Bill Gates: 'Google est un concurrent comme les autres'
Difficile de dresser un tableau pessimiste de Microsoft. Le premier éditeur mondial de logiciels va bien, ses finances sont au beau fixe, sa trésorerie est colossale et sa domination dans de nombreux domaines est impériale.
Pour autant, la croissance insolente d'acteurs comme Google, qui multiplient les nouveaux services, les diversifications et les projets inquiètent certains observateurs. Le géant du Net, très agile et réactif, pourrait-il un jour (car il y a de la marge) venir tailler des croupières à la firme de Redmond ? Chez Microsoft, si Google agace, énerve même, on essaye de rester sereins et on souligne les énormes capacités d'innovation du groupe face à Google qui, certes grossit, mais dont la taille est encore très inférieure à celle de Microsoft. Dans un entretien accordé au Figaro Economie, Bill Gates souligne ainsi que Google est un concurrent important, mais un concurrent comme les autres. L'homme le plus riche du monde minimise la menace et aime préciser que le géant du Net n'existait pas il y a cinq ans. « En trente ans, on nous a prêté pas mal de challengers ! IBM a toujours été là, parfois de manière plus intense. Il y a cinq ans, Yahoo était très petit et Google n'existait pas. A l'époque, vous auriez peut-être dit que Netscape risquait de tuer Microsoft ou Sun Microsystems. Rappelez-vous l'époque où Larry Allison ou Scott McNealy parlaient d'ordinateur en réseau et de la fin du PC. Aujourd'hui, plus personne n'en parle. Je ne dis pas que Yahoo et Google vont disparaître. C'est peut-être Microsoft qui va disparaître. Mais le marché demande des innovations. Nous avons parié sur XML, sur les services Web, sur les nouvelles versions de Windows, sur la XBox, sur MSN. Nous sommes heureux d'avoir fait ces paris ». Une sérénité qui tranche avec la crise de nerfs de Steve Ballmer, dg de Microsoft qui confiait il y à peu à un de ses collaborateurs; « Je veux tuer Google! ». Pour Bill Gates, ce sont bien les capacités d'innovation qui font la différence. Et Microsoft, avec ses 38 milliards de dollars de trésorerie a de la marge face à un Google qui ne dispose « que » de 7 milliards. « Leur philosophie est différente de la nôtre. Leur but est d'organiser l'information dans le monde. Nous pensons que nous ne pouvons pas faire cela. Notre but est de créer des outils qui permettront à d'autres ? éditeurs, entreprises de presse, chercheurs. ? d'organiser l'information. Chez Microsoft, nous avons connu l'époque où nous étions l'endroit à la mode, au milieu des années 1980. C'est le tour de Google : leur Coca-Cola est meilleur que le nôtre, leurs vacances aussi. Ce n'est pas souvent que Microsoft est ainsi sous-estimé.Google est notre principal concurrent sur Internet, mais nous en avons beaucoup d'autres comme Sony dans les jeux vidéo, Nokia dans le téléphone, etc. L'un de nos atouts est de pouvoir intégrer nos innovations dans ces différents domaines au service de l'utilisateur. Un de nos grands objectifs est de faire mieux que Google dans la recherche sur Internet. » Pour autant, l'agilité et la réactivité de Google peuvent faire mal. Mais pour Microsoft, agilité ne rime pas avec innover: « Il n'y a pas de mystère. Les plus grandes innovations viennent d'entreprises qui ont investi pendant plus de dix ans. Cela réclame des années d'efforts. Les start-up n'en sont pas capables. » Au-delà de la guéguerre avec Google, Bill Gates réaffirme un credo cher à Microsoft: se battre sur tous les fronts, être présents dans tous les domaines. Et en profite pour commenter les tendances du marché: Un monde numérique « La numérisation gagne partout du terrain. Prenez la télévision : de média de diffusion par voie hertzienne, elle se transforme en un média numérique pas seulement hertzien capable d'offrir un contenu de plus en plus personnalisé. Dans cinq ans, beaucoup d'écoles et d'étudiants seront équipés de tablet PC et on peut par exemple penser, même si c'est un peu ambitieux, que les manuels traditionnels n'existeront plus. » La téléphonie sur IP « Les géants du téléphone comme France Télécom savent que la voix seule n'est plus un métier d'avenir et qu'ils doivent mettre l'accent sur le haut débit. Aux Etats-Unis, les deux grands groupes de téléphone, SBC et Verizon, sont extrêmement agressifs sur la télévision sur Internet. Les sociétés de télévision par câble, leurs concurrents, qui ne faisaient que de la télévision, font aujourd'hui de la voix et des données. Les compagnies de téléphone, qui ne faisaient que de la voix, veulent faire de la vidéo et des données. La concurrence est intense. » Le rachat de Skype par eBay « C'est le monde fou de l'Internet ! Quand quelque chose de nouveau apparaît, tout le monde se demande si cela ne va pas devenir demain le coeur du marché. Et si c'est le cas, c'est un bon investissement. A la fin des années 90, sur 200 sociétés Internet, 199 ont fait faillite. Seules quelques-unes comme eBay, Amazon, Google, Yahoo ont survécu et sont devenus de bonnes affaires. Tout le monde se demande qui sera le prochain eBay. ».
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