecter une fuite rapide de carburant. C’est typiquement le scénario du coup de pioche dans le réservoir par des voleurs.

Kuantic qui gère à ce jour 1 million de cartes SIM à déjà déployé 300 000 boitiers Dynatik sur le continent européen. Lancélors de la dernière édition du salon Solutrans, le bouchon ProtectFuel est en cours de test pilote chez plusieurs transporteurs à qui il est proposé à partir de 50 euros.

Colas Rail prend le train LoRa de Bouygues Telecom

« L’objet connecté est l’un des grands thèmes d’innovation pour Colas Rail en 2016 » affirme Vincent Viallet, responsable de la direction de l’innovation de Colas Rail. Pour cette filiale de Colas dédiée aux travaux ferroviaires, l’objet connecté est une piste de recherche dans de multiples domaines. Le premier, c’est celui de l’infrastructure. Un chantier pilote réalisé avec la SNCF en octobre dernier a montré la faisabilité de transformer les éclisses en objet connecté. L’éclisse est la pièce de métal qui unit mécaniquement deux rails bout à bout.

L’idée des ingénieurs de Colas Rail est de placer une rondelle connectée au niveau du serrage de l’éclisse. Chaque jour, la rondelle transmet une donnée sur son niveau de serrage à un serveur central qui historise cette information. « Cela présente deux intérêts. D’une part une alerte peut être générée en temps réel en cas de rupture de l’élément de serrage, d’autre part nous pouvons créer des courbes de tendance de serrage et ainsi planifier nos opérations de maintenance sur zone. Tout l’intérêt du réseau LoRa déployé par Bouygues Telecom, c’est d’avoir un très faible coût énergétique. Cela nous a permis de mettre au point des rondelles autonomes sur plusieurs années, se plaçant dans l’intervalle entre deux démontages réglementaires de l’éclisse. »

La nécessité de chiffrer les données

Filiale du groupe Bouygues, Colas Rail a naturellement fait le choix du réseau LoRa déployé par Bouygues Telecom, mais Vincent Viallet souligne un point clé qui motive ce choix par rapport au réseau à basse consommation concurrent, Sigfox : « La sureté et la sécurité sont des paramètres extrêmement importants dans le monde du ferroviaire. Sigfox a pris le parti de ne pas crypter les données, considérant que les données portées par leur réseau seront noyées dans la masse des données des autres objets connectés. Ne pas chiffrer les données techniques du réseau ferré pose un problème de sureté de fonctionnement dans le monde du ferroviaire. »

Autre piste de recherche pour Colas Rail, l’équipement du matériel roulant. Tout comme la SNCF, Colas Rail doit pouvoir suivre le positionnement de ses wagons sur le réseau ferroviaire notamment afin d’en optimiser le taux d’utilisation, mais l’ambition de Vincent Viallet va au delà. « Nous voulons développer un système qui va géolocaliser nos wagons et permettre d’assurer leur suivi réglementaire. Ce système devra en outre assurer une détection de déraillement afin d’éviter tout sur-accident et enfin intégrer des détecteurs de boîtes chaudes. » Dans le vocabulaire ferroviaire, une « boîte chaude » correspond à l’apparition d’un problème de lubrification sur les roulements des boîtes d’essieux du wagon, problème qui peut conduire à la destruction de la boîte d’essieu entrainant un déraillement. Il convient donc de repérer très rapidement ce phénomène afin de prendre les mesures nécessaires le plus rapidement possible avant que le dysfonctionnement ne s’aggrave.

Maintenance des engins de chantiers et casque connecté

Enfin, si Colas Rail a déjà équipé ses équipements lourds comme les locomotives, bourreuses et autres pelles rail/route, de boitiers télématiques, Vincent Viallet souhaite désormais équiper les petits matériels de chantier d’un boitier de suivi LoRa. « Nous développons, en partenariat, des petits modules connectés qui comporteront 1 ou plusieurs capteurs adaptés à l’outil. Température, mouvements, chocs, nous allons pouvoir ainsi suivre la vie de l’outil. Le boitier comportera également un bouton d’acquittement qui sera activé en atelier pour garder trace de sa maintenance et des contrôles réglementaires. » Savoir où sont les outils, s’ils sont effectivement utilisés et quel est leur état d’usure est précieux. Optimiser l’utilisation des outils tout en garantissant la sureté de réalisation des chantiers est une source d’efficacité et d’économies potentielles à ne pas négliger. Colas Rail va commencer l’expérimentation de ces outils connectés au printemps 2016 sur 250 outils mais potentiellement, ce sont 10 000 outils qui pourraient se voir équipés d’une puce de communication.

Enfin, Colas Rail a commencé à déployer au sein de ses agences travaux, les casques de chantier de nouvelle génération Oscar 2.0. Ceux-ci disposent d’un indicateur de présence de courant alternatif, d’une fonction éclairage adaptatif, une fonction particulièrement importante quand on sait qu’une bonne part des travaux réalisés sur les voies le sont de nuit. Une fonction radio permet aux membres d’une équipe de communiquer. La prochaine version du casque, encore en cours d’études, pourrait disposer d’un équipement qui signalera automatiquement la présence du personnel sur les voies aux conducteurs d’engins, d’une connexion Bluetooth ou encore d’un retour de l’annonce des trains croiseurs. Cette version connectée devrait être présentée en 2017.

Engie Cofely mise sur Sigfox pour le suivi énergétique

 

Engie Cofely (ex-Cofely Services) est un poids lourds de la gestion énergétique en France. Le prestataire gère l’énergie de 15 000 sites en France, que ce soient les bâtiments des conseils généraux, des lycées, des collèges mais aussi de l’habitat collectif, des hôpitaux, etc. Des contrats d’une durée de 3 à 10 ans qui justifient la mise en place d’outil de pilotage à distance des installations. « Depuis une dizaine d’années, nous installons des solutions de pilotage énergétique en temps réel sur les installations de nos clients », explique Hervé Bidou, Directeur Smart Evolutions et à la tête de la direction Innovation & Marketing des Solutions d’Engie Cofely. « Ce sont des systèmes bien maîtrisés et qui nous permettent de prendre des engagements sur la performance énergétique. Nous nous engageons sur une quantité d’énergie et c’est Cofely qui achète l’énergie. Si cette quantité est dépassée, c’est à notre charge et si des économies sont réalisées par rapport à ce montant, les gains obtenus sont partagés avec notre client. »

Ces installations mettent en œuvre des échanges de données sur les sites via Wireless M-Bus, le standard européen du « smart-metering » puis la collecte ainsi que le contrôle à distance des installations est réalisée via des liaisons cellulaires 3G ou des liens ADSL. « L’inconvénient de cette approche, c’est le coût que cela représente par point géré » ajoute Hervé Bidou. « Une telle approche n’est possible que lorsque les rendements énergétiques sont importants et nous permettent de financer l’installation. Pour un simple suivi des consommations sur un portail de télérelève, les clients ne peuvent supporter un tel investissement. Nous avons cherché une solution plus économique et nous l’avons trouvé avec Sigfox. » Outre le faible coût des transmissions, Sigfox apporte à Engie Cofely un réseau ainsi que son infrastructure de collecte des données à laquelle le SI d’Engie Cofely vient s’interfacer via des API.

Le prix des objets connectés à été divisé par 3

Si Sigfox résolvait le problème des coûts télécom, Cofely devait résoudre celui des capteurs connectés, bien trop onéreux pour les plus petit clients visés par l’industriel. « Nous avions principalement besoin de 6 objets connectés pour faire du « smart-metering ». Des capteurs de température ambiante, de température de tuyauterie, des compteurs de gaz, d’eau chaude sanitaire, des capteurs de téléalerte. En janvier 2015, ce type de capteurs connectés n’existait pas ou coûtaient très cher, de l’ordre de 250 à 270 euros pièce. Nous avons travaillé durant toute l’année 2015 pour bâtir une gamme d’objets connectés dont le prix a été divisé par 3. »

La prise de participation d’Engie dans Sigfox (GDF Suez New Ventures a participé à la levée de fonds de 100 millions d’euros de Sigfox en février 2015) a crédibilisé l’opérateur toulousain notamment aux yeux des industriels qui produisent des capteurs pour Engie Cofely. Cela a permis l’arrivée de cette nouvelle génération de capteurs à prix plus faible. La durée de vie d’une sonde de température d’ambiance, qui va envoyer une mesure toute les heures est théoriquement de 5 à 8 ans, contre 8 à 10 ans pour les sondes placées sur les compteurs qui n’envoient qu’une mesure par jour.

Autre atout de l’offre Sigfox, les industriels n’ont pas nécessairement besoin de revoir la carte mère de leurs objets connectés pour y intégrer une puce Sigfox (comme c’est le cas pour LoRa). Sigfox fournit le firmware qui permet de moduler/démoduler le signal 868MHz compatible avec son réseau. Engie Cofely utilisait déjà des objets connectés qui communiquait en Wireless M-Bus sur 868MHz, une simple mise à jour logicielle les rendra compatibles Sigfox.

15 000 objets connectés, pour commencer

L’offre « smart metering » d’Engie Cofely doit être officiellement lancée à la fin du mois de janvier 2016, avec cette gamme d’objets connectés, un abonnement Sigfox et l’interface d’intégration sachant que Cofely disposait déjà du back-end informatique. Le prestataire de service va lancer cette activité avec un abonnement de 15 000 objets auprès de Sigfox, un chiffre qu’Hervé Bidou espère pouvoir dépasser rapidement.

Pour prendre l’exemple d’une cité d’habitation collectif, un capteur de température ambiante est placé à chaque point cardinal de chaque étage d’un bâtiment. Un chiffre à multiplier par le nombre de bâtiments de la cité, plus quelques compteurs pour l’électricité, le gaz. Il faut communément entre 100 à 250 sondes par cité pour couvrir le besoin, ce qui rend le responsable très optimiste quant au passage rapide du cap des 15 000 objets connectés.

Un SI taillé pour la qualité de la donnée

Outre ces aspects réseau et objets connectés, Engie Cofely a du préparer son système d’information à l’arrivée de cette vague d’objets connectés sans précédent. « Nous avons déjà notre système d’information SI Energie et l’outil Cofely Vision en production depuis 2010 et qui permet déjà de gérer 15 000 installations en temps réel, soit environ 4 millions de nouvelles données reçues chaque jour. C’est un système qui a la capacité de faire face à l’arrivée des nouvelles données », commente Hervé Bidou. « Là où nous avons du être vigilants, c’est sur l’aspect Big Data, non pas dans le sens de la quantité des données, mais dans celui de leur qualité. »

L’arrivée de données issues de capteurs en temps réel c’est de nombreuses données parasites, de fausses mesures, ou des valeurs incohérentes. Cela veut dire qu’il faut les traiter et les corriger avant de les injecter dans SI Energie. « C’est la raison pour laquelle nous avons mis en place un MDM. Celui-ci doit assurer la cohérence des données (comparaison de la donnée par rapport à des seuils attendus), leur complétude (que faire lorsqu’il manque une mesure) et enfin que faire lorsqu’on change de compteur, lorsqu’il y a un passage à 0, etc. Même si cette plateforme intègre quelques briques du marché, il s’agit d’un développement interne car il n’existait pas sur le marché de solutions capables de répondre à notre besoin, en tout cas pas à cette échelle. Nous avons crée cette plateforme ce qui nous donne un avantage concurrentiel très puissant sur le marché. C’est une richesse de l’entreprise qui est devenue névralgique pour Engie Cofely. 10 000 techniciens peuvent se connecter à tout moment sur les 15 000 installations que nous gérons déjà pour y apporter un changement. »

Fort de simulations réalisées ces derniers mois, le responsable est serein quant à l’arrivée de cette vague de données : « Nous avons réalisé des simulations de 15 000 à 100 000 objets connectés supplémentaires. Le système est modulaire et à chaque fois que nous accueillons 10 000 objets supplémentaires, il nous suffira d’ajouter des serveurs en conséquence. » L’investissement consenti sur cette plateforme est de l’ordre de 10 millions d’euros.

Les grues connectées de Manitowoc fidèles à la 3G et au GPRS

Qui, en France, ne connait pas les grues Potain ? Le français qui appartient aujourd’hui à l’américain Manitowoc, en a construit plus de 120 000 depuis sa création, en 1928. Des grues qui sont aujourd’hui communicantes. L’une des premières applications mise en place, ce sont les systèmes anticollision. Sur un grand chantier où vont cohabiter parfois plusieurs dizaines de grues, un système radio relie toutes les grues, que ce soient les grues à tour ou les grues mobiles, afin de coordonner leurs mouvements. Il faut empêcher que la charge d’une d’entres elles viennent heurter une autre charge.

« Le système permet aux grues de se repérer dans l’espace les unes par rapport aux autres » explique François Rotat, chef de produit des grues à tour chez Manitowoc. « Lorsqu’une grue doit tourner à gauche, par exemple, le système vérifie au préalable que les grues avoisinantes sont dans une position compatible avec ce mouvement ». En France, Manitowoc utilise des solutions développées en partenariat avec Ascorel, un système qui utilise une connexion des grues par câble ou par liaison radio directe. « Ce système fonctionne sur 870 Hz, une fréquence très utilisée sur les chantiers car elle est peu perturbée par les structures métalliques. »

Des grues connectées en GPRS et 3G

Outre cette application très directement liée à la sécurité des chantiers, Manitowoc équipe depuis plus de 5 ans maintenant ses grues d’un boîtier de communication GPRS/3G. Celui-ci permet aux équipes d’intervention de se connecter à la grue afin de réaliser un diagnostique à distance en cas de panne. Ce boitier alimente aussi CraneSTAR, l’application de gestion de flotte de Manitowoc. Entre 2 000 et 2 500 des grues Manitowoc exploitées en Europe sont aujourd’hui connectées à ce système.

« Depuis la fin de l’année 2015, nous faisons évoluer notre gamme européenne en dotant nos grues de véritables calculateurs embarqués, et non des automates comme par le passé », précise François Rotat. « Cela nous ouvre la possibilité de placer des capteurs beaucoup plus précis sur nos grues et d’avoir plus de retours d’information. Le but est double. Nous disposons de plus d’informations possibles sur l’état de charge de la grue, mais aussi des informations sur l’état de la grue. En d’autres termes, l’opérateur ou l’expert devant son PC a les mêmes informations que s’il était devant l’armoire électrique de la grue sans avoir à se déplacer. »

Un gros effort de développement

Manitowoc place des calculateurs programmés sous Linux sur ses grues à tour, ses grues mobiles et ses grues à chenille et développe lui même le logiciel embarqué de ses grues. « C’est un domaine très spécifique qu’il est difficile de sous-traiter. Nous avons une équipe d’une quinzaine de développeurs à Dardilly, près de Lyon, qui développent nos logiciels pour ce qui concerne les grues à tour, et cela est de même pour les autres lignes de produits. » Le diagnostic à distance est l’application qui est en cours de déploiement et qui suit l’application sur la gestion de flotte qui est déjà mise en place depuis 5 ans.

Plutôt que de devoir envoyer un technicien sur le chantier en cas de panne pour évaluer le dysfonctionnement, puis aller chercher les pièces à remplacer en atelier avant d’intervenir enfin, via la connexion cellulaire, le technicien peut évaluer à distance l’état de la grue et partir en intervention directement avec les pièces à remplacer. Le gain de temps est évident, notamment pour des chantiers les plus isolés. « Si, par exemple, une défaillance frappe un convertisseur de levage, l’élément qui délivre sa puissance au moteur, le technicien va pouvoir constater à distance si le problème vient du moteur ou du convertisseur. » Ce service est aujourd’hui disponible partout en Europe et en Suisse, sachant que Manitowoc a passé un accord avec Orange Business Service qui lui fournit la connectivité GPRS et 3G.

En parallèle au télédiagnostic, les grues Manitowoc envoient un rapport sur leur activité toutes les demi-heures, notamment pour indiquer les charges qui ont été soulevées par la grue. Cet historique des charges transportées vient enrichir l’application CraneSTAR. Néanmoins cette donnée n’est pas utilisée dans le cadre d’une maintenance préventive des grues car la réglementation impose une inspection trimestrielle de chaque grue.

Crédit Photo : MNBB Studio-Shutterstock

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