Silicon : En Europe, les initiatives se multiplient en matière d’open data. Pensez-vous que le vieux continent puisse jouer un rôle de premier plan dans l’émergence de ce nouveau web ?
Tim Berners-Lee : L’Europe est encore un peu en retard sur les États-Unis, mais il existe de nombreuses initiatives intéressantes, notamment en Allemagne. De plus en plus de pays européens proposent des données ouvertes, par exemple sur l’état des routes. Mais si je prévois de voyager à travers l’Europe, j’ai besoin d’interconnecter toutes ces données. Une base de données unifiée de tous les pays européens est vraiment cruciale et offrira une valeur ajoutée à l’ensemble de l’économie européenne.
Silicon : Les pouvoirs publics s’investissent dans l’open data, mais pensez-vous que les entreprises soient prêtes à publier et à partager leurs données ?
Tim Berners-Lee : Non, mais cette problématique existait déjà aux débuts du web, où beaucoup d’entreprises se demandaient quel était l’intérêt de publier des documents sur internet. Les pionniers ont vite compris que cette ouverture constituait un avantage compétitif sur leurs concurrents et le mouvement s’est accéléré. Avec le web de données, la tendance est similaire. La concurrence va pousser les gouvernements – mais aussi les entreprises – à plus d’ouverture et de transparence.
Silicon : Mais les directeurs informatiques seront difficiles à convaincre…
Tim Berners-Lee : Le désir de contrôler les données est naturel et humain ! (rires). Dans mes conversations avec les DSI, je remarque qu’ils ont une relation particulière avec les données stockées dans leur entreprise. On pourrait presque parler d’obsession du contrôle. Ils défendent leur base de données comme un bien précieux, mais ils devront faire évoluer leur point de vue sur la question.
Silicon : Au de l’ouverture, comment gérer la question de l’interopérabilité de toutes ces données ?
Tim Berners-Lee : C’est effectivement un problème majeur et toutes les organisations engagées dans l’open data doivent progressivement adopter des formats et des normes communes. C’est tout l’enjeu du “Linked data” qui permettra de concevoir une nouvelle génération de services web, capables de répondre à des questions complexes.
Silicon : Cette diffusion de données publiques ou privées ne risque t’elle pas de se faire aux dépens de la vie privée ?
Tim Berners-Lee : La plupart de ces données sont des données personnelles, en effet. Par conséquent, ces organismes doivent rendre ces données anonymes, pour ne pas menacer les libertés individuelles. Si nous pouvons résoudre ce problème et que l’open data simplifie le quotidien des citoyens, je suis persuadé qu’ils soutiendront ces initiatives.
Silicon : Mais quel organisme peut sérieusement s’engager sur la protection de ces données ?
Tim Berners-Lee : Il faudra nécessairement des organismes indépendants, disposant de moyens d’action significatifs, pour veiller à la protection des données individuelles. Ces données sont comme de la dynamite et pourraient véritablement exploser si elles tombent entre de mauvaises mains.
Silicon : Tim Berners-Lee, je vous remercie.
Entretien réalisé par Sybille Gassner pour Silicon.de / Traduction réalisée par Jérôme Bouteiller.
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