Ouverture : réactions contrastées à l'annonce de Microsoft
Ce jeudi, Microsoft surprenait une nouvelle fois son monde en annonçant une nouvelle politique d'ouverture et d'interopérabilité de ses logiciels. Face aux coups de butoir de la Commission européenne, mais aussi pour s'adapter à un marché en profonde évolution, l'éditeur s'engage auprès des développeurs, des partenaires et de la concurrence autour de quatre principes:« assurer des connexions ouvertes, promouvoir la portabilité des données, renforcer le support des standards de l'industrie IT, promouvoir un engagement plus ouvert avec les clients et l'industrie, y compris les communautés open source ».30.000 pages de documentation technique devraient par ailleurs être très prochainement disponible.
Cette ouverture envers l'open source est quasiment historique. On attendait donc la réaction des associations sur cette question. Une réaction pour le moins contrastée que Silicon.fr vous livre ici sans commentaires.
L'April(qui réunit plus de 1.800 membres utilisateurs et producteurs de logiciel libre dont plus d'une soixantaine d'entreprises, une cinquantaine d'associations et deux collectivités locales) estime que cette annonce « marque un virage intéressant dans la stratégie de la société : la reconnaissance que l'interopérabilité est un besoin fondamental pour les utilisateurs de solutions informatiques ».
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« Comme le prône l'April depuis de nombreuses années, l'interopérabilité permet aux utilisateurs d'intégrer des solutions informatiques provenant de plusieurs sources, de garantir la pérennité des données et l'indépendance par rapport aux fournisseurs du logiciel » a rappelé Benoît Sibaud, président de l'April.
Mais les compliments s'arrêtent ici. « Malheureusement, cette nouvelle stratégie ne va pas au bout de la démarche et continue d'exclure le monde du Logiciel Libre de l'accès aux formats et aux protocoles utilisés dans les logiciels de Microsoft. En effet, la plupart de ces protocoles sont couverts par des brevets, et les licences de ces brevets ne pourront être obtenues qu'à des conditions dites «raisonnables et non-discriminatoires» (RAND). Ce type de licence nécessitant rémunération par copie de programme favorise les monopoles au détriment des PME et exclut de fait l'ensemble des développeurs de Logiciels Libres ».
Et de poursuivre : « Le communiqué de l'entreprise de Redmond annonce habilement qu'elle ne poursuivra pas en justice les développeurs de Logiciels Libres qui procèdent au développement et à la distribution non-commerciale de logiciels reposant sur ces protocoles, mais précise bien que toute distribution commerciale devra s'accompagner d'une acquisition de licence de brevet, contre rémunération. Or, dans le monde du Logiciel Libre, il n'y a pas de distinction entre distribution non-commerciale et distribution commerciale: les développements réalisés par des bénévoles peuvent être vendus par des entreprises, et inversement les développements menés par des entreprises peuvent ensuite être distribués de façon non-commerciale ».
« Toute entrave à la distribution, même commerciale, d'un logiciel, est contraire aux libertés fondamentales du Logiciel Libre. La rémunération de licence de brevets est incompatible avec le développement du Logiciel Libre » a précisé Thomas Petazzoni, administrateur de l'April.
Conclusion : « Pour cette raison, les documentations mises à disposition par Microsoft, bien qu'intéressantes sur le plan technique, ne pourront donc très certainement pas être utilisées par la communauté du Logiciel Libre pour améliorer l'interopérabilité avec les solutions de la firme étatsusienne ».
L'OSA (Open Solutions Alliance) est plus mesurée.« L'OSA croit que la volonté des clients prend toujours le dessus. Les clients apprécient de travailler dans un climat de transparence et d'ouverture en étroite collaboration avec les interlocuteurs qui produisent et se chargent de la maintenance de leurs produits, que ce soit une communauté de développeurs ou une entreprise. Nous pensons que des fabricants ne travaillant pas de cette façon convergeront vers ce modèle à l'avenir, donc nous accueillons favorablement l'ouverture de Microsoft vers interopérabilité. Nous constatons que ceci représente une reconnaissance tacite que l'Industrie logicielle est en train de changer et que Microsoft essaie d'évoluer et semble favoriser l'ouverture.Mais nous attendrons de voir comment cela se traduit dans les mois à venir. »,commenteDominic Sartorio, Président de l'OSA aux Etats-Unis.
Du côté de l'Afdel, qui réunit les éditeurs 'classiques' de logiciels, l'initiative de Microsoft est au contraire saluée en bonne et due forme.
« C'est une excellente nouvelle pour les industriels ! Cette volonté d'ouverture s'inscrit en phase avec les attentes du marché et des utilisateurs. Elle confirme l'évolution déjà amorcée par Microsoft, notamment à travers la normalisation d'Openxml dont les industriels attendent qu'elle aboutisse rapidement »,commente Loïc Rivière, Délégué général de l'Afdel . « L'interopérabilité est en effet un enjeu crucial du secteur. Tous les industriels vont pouvoir travailler dans l'environnement Microsoft avec d'avantage de visibilité et de prédictibilité. Microsoft sera désormais l'un des environnements les plus ouverts et accessible à tous sur un pied d'égalité ». « C'est donc une initiative très positive et même audacieuse de la part de Microsoft, dont nous espérons qu'elle fera des émules. Car il faut désormais espérer que les autres acteurs « structurants » du marché suivent la même voie..«
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