Avaya veut devenir un pur player des communications d'entreprise
Publié par Christophe Lagane le | Mis à jour le
Chapter 11, basculement vers le software, transformation capitalistique. Silicon.fr fait le point sur la situation d'Avaya avec son vice-président et CTO Laurent Philonenko.
« Notre activité est profitable mais notre endettement est très lourd, il absorbe beaucoup de cash et limite les capacités d'action de la société dans un contexte de marché qui change. » Nous avons profité du passage à Paris de Laurent Philonenko, Senior vice-président d'Avaya en tant que CTO et responsable du développement et de la stratégie, ce jeudi 18 mai, pour faire un point sur la situation de l'entreprise américaine. Il était accompagné d'Erwan Salmon, directeur général d'Avaya France.
Rappelons que l'ancienne filiale de Lucent Technologies s'est placée en début d'année sous la protection du Chapitre 11 (Chapter 11) de la loi des faillites aux Etats-Unis afin de trouver une solution à une situation financière délicate en regard d'une activité toujours dynamique. « Nous faisions face à un mur avec de la dette à rembourser en octobre et n'avions pas trouvé d'accord [avec les créanciers]. Nous avons donc jugé prudent d'avoir recours au Chapter 11 », justifie le dirigeant.
Il rappelle que la dette s'élève à 6 milliards de dollars. Un endettement historique qui remonte à la sortie de la cotation (au New York Stock Exchange) de l'entreprise en octobre 2007 pour plus de 8 milliards de dollars, dont 2 milliards ont été capitalisés. La récession qui a suivi en 2008 et 2009 aux Etats-Unis et dans le monde n'a pas amélioré la situation. « Depuis, l'entreprise n'a jamais réussi à diminuer sa dette », convient Laurent Philonenko.
Une entreprise rentable
Pourtant, l'entreprise est rentable. Sur l'année fiscale 2016 (arrêtée au 30 septembre), elle a dégagé un bénéfice (Ebitda ajusté) de 940 millions de dollars contre 900 un an plus tôt et 898 en 2014. Et la marge suit passant de 20,5% en 2014 à 25,4% en 2016. « La société est l'une des plus profitables sur le secteur, assure Erwan Salmon, mais il faut augmenter la rentabilité et le chiffre d'affaires ce qui impose une période de transition et un changement de modèle économique mais aussi un changement de structure capitalistique pour régler le problème de dette. »
Concernant cette dernière, l'objectif est de recapitaliser les deux-tiers des arriérés. Les dizaines de créanciers actuels, parmi lesquels TPG, Silver Lake, Apollo Global Management, Franklin Resources, Blackstone (GSO), devraient donc monter au capital de l'entreprise à hauteur de 4 milliards de dollars. La décision du tribunal sur la pertinence du plan d'Avaya est attendue à la mi-août. L'idée étant d'installer la nouvelle structure capitalistique et un nouveau conseil d'administration pour le début de l'année fiscale 2018, le 1er octobre prochain.
La transition du modèle économique axé sur les solutions logicielles et services Cloud de communications unifiées et centre d'appel (« de relation client », préfère Laurent Philonenko), s'est récemment accélérée avec la revente de l'activité réseau à Extreme Networks en mars dernier. L'opération devrait être validée la semaine prochaine, assure le dirigeant. Une activité basée sur la vente d'équipements matériels (switches et routeurs essentiellement) qui ne comptait désormais «?que?» pour 7 à 8% du chiffre d'affaires (environ 250 millions de dollars annuels).
80% du chiffre d'affaires issu du soft et des services
« Une fois le networking vendu, plus de 80% de notre revenu proviendra du soft et des services. » Les 20% restant seront issu des postes téléphoniques et des passerelles IP. Deux activités amenées à disparaître à plus ou moins long terme. « Il y a encore un marché pour les téléphones même s'ils sont promis à une mort lente », avance Laurent Philonenko. Un avis que ne partage pas nécessairement Erwan Salmon. « Un poste téléphonique coûte aujourd'hui moins cher qu'un casque audio haut de gamme qu'il faut renouveler tous les 18 mois. » Quand aux gateway, « elles vont disparaître avec la fin du RTC ».
Avaya met donc ses forces sur l'offre logicielle. « Aujourd'hui, il faut être un pur player aux yeux des clients et partenaires », justifie Erwan Salmon. Avec une stratégie d'intégration poussée. « On a ouvert nos interfaces pour intégrer nos solutions au sein des applications métiers de nos clients », poursuit le responsable de l'unité française. « Il faut bien comprendre le métier de nos clients pour verticaliser l'innovation, complète Laurent Philonenko. C'est presque du sur-mesure, du middleware. »
Il reste néanmoins à émerger du Chapter 11 pour confirmer la nouvelle stratégie dans ce sens. Les deux hommes sont confiants sur l'issue de la transformation capitalistique d'Avaya. Qui plus est, la mise en faillite virtuelle n'aurait pas impacté les affaires. « Opérationnellement, rien n'a changé, assure le CTO. Nous offrons les mêmes technologies, nous n'avons jamais introduit autant de nouveaux produits et les clients ne voient aucune différence, même s'il y a un gros travail de communication à faire pour expliquer la situation. » De fait, selon les résultats du deuxième trimestre 2017 arrêtés au 31 mars, Avaya a signé plus de 1100 contrats depuis janvier. Conserver la confiance des clients ne pourra que soutenir la transition de l'entreprise.
Lire également
Avaya présente son plan anti-faillite
Avaya se déleste de son activité réseau à Extreme Networks
Intégration métier, Cloud, terminal, les ambitions d'Avaya France