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Larry Ellison : un faux départ et de vraies questions pour Oracle

Ellison, le dernier des fondateurs des grands noms de l'IT, s'éclipse tout en restant bien présent dans les décisions touchant au cour du réacteur : l'ingénierie. Ce départ en trompe l'oil laisse en suspens les questions essentielles sur l'avenir d'Oracle.

Publié par La rédaction le | Mis à jour le
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Larry Ellison : un faux départ et de vraies questions pour Oracle

Même si Larry Ellison reste à la tête de l'ingénierie et qu'il confie les rênes à ses deux plus fidèles lieutenants, Safra Catz (chez Oracle depuis 15 ans) et Mark Hurd (un proche qu'il a fait venir après le scandale qui lui a coûté son poste chez HP), son départ du poste de CEO d'Oracle est hautement symbolique. Ellison fait partie de la génération des fondateurs historiques, celle des Bill Gates et Steve Jobs : il a créé Oracle avec 2000 dollars en 1977.

Si son renoncement au poste de Pdg constitue donc une étape marquante de l'histoire d'Oracle, la personnalité de fondateur de l'éditeur de Redwood Shores n'incite guère les bons connaisseurs du sujet à croire à une sorte de transition organisée par Ellison, qui vient tout de même de franchir la barre des 70 ans. Dès l'annonce de la réorganisation à la tête d'Oracle, Marc Benioff, le Pdg de Salesforce - et un ancien d'Oracle - ne s'est pas fait prier pour tweeter son scepticisme (voir ci-dessous). « Il y a toujours eu et il y aura toujours un seul CEO chez Oracle », a-t-écrit, soulignant que toutes les fonctions d'ingénierie continueront à être placées sous la responsabilité directe de Larry Ellison, qui prend le titre de directeur technique après avoir laissé - pour la forme au moins - la direction de l'entreprise à ses lieutenants. Notons d'ailleurs que ces derniers conservent les attributions qui étaient déjà les leurs : à Safra Catz la production, la finance et les aspects légaux, à Mark Hurd, les ventes, le service et les départements centrés sur les secteurs d'activité.

De son côté, Mike Wilson, l'auteur de « The difference between God and Larry Ellison (God doesn't think he's Larry Ellison) » (La différence entre Dieu et Larry Ellison. Dieu ne pense pas qu'il est Larry Ellison), estime chez nos confrères de SFGate qu'on peut donner ou retirer des titres à la troisième fortune des États-Unis, cela ne changera pas « sa profonde influence » sur cette entreprise. Consultante star sur les médias sociaux dans la Silicon Valley, Jill Rowley ne dit pas autre chose. Embauchée en avril 2013 pour former les 20 000 commerciaux d'Oracle, cette dernière a été débarquée en février dernier. « La réalité, c'est que Larry est la culture d'Oracle et que la culture d'Oracle se résume à Larry », explique dans SFGate celle qui précisément a tenté de la changer. Avec le succès que l'on sait.

Qui sera le nouveau visionnaire ?

Or, précisément, c'est cette culture qu'Oracle doit remettre en question selon de nombreux observateurs, qui critiquent le manque d'innovation sortant des labos de l'éditeur. « Oracle doit toujours accélérer sa transition en passant de gros contrats on-premise signés avec les entreprises au support des services Cloud et de l'agenda des entreprises en matière de transformation numérique », écrit ainsi le cabinet Forrester. Qui identifie trois freins à cette mutation : la culture de vente de la société focalisée sur le court terme, son porte-feuille de solutions fragmenté et la volonté de redresser à tout prix l'activité matérielle issue de Sun, effort qui a absorbé trop de ressources. Pour Forrester, ce n'est pas un hasard si l'annonce de la réorganisation au sommet intervient après l'annonce de résultats trimestriels décevants (baisse de 2 % des ventes de licences, de 14 % pour le matériel, bénéfice stagnant). « Le dernier d'une série de résultats trimestriels faibles » et « la conséquence d'une focalisation de la direction d'Oracle sur les chiffres à court terme », flingue Forrester, qui qualifie Safra Catz et Mark Hurd de leaders de transition. Sous-entendu, Oracle a besoin d'une vision.

En attendant le leader providentiel, Oracle a de bonnes chances de sacrifier à ce qui reste la meilleure façon de calmer les analystes : les acquisitions. Dans USA Today, Daniel Ives, analyste chez FBR Capital Markets, explique sans grande surprise : « à notre avis, l'entreprise a besoin de fusions et acquisitions rapidement pour muscler son porte-feuille de produits et revenir à la croissance ». Les éditeurs de solutions en mode Saas, comme Splunk (6,5 Md$ de capitalisation boursière), Qlik (2,5), Tableau Software (5) ou NetSuite (6,5), apparaissent comme des cibles potentielles. Même si Oracle devra alors probablement payer le prix fort ; SAP ayant la semaine dernière racheté le spécialiste de la gestion des frais de voyages Concur pour environ 10 fois son chiffre d'affaires. Un record. Les deux éditeurs, tous deux lancés dans leur difficile transition vers le Cloud, ont d'ailleurs de fortes chances de se trouver en concurrence sur les futures opportunités. Faisant monter les prix d'autant. La dernière acquisition majeure d'Oracle a ramené dans le giron de l'entreprise Micros Systems (5,3 Md$), un intégrateur et concepteur de solutions spécialisées pour la restauration, l'hôtellerie et la distribution.

A moins qu'Oracle ne se tourne vers une opération plus massive, qu'appellent de leurs voux certains analystes : le rachat de Salesforce. Sur le papier, l'opération est envisageable : Salesforce a une capitalisation boursière de 36 Md$, contre 185 pour Oracle. Mais elle se traduirait par une dilution importante des actionnaires d'Oracle ; pas sûr que l'hypothèse enchante Larry Ellison, qui possède toujours 25 % de l'entreprise qu'il a fondée il y a plus de 35 ans.

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