Dossier spécial : Open Source, comment, pour qui, pour quoi?
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1 ? Le marché de l’open source 2 ? Les motivations de l’open source 3 ? Les acteurs du marché 4 ? Et Microsoft dans tout ça ?
>>>>> 1 ? Le marché de l’open source
2 ? Les motivations de l’open source 3 ? Les acteurs du marché 4 ? Et Microsoft dans tout ça ? Microsoft et interopérabilité… 5 ? Retour sur 2006, une année charnière 6 ? Perspectives 2007
1 – Le marché ‘Open Source’ |
La France, l’un des pays phares du logiciel libre ! Une étude Pierre Audoin Consultants (PAC) vient confirmer cette vision d’un marché de l’open source qui ne cesse de progresser. Ainsi en 2006, ce marché aurait représenté un volume de 450 millions d’euros sur le seul territoire français.
Plus significatif encore, le marché n’a pas marqué de pause dans sa progression, avec une croissance impressionnante de 80 % en 2006, un point de mieux que l’année précédente ! « Le logiciel libre est devenu une vague technologique majeure qui fait partie intégrante de la stratégie de l’immense majorité des acteurs du marché, qu’ils soient utilisateurs, prestataires de services ou éditeurs« , affirme le rapport de PAC.
« Depuis plus de 10 ans, nous assistons à des bouleversements profonds qui ont fait qu’aujourd’hui l’Open Source est un logiciel comme les autres qui répond aux besoins des entreprises. L’Open Source est généralement encapsulé avec le système de l’entreprise et propose un service qui n’est pas différent pour l’entreprise« , conforme Olivier Guilbert, président d’IdealX.
Cette progression régulière de l’open source s’appuie sur plusieurs phénomènes. La banalisation des technologies, tout d’abord ? beaucoup d’entreprises embarquent des produits open source, généralement sans le savoir ! -, mais aussi la standardisation, ainsi que l’approche collaborative. Sans oublier un certain aspect ‘idéologique’, qui domine en particulier par la dépense publique et dans les administrations.
« Le marché du logiciel libre reste très largement orienté ‘services’ et fortement stimulé par l’informatique scientifique, technique, industrielle et embarquée (STIE). C’est potentiellement une chance car ce sont là deux points forts de l’informatique française« , vient confirmer PAC.
Rappelons que les futurs députés seront ‘libres ‘, les logiciels ‘libres’ équiperont les ordin ateurs de l’Assemblée nationale dès la prochaine législature. Et qu’ OpenOffice fait son chemin dans l’administration française, le ministère du Budget et de la réforme de l’Etat a fait un premier bilan, 400.000 postes dans les administrations françaises auront migré sur OpenOffice.org avant 2007.
Pour autant tout n’est pas rose dans le monde de l’open source, qui pour ses acteurs éditeurs continue en particulier de pécher par la faiblesse de son modèle économique. » L’un des principaux handicaps du logiciel libre, qui est le même que pour le reste de l’édition logicielle française, c’est l’insuffisance du capital-risque », rappelle PAC.
Une tendance qui recouvre l’Europe, avec certes quelques disparités mais qui viennent finalement renforcer cette vision. D’ailleurs, la Commission européenne n’est pas indifférente et participe même activement au marché en étant le principal contributeur des communautés, à hauteur de 45 %.
L’Europe justifie l’open source, une étude commandée par la Communauté européenne pointe les bénéfices des logiciels ‘Floss’.
– Les segments de l’open source professionnelle
Il y a cinq segments dans lesquels entreprises investissent dans l’open source :
– les applications d’entreprise, bureautique, ERP (gestion), CRM (clients), email, BCM (gestion de contenu), BI (Business Intelligence) ;
– les outils de développement, développement d’applications, collaboration, gestion du cycle de vie des projets ;
– les serveurs web et d’applications, plates-formes et serveurs applicatifs, middleware, ESB (Enterprise Server Bus), suites d’intégration, produits de messagerie instantanée, portails ;
– les bases de données, pré-relationnelle et relationnelle ;
– et les systèmes d’exploitation.
L’exemple d’IBM est significatif, le géant de l’informatique est présent sur tous ces segments, à la fois avec des solutions propriétaires et avec des solutions open source.
Revenus logiciels d’IBM en 2005, source Harvard Business School
– Pourquoi les entreprises investissent dans des projets open source ?
La question en elle-même est riche d’enseignements, car on investit dans les solutions open source, ce qui signifie que les entreprises ne sont pas dupes? L’argument de la gratuité a fait son temps !
Il y a quatre motivations identifiées pour adopter une stratégie d’adoption de l’open source, dont deux économiques inévitables : le prix, la gratuité des produits bien évidemment, et l’économie de marge que l’on en tire qui permet d’envisager d’affecter des fonds à d’autres ressources.
Mais les autres motivations sont de plus en fortes : la standardisation des composants technologiques, les plates-formes open source ont en effet très rapidement compris l’intérêt d’adopter et de respecter les standards ; la complémentarité des produits avec les grandes solutions du marché, et donc l’interopérabilité avec les autres produits, qu’ils soient propriétaires ou open source.
Rappelons qu’il en va de la survie du monde de l’open source de respecter les standards et de jouer l’interopérabilité. Il y en a un autre qui l’a bien compris, c’est Microsoft (voir notre analyse de Microsoft et l’open source plus loin) !
La suite de notre dossier…
>>>>> 2 ? Les motivations de l’open source
3 ? Les acteurs du marché 4 ? Et Microsoft dans tout ça ? Microsoft et interopérabilité… 5 ? Retour sur 2006, une année charnière 6 ? Perspectives 2007
2 ? Les motivations de l’open source |
Dix-huit projets open source ont drainé plus de 2 milliards de dollars d’investissements. Ils représentent à eux seuls plus de 90 % des investissements dans le monde du libre, ce qui vient démontrer que tout le monde est loin de bénéficier d’un même traitement, et surtout que si de grands acteurs ? comme IBM, Novell ou Oracle ? investissent ce marché, ce n’est sûrem ent pas dans une approche philanthropique !
Certes, certains fonds à l’image d’Intel Capital investissent sur des projets prometteurs de start-ups, mais la loi de l’économie se doit de l’emporter à un moment ou à un autre.
Alors, quels sont ces projets open source qui séduisent les entreprises et emportent la mise ?
Chez les développeurs, les motivations sont claires : 80 % s’entre eux, interrogés par la Harvard Business School, se sont déclarés attirés par de nouvelles connaissances et compétences, et 50 % par le partage de ces mêmes connaissances et compétences. Mais l’argent n’est jamais bien loin, 50 % ont indiqué qu’ils ont été payés pour travailler sur des projets open source ou qu’ils espèrent gagner de l’argent en étant recrutés pour travailler sur ces projets.
Ils passent pour 22,5 % d’entre eux moins de 2 heures par semaine à développer de l’open source (en moyenne une heure par semaine), et pour 7,1 % plus de 40 heures (en moyenne 50 heures par semaine). La moyenne de temps passée par les développeurs sur des projets open source est de 11,4 heures par semaine.
Chez les acteurs du marché qui participent au développement et à la diffusion de l’open source, les motivations affichées ont parfois de quoi faire rêver : ‘la sensation d’appartenir à une communauté’ et ‘la lutte contre les logiciels propriétaires’ côtoient ‘la volonté de ne pas trahir la communauté des développeurs’ et ‘la réduction du marché des grandes sociétés du logiciel’ !
Un peu plus de réalisme serait de bon aloi ! La Harvard Business School, encore une fois, révèle que la motivation des contributeurs est à 34 % économique, à 19 % altruiste, et mélange allègrement les deux chez les autres.
– Une classification des projets open source
On peut discerner plusieurs types de projets open source : les projets orientés exploration et R&D drainent les meilleurs programmeurs qui offrent la meilleure qualité de code ; les projets orientés utilitaires se développent sur une multitude de sous projets ; la SOA (service oriented architecture) est probablement l’approche de l’open source la plus solide et robuste, et concerne bien évidemment tous les autres domaines, mêmes propriétaires.
Segmentation des projets open source, source Harvard Business School
On peut aussi qualifier les projets open sources en deux camps : un premier (‘Cluster 1‘ dans le schéma qui suit) qui réunit un nombre très limité de projets qui en revanche bénéficient de la quasi-totalité des investissements ; et un second (‘Cluster 2‘) qui réunit tous les autres et innombrables projets open source qui ne bénéficient d’aucun budget, or celui que leurs consacrent leurs développeurs.
Projets open source investis, source Harvard Business School
Le ‘Cluster 1‘ a capté 99,99 % des investissements des investissements dans le monde de l’open source, le ‘Cluster 2‘ 0,01 % ! Ici, pas de secret : Linux a drainé 73 % des investissements, et si on ajoute Firefox et OpenOffice, c’est 92 %…
Il est nécessaire de mettre fin à une idée reçue : si 91 % des projets open source tournent sous Linux, 75 % et pas des moindres (Firefox, JBoss, ShugarCRM, etc.) tournent sous Windows. Hors les systèmes d’exploitation, les grands projets open sources restent pragmatique et n’échappent pas à la première plate-forme du monde, Microsoft Windows, même si ce dernier est très loin d’être un contributeur à la communauté.
La suite de notre dossier…
>>>>>3 ? Les acteurs du marché
4 ? Et Microsoft dans tout ça ? Microsoft et interopérabilité… 5 ? Retour sur 2006, une année charnière 6 ? Perspectives 2007
3 ? Les acteurs du marché |
Le marché mondial du logiciel open source est dominé par trois acteurs ; le géant IBM – qui a contribué pour plus d’un milliard de dollars au développement et à la promotion du système d’exploitation Linux -, Red Hat et Novell, les deux éditeurs des distributions Linux (Red Hat Linux et Novell Suse Linux) les plus présentes sur le marché.
Pour autant, ils sont très loin d’être les seuls, et on assiste à l’arrivée de grands acteurs comme Oracle et SAP.
Verra-t-on une ‘distribution’ Linux signée Oracle ?
Les propos de Larry Ellison, le président d’Oracle, à Forbes, ont relancé les spéculations autour d’une distribution Linux signée Oracle. Après Novell Suse, c’est Red Hat qui figure au centre de la rumeur
En France, un marché qui compte moins de grands acteurs du développement, même si les projets de start-ups ou de petits éditeurs plus ou moins reconnus sont légion, ce sont les prestataires de services, comme Capgemini, Thales ou Atos Origin qui intègrent les briques open source dans des projets souvent plus importants.
N’oublions pas non plus que Linux est aujourd’hui proposé par la quasi-totalité des fabricants sur leurs serveurs, IBM, HP, Dell, Bull, etc., en alternative soit aux systèmes Unix, mais surtout à Microsoft Windows Server.
Le mot est lancé, ‘alternative’? Car s’il est un ciment qui réunit tous ces acteurs et les pousse à proposer dans leurs catalogues du Red Hat, du Novell, ou encore du Mandriva en France, c’est bien l’opposition à Microsoft. Le géant mondial du logiciel inquiète, domine, et soulève toutes les convoitises.
Un coup d’?il sur les projets open source. La Harvard Business School a choisi une méthode simple pour mesurer les plus grands projets open source : le taux de téléchargement exprimé en volume.
C’est bien évidemment le système d’exploitation Linux qui a attiré le plus d’intérêts. Suivent la suite bureautique OpenOffice, la base de données MySQL, le navigateur Firefox, la plate-forme middleware JBoss, le serveur Web Apache, les langages Perl, Python, PHP, etc. On voit aussi apparaître (les chiffres datent de la fin 2005) la solution de gestion des clients ShugarCRM, ou encore la solution d’ERP Compiègne.
Volumes de téléchargement des projets open source, représentation en mode exponentiel, source Harvard Business School
Autre constat, la concentration des investissements dans des solutions d’entreprise alternatives, OS serveur, bureautique, internet, middleware et SOA, CRM, ERP? Une tendance qui rappelle que l’on peut se déclarer une âme de philanthrope et conserver une approche de rentabilité. Il n’y a guère que les fondations à but non lucratif pour investir dans des projets comme SourceForge (plate-forme d’accueil et de partage des projets open source) ou l’encyclopédie collaborative Wikipedia.
Dans le cas des projets open source qui occupent le devant de l’actualité, les contributions bénévoles, le temps de volontariat, les donations individuelles ou de fondations s’effacent, remplacés par un focus unique : la motivation des vendeurs et la volonté des clients à payer? le support et le service.
– Open source, ça rapporte ?
On peut alors s’interroger sur l’importance des projets open source chez ses grands distributeurs, IBM, HP, Oracle ou encore Red Hat ? Il est trop taux pour évoquer la question sur 2006, ils commencent seulement à rendre leurs copies et on ne peut encore décortiquer leurs résultats.
En revanche, les chiffres 2005 sont connus, et ils appellent à relativiser l’importance du logiciel communautaire. Prenons IBM par exemple, de loin le premier acteur de ce marché. Rappelons tout d’abord que Big Blue a consacré autant d’investissement à Linux qu’à son OS Unix propriétaire, AIX. En 2005, les revenus de l’open source ont représenté 5 % du total de ses revenus, soit environ 4,5 milliards de dollars sur un chiffre d’affaires total de 87 milliards.
Alors, soit on analyse ces chiffres par un encouragement ? ça progresse ! -, soit on les analyse avec une certaine distance ? c’est encore faible !
Revenus open source / total revenus, source Harvard Business School
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>>>>> 4 ? Et Microsoft dans tout ça ?
Microsoft et interopérabilité… 5 ? Retour sur 2006, une année charnière 6 ? Perspectives 2007
4 ? Et Microsoft dans tout ça ? |
On pourrait légitimement s’interroger : l’open source aurait-il existé sans l’omniprésence de Microsoft ? Très certainement, mais on ne peut nier non plus le rôle du géant du logiciel dans la stigmatisation du logiciel propriétaire et pour renforcer l’esprit communautaire de ses opposants, tout en favorisant l’adoption de Linux et des solutions open source par ses concurrents.
Sauf que Microsoft n’est ni absent ni indifférent au monde de l’open source. Nous évoquons ce sujet sensible avec Marc Gardette, responsable stratégie de Microsoft France
« Nous sommes victime du manichéisme, de la dichotomie qui a fait de Microsoft l’archétype du logiciel propriétaire. Mais cette image d’Epinal s’estompe. Pourtant, nous adoptons le même positionnement que les autres acteurs du marché, avec des doses de plus en plus fortes d’open source. Nous sommes dans un continuum qui touche plusieurs dimensions, de l’économie aux licences. »
Microsoft s’est interrogé sur la motivation des éditeurs qui investissent la communauté ? Il en déduit logiquement l’existence de deux approches de l’open source : les ‘gros gros projets‘, peu nombreux, et les ‘projets communautaires‘ ; avec pour chacune des stratégies différentes, mais complémentaires des stratégies propriétaires.
Microsoft adopte la même démarche, un socle logiciel d’éditeur propriétaire, et l’investissement dans l’open source en tant que complément naturel.
« Nous souhaitons transmettre un premier message fort. Nous faisons la différence entre les produits issus de l’open source et concurrents de nos produits, Linux, OpenOffice, PHP-MySQL, et dans une moindre mesure Firefox, et la communauté qui n’entre pas réellement en concurrence mais sur laquelle nous nous appuyons pour créer de la valeur. »
« Microsoft est un éditeur de logiciels qui vit de la vente de sa plate-forme. Nous voulons créer de la valeur autour de Windows et miser sur l’interopérabilité avec les gros projets open source en créant un écosystème Et avec un modèle de licence Microsoft qui permet de créer dans les plates-formes open source. »
« Notre second message est de rappeler que nous ne sommes pas en guerre ou en opposition avec la communauté. Sous l’impulsion de Bill Hilf[le directeur de la stratégie plate-forme de Microsoft]nous avons engagé le dialogue avec JBoss, qui tourne en majorité sous Windows, Novell, MySQL à 50 % sous Windows ou Zend pour améliorer le moteur PHP sous Windows. »
« Notre intérêt est de disposer de puissantes fonctionnalités avec plus de sécurité et de performances, comme nous l’avons fait en dialoguant avec la fondation Mozilla sur Firefox pour son intégration dans Vista. On essaye de travailler en bonne intelligence pour satisfaire tout le monde. »
Autre axe de la stratégie de Microsoft dans l’open source, la ShareSource Initiative. Ce programme a été initié voici plusieurs années afin d’ouvrir le code source de Windows. Cette ouverture était destinée à la validation de l’OS auprès de certains clients comme les administrations. Elle s’accompagne d’une licence qui interdit de modifier et de modifier le code.
« Pour les personnes qui ont besoin de publier du code source, nous avons créé deux nouvelles licences, ‘Permissive Licence’ qui permet de tout faire et une licence communautaire qui impose de redistribuer les contributions limitées aux nouveaux modules. A l’exemple de Shuigar CRM qui utilise une licence ShareSource. »
« Nous avons fait évoluer la notion de licence afin de répondre aux attentes des éditeurs qui choisissent le ‘business model’ de l’open source. Et nous avons créé CodePlex, une plate-forme ‘forge’ et un environnement hosté adapté à .NET qui héberge déjà plus de 600 projets de type open source. Il y a ainsi beaucoup de projets autour de Sharepoint. Et puis, il y a énormément de projets open source sous Windows sur Source Forge. »
Enfin Microsoft déploie sa stratégie open source sur un troisième axe, la communauté…
« C’est l’esprit open source. Nous avons créé l’Open Source Lab qui réunit une quarantaine de développeurs qui ne sont pas liés à Microsoft. Nous travaillons sur des scénarios Linux destinés à valider des scénarios d’interopérabilité avec Windows. Ou encore Port25 qui propose beaucoup d’articles à télécharger. »
« Microsoft a toujours beaucoup investi dans les communautés. Il est vrai qu’elle ne participe pas directement au développement de Windows, mais elle y participe via CTP, les bêtas, etc. »
« Microsoft doit maintenir sa logique de plate-forme, dans l’espace et dans le temps. Nous devons maîtriser le développement de la plate-forme clé et piloter notre roadmap produits, ce qui représente une différence fondamentale. »
La suite de notre dossier…
>>>>> 5 ? Retour sur 2006, une année charnière
5 ? Retour sur 2006 |
S’il fallait qualifier l’année 2006 pour Linux et l’open source au travers d’évènements et de produits, nous retiendrions certainement trois moments forts, chronologiquement :
– Novell SUSE Linux Enterprise Desktop 10
Pour la première fois, un grand éditeur d’une distribution Linux se lance sérieusement dans l’aventure du poste de travail. Certes, cette annonce était attendue, mais tout portait à croire que les acteurs de l’open source n’y croyaient pas, laissant à Microsoft, Windows, Office et Internet Explorer le champ du poste de travail.
Pourtant, Novell a relevé le défi, et c’est probablement sa première véritable contribution à la communauté. Il démontre qu’une alternative sérieuse à Microsoft existe sur le poste de travail. Et chacun de préparer sa distribution desktop. Il existe un autre avenir que Windows pour simplement saisir des documents, aligner des chiffres ou surfer en ligne, mais il faudra s’accrocher !
Novell annonce SUSE Linux Enterprise 10
– Accord Microsoft et Novell sur Linux
La communauté a-t-elle fait plier le géant de Redmond, ou au contraire doit-elle craindre que Novell ait fait entrer le loup dans la bergerie ? Peu importe, le plus important c’est que Microsoft a enfin reconnu le monde Linux et qu’il ne puisse plus revenir sur cela.
Microsoft Windows supporte Novell Linux
L’accord est cependant porteur de beaucoup plus de choses que la simple reconnaissance ! Il est l’aboutissement d’une longue marche de l’industrie vers les standards, mais aussi vers l’interopérabilité. Accord Microsoft (Windows) Novell (Linux) : la révolution est en marche.
L’important n’est plus de savoir si Linux a sa place dans le paysage informatique, celle-ci lui est acquise et désormais reconnue par ‘l’ennemi héréditaire’ du pingouin. L’important aujourd’hui est que tout ce petit monde, car il s’agit bien d’un microcosme malgré les milliards qu’il draine, cohabite et communique.
Microsoft-Novell : ‘ Nous établissons un pont entre deux mondes ‘, nous a affirmé Bernard Ourghanlian, directeur ‘Technologie et Sécurité’ de Microsoft France |
– Java en open source
Sun Microsystems va ouvrir Java à la communauté open source. Enfin diront certains, trop tard pourrions-nous relativiser !
Java open source est un micro événement pour Sun, qui confirme sa volonté de basculer l’ensemble de ses environnements logiciels dans le monde du libre (afin de s’attirer la sympathie de la communauté et de ventre du service et du hardware?). C’est un geste fort, dont l’implication financière sera probablement faible car depuis longtemps Java n’appartient plus à Sun dont la communauté s’est bien passée sans état d’âme.
Java vit désormais sa propre vie‘, nous a affirmé James Gosling, le créateur mythique de Java, à l’époque où l’open source n’était pas d’actualité.
– Une page se tourne !
Et pourtant, l’essentiel de l’année 2006 n’est pas là ! Il est culturel et pourrait marquer le monde du libre pour longtemps, voire très probablement définitivement ! Le plus important à retenir de cette année charnière sera la séparation, la cassure, le gouffre qui s’est créé entre les deux approches de Linux et du libre, le professionnel et le hobby.
L’année 2006 n’aura pas été marquée par des changements technologiques profonds, à peine par des nouveautés. En revanche, Linux et l’open source sont devenus une affaire de professionnels, n’en déplaise à la communauté.
Faisons preuve tout d’abord d’un peu de réalisme. L’argument de la gratuité, de la licence libre, n’est qu’accessoire. Au pays des serveurs, du middleware, de la consolidation, du SOA, la licence est devenue une part négligeable des budgets informatiques. A l’exception bien évidemment de quelques très grosses applications ? SAP ou Oracle pour ne citer que ceux là -, qui comme par hasard n’ont quasiment pas de concurrence sérieuse dans le monde de l’open source, l’essentiel d’un budget est désormais consacré au conseil, au développement, au déploiement et au support, étonnamment (vraiment ?) tout ce qui fait partie du modèle économique de l’open source.
Quelle est alors la place à la passion et au fanatisme de la première heure ? Les contributions bénévoles, certes, mais seulement sous contrôle des responsables des projets et des plates-formes. Les jeux sont faits et désormais le hobby n’a plus sa place.
Cette vision du monde libre trouve une expression inattendue dans le clivage qui s’élargit entre le noyau dur des développeurs du kernel Linux, avec à leur tête Linux Torvalds, et la FSF (Free Software Foundation), lors des travaux sur GPLv3. Le pragmatisme des premiers les oriente vers la volonté de conserver un code libre, tandis que l’idéalisme des seconds les oriente plutôt vers la présence de clauses anti DRM (Digital Right Management).
Linus Torvalds refuse la licence ‘libre’ GPL v3 le créateur de Linux a affirmé qu’il ne veut pas livrer le noyau Linux.
Autre exemple flagrant, l’évolution de la distribution Linux Ubuntu. Même si elle reste libre, elle migre lentement mais sûrement une approche professionnelle régie par ses propres règles.
Et que penser de la guerre des prix qu’à lancé Oracle ? Casser les prix sur un produit réputé gratuit, ce n’est pas très communautaire, ça !
Comme on le constate, deux mondes commencent à s’affronter et à évoluer dans une fourchette dont les branches s’écartent inexorablement ! Une branche idéaliste et une branche commerciale. Qui va gagner ? Il est à craindre que les jeux ne soient faits, et depuis longtemps. Depuis d’IBM a investi le monde de l’open source, par exemple? Car si les premiers ont la foi, les seconds tiennent les cordes de la bourse !
La suite de note dossier…
>>>>> 6 ? Perspectives 2007
6 ? Perspectives 2007 |
2007 : une année clé pour l’open source…
L’un des événements les plus importants de cette année 2007 pour la communauté open source n’est certainement pas le plus attendu ! Il s’appelle SCO Group et devrait clore définitivement une longue procédure judiciaire opposant le propriétaire des droits d’Unix à IBM et Novell, et par ricochet l’ensemble des utilisateurs de Linux.
On l’avait presque oublié, mais une épée de Damoclès continue de peser sur le monde Linux. SCO accuse en effet IBM d’avoir détourné du code propriétaire d’Unix qu’il aurait injecté dans le code de Linux ! S’il semble que l’issue du procès sera probablement favorable à IBM, la communauté doit encore retenir son souffle, les arcanes de la justice peuvent encore réserver quelques surprises.
Pour autant, l’actualité judiciaire du monde de l’open source n’est pas encore prête à se refermer. Car la plus grande inquiétude de la communauté provient d’un événement de 2006 qui n’a pas fini de faire parler de lui, le rapprochement entre Novell et Microsoft…
En effet, au-delà des bonnes intentions nommées ‘interopérabilité’ affichées par les deux larrons, c’est le montage juridique de l’accord, et en particulier le partage de la propriété intellectuelle de l’un et de l’autre, qui s’annoncent source de conflit. Et pour certains de s’interroger sur l’avenir de la licence GPL si Microsoft glisse dans le code Linux des brides de code Windows ?
Microsoft pourrait bien jouer ici un jeu subtil ! Tout au lancement de Windows Vista, il va s’efforcer de limiter la carte de l’alternative Linux. Et la communauté de tenter de jouer le jeu inverse, profiter des nouvelles conditions environnementales imposées par Vista pour avancer la carte Linux et open source. Une guerre de positions s’installe…
Un autre virage s’annonce également pour la communauté du libre, technologique celui là : la 3D. Microsoft a déjà franchi le pas avec Vista, les utilisateurs déjà équipés de PC en sont pourtant majoritairement encore loin. Une opportunité pour Linux ? Peut-être, sauf qu’il faut aussi prendre en compte l’évolution du marché.
Les constructeurs et assembleurs proposent déjà des PC ‘gonflés’ pour Windows Vista. Mais après le rachat d’ATI par AMD, le fondeur pourrait donner le coup de grâce et imposer la 3D à tous les étages. Intel et Nvidia suivront. Mais tous les éditeurs sont-ils prêts ? La réponse est non ! Surtout que le graphisme haute résolution n’est pas la priorité des datacenters, qui en revanche sont le fer de lance de Linux.
L’autre grand challenge de l’année 2007 s’appelle la virtualisation. Face à l’incontournable VMWare, Xen va rendre sa copie, et d’autres projets open source attendent leur heure. Un autre acteur incontournable sera à ce propos observé à la loupe, Oracle. Qu’il s’agisse de ses bases de données ou de son futur middleware, convergence de sa stratégie d’acquisition, l’éditeur devrait imposer sa solution, probablement une appliance logicielle Linux, où la virtualisation devrait occuper le coeur de ses déclinaisons.
Reste une dernière inconnue qui devrait tenter de s’imposer en 2007, la version 3 de la licence GPL. Si la communauté s’entend sur le devenir de ce dossier brûlant. Mais là, rien n’est plus incertain…
La suite de notre dossier…
>>>>>Microsoft et interopérabilité…
5 ? Retour sur 2006, une année charnière 6 ? Perspectives 2007
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Microsoft et interopérabilité… |
Comme le montre notre interview de Marc Gardette, responsable stratégie de Microsoft France, le géant du logiciel n’est pas indifférent à la communauté Open Source et à ses travaux. Il se doit même aujourd’hui de collaborer avec elle, ou tout du moins d’y être ouvert. Ses grands clients ne comprendraient pas qu’il n’en soit pas ainsi.
Il reste que la communauté de l’Open Source se doit aussi de faire preuve de réalisme. Microsoft est présent et bien ancré dans le paysage informatique, il est incontournable ! Alors la question qui se pose aujourd’hui n’est plus de prendre le risque de proposer une alternative à Microsoft, mais plutôt de savoir comment collaborer, ou tout du moins comment s’intégrer à ses plates-formes.
Le fait est que l’actualité récente de Microsoft vient apporter des réponses à cette stratégie qui s’impose?
Tout d’abord, Microsoft mise sur l’interopérabilité
Reconnaissance des standards, adoption de formats concurrents, ouverture des technologies et de la propriété intellectuelle, partenariats, depuis quelques années Microsoft multiplie en effet les démarches en vue d’assurer l’interopérabilité de ses produits avec le marché.
Pour autant, les annonces tous azimuts de l’éditeur laissent planer de nombreuses questions sur sa stratégie, d’autant qu’en affirmant que ‘la richesse d’une application dépend du nombre d’utilisateurs‘, et qu’à ce titre Microsoft s’impose de facto, on finit par s’interroger sur sa vision de l’interopérabilité : en ouvrant ses technologies, Microsoft pourrait bien se contenter de laisser les autres rendre leurs produits interopérables avec les siens…
Cette vision est cependant nettement réductrice, car l’interopérabilité prend de nombreuses formes : technologique bien sûr, spatiale entre les produits et les services, et temporelle pour assurer et conserver un accès aux données dans le temps. Sans oublier l’organisationnel, entre business, processus et identités, et la sémantique, pour assurer la compréhension des données.
Comme le fait fort justement remarquer Bernard Ourghanlian, directeur technologie et sécurité de Microsoft France, « l’interopérabilité devient une nécessité i mpérieuse. »
Microsoft est à la tête d’un énorme écosystème, et il aurait pu se contenter de se limiter à celui-ci, se considérant standard de fait. Mais le marché ne lui pardonnerait pas une telle attitude, d’autant que les dernières innovations touchent des domaines, comme le Web et les services, sur lesquels l’éditeur n’est pas exactement en position de force.
Il faut aussi rapprocher l’interopérabilité de la nécessaire convergence des technologies imposée à la fois par les utilisateurs, mais aussi par l’industrie et sa perpétuelle course en avant de l’innovation? Sans oublier que Microsoft est attendu au tournant par ses concurrents qui ne manquent jamais de dénoncer l’attitude fermée de l’éditeur sur ses technologies. La compétition est féroce?
C’est pour cela que l’interopérabilité est importante pour Microsoft. Comme le souligne Bernard Ourghanlian, « C’est une réflexion de longue date, car n’oublions pas que ce qui augmente la valeur pour le client peut augmenter notre potentiel de vente. »
C’est pourquoi Microsoft n’a pas manqué ces derniers mois d’augmenter singulièrement ses engagements en matière d’interopérabilité, qu’il s’agisse de l’ouverture de sa propriété intellectuelle, de la création de l’Executive Consumer Councilpour être plus à l’écoute de ses clients, des 25 services web sous Open Specification Promise (OSP), imitation des licences open source, de la collaboration avec XenSource sur la virtualisation, ou encore très récemment de l’accord signé avec Novell.
Ces mouvements dessinent les quatre axes retenus par Microsoft, et une grande partie du marché, pour évoluer vers l’interopérabilité : la conception de produits explicitement interopérables, à l’exemple de .NET, la mise en disponibilité sous licence de sa propriété intellectuelle (PI), la collaboration avec l’industrie et l’implémentation des standards.
« En matière de propriété intellectuelle, notre objectif est de nous assurer qu’elle est respectée. C’est pourquoi nous avons reçu des directives précises pour que nos produits ne soient jamais contaminés par du code sous licence GPL. En revanche, notre licence OSP est un engagement irrévocable à ne pas poursuivre ceux qui implémentent notre PI. »
L’exemple le plus prometteur de la démarche d’interopérabilité de l’éditeur, pour Bernard Ourghanlian, reste cependant l’adoption du XML. « L’arrivée d’XML représente de réelles possibilités de disposer d’informations structurées ou non structurées au travers des services web. Jusqu’à présent, l’interopérabilité s’exerçait via des API, aujourd’hui XML indique comment les systèmes discutent entre eux. Pour la première fois l’interopérabilité est vraiment en bonne voie. »
Pour autant, les choses ne sont pas aussi simples ! Et d’abord les rapprochements, adoptions, développements prennent du temps. « L’interopérabilité n’est pas un effet naturel, ça coûte et ça prend du temps« . Surtout lorsque comme Microsoft on dispose d’une gigantesque base installée, et qu’à ce titre l’interopérabilité passe aussi par la préservation des choix, c’est-à-dire des formats initiaux et largement répandus, comme le ‘.doc’ (Word) ou le ‘.xls’ (Excel).
Et c’est sans doute de là que proviennent une partie des incompréhensions et des critiques que Microsoft doit affronter. Par exemple, pourquoi chercher à créer un nouveau standard XML pour les documents bureautiques, OpenXML, soumis à l’ECMA, l’organisme européen et international de normalisation, alors que l’OSI a donné à l’ODF (Open Document Format), développé par Sun au format XML d’OpenOffice.org, le statut de standard international ?
« Parce qu’ODF ne reconnaît pas toutes les fonctionnalités des formats de Microsoft Office(et)que les clients de Microsoft souhaitent retrouver les schémas métiers définis par les utilisateurs« . Microsoft confirme ici sa volonté de procurer la compatibilité totale avec les documents qui ont été créés dans le passé.
Fallait-il alors tenter d’imposer un nouveau format OpenXML ou s’approcher d’ODF pour le faire évoluer ? « Nous n’y avons pas reçu un accueil des plus chaleureux« , nous indique en aparté Bernard Oughanlian, sous-entendu que Microsoft n’est pas le bienvenu dans certains milieux?
La faute à qui ? C’est un autre débat, mais cette opposition parfois systématique à tout ce qui est estampillé Microsoft est inévitablement un han dicap pour l’évolution vers l’interopérabilité, et dans le cas des formats de fichiers bureautiques, cela va se traduire par l’existence de deux normes ! « Tout simplement parce que les objectifs recherchés sont différents« . Il n’est pas certain que les utilisateurs l’entendent de la même oreille?
« Après l’ouverture de nos formats et la publication de ces deux normes, les deux formats vont se rapprocher« . Certes, mais qui ira vers l’autre ? Microsoft répond avec Open XML Translator, un outil développé selon un modèle open source et distribué sous la forme d’un module additionnel téléchargeable pour Office 2007 qui fera office de pont technologique entre les formats Open XML et ODF.
Ce qui se traduit dans le langage Microsoft par : « Nous supportons le format ODF? » Le raccourci est quelque peu réducteur. En revanche, nous avons assisté à une démonstration de cet outil encore en cours de développement, développé par une société française, CleverAge, et il semble fonctionner parfaitement, reprenant sous un format au pixel près le contenu d’un fichier sous l’autre format.
On le voit, Microsoft s’efforce de jouer la carte de l’interopérabilité, mais il se heurte tant à la complexité de certaines technologies, qu’à l’opposition ouverte de certains de ses compétiteurs, ou encore à une stratégie en interne qui ne veut pas lâcher d’acquis sur lesquels quoi qu’il arrive s’il cède du terrain cela lui sera reproché. Position plutôt inconfortable…
L’interopérabilité, ce n’est pas simple, c’est coûteux et ça prend du temps, même et surtout quand on s’appelle Microsoft.