Marc Rouanne (Nokia Siemens): «Le réseau redevient un atout»
Publié par Christophe Lagane le | Mis à jour le
Optimiser les applications mobiles, mieux gérer la répartition du trafic ou encore adopter les nouvelles stations de base en technologie radio logicielle sont quelques-unes des recettes avancées par l'équipementier pour éviter la congestion des réseaux mobiles.
Mobinaute toujours plus nombreux (rien qu'en France, leur nombre a doublé en un an ), accélération de l'adoption des smartphones (+48% en France sur un an), démocratisation des clés 3G, démarrage des tablettes, forfaits Internet mobile illimité qui explosent. En 2015, environ 23 hexaoctects de données seront quotidiennement échangées sur les réseaux mobiles. « Cela reviendra à l'équivalent de plus de 6 milliards de personnes qui téléchargent chaque jour un livre électronique », illustre Marc Rouanne, head of network system chez Nokia Siemens Network (NSN).
Une explosion de trafic qui, si elle n'est pas bien gérée, risque de fragiliser le réseau et, donc, l'offre de services mobiles. Comment les industriels entendent-ils appréhender ce phénomène? Essentiellement par l'innovation technologique qui permettra une gestion plus fine des ressources hertziennes. C'est du moins la stratégie de NSN qui a partagé sa vision des réseaux «intelligents» à l'occasion d'un point presse.
« On arrive à la limite de la capacité du canal, il faut donc partager en valorisant sa ressource, affirme Marc Rouanne. Le réseau redevient un atout pour quelques temps. » Un atout qu'il faut valoriser à travers l'écosystème. Cela passe en premier lieu par la qualité des applications mobiles et des smartphones qu'il convient d'optimiser pour en limiter l'impact sur le réseau (en permanence sollicité par des requêtes de synchronisation/mise à jour des données). NSN propose ainsi la fonction Cell PCH qui réduit le nombre de signaux nécessaires (de 30 à 4) pour «réveiller» le smartphone. Ce qui économise la batterie du terminal tout en libérant de la capacité réseau.
L'écosystème passe par les Smart Labs
A titre d'exemple d'application optimisée, Marc Rouanne en profite pour mettre en avant la solution de cartes préinstallées du logiciel Ovi Maps de Nokia face au chargement dynamique de Google Maps qui, selon le dirigeant, impacterait le réseau jusqu'à un facteur de 10. De son côté, Google prétend que l'impact reste limité à quelques kilo-octet de données grâce à sa technologie optimisée (notamment l'usage du format vectoriel).
L'équipementier invite également ses partenaires éditeurs et constructeurs de smartphones à venir tester leurs développements au sein de deux «Smart Labs» ouverts en mars dernier en Finlande (Espoo) et en juin au Texas (Dallas) afin de renforcer l'interopérabilité des solutions avec le réseau. L'idée étant que tout les acteurs y trouvent leur compte afin de faire croitre l'ensemble du marché.
Les efforts se portent aussi sur les progrès du réseau. Avec l'amélioration des performances des composants, les couches basses et la signalisation sont elles aussi optimisées. Mais la répartition des usages participe à l'optimisation du réseau. « Il y a un travail de lissage de la charge. Pourquoi ne pas déclencher les M2M [envois de données automatisées, ndlr] hors des pics de trafic? » Bref, renforcer l'«intelligence» des réseaux par une gestion plus fine du trafic.
3 euros les 5 Go
Et préparer le terrain du LTE (4G) appelé à démarrer à la fin de l'année aux Etats-Unis (en France les licences seront attribuées en. 2011). Rappelons que le LTE offrira des débits dépassant les 100 Mbit/s contre, au mieux 42 Mbit/s (voire 84 Mbit/s ) théoriques (7 Mbit/s dans les faits en France) et des temps de latence de 20 ms. Des capacités qui ouvriront la voix à de nouveaux usages et, donc, de nouveaux marchés. Dans ce cadre, Marc Rouanne est convaincu que l'offre se dirige « vers le partage dynamique en fonction des classes de service [gestion des paquets, abonnements, facturation de la qualité de service, volume.] ». Autrement dit, la mise en oeuvre des offres premium est inévitable même si, Net neutralité oblige, les évolutions réglementaires ne sont pas à l'ordre du jour.
NSN prépare le terrain en avançant que, pour 3 euros par mois par utilisateur, il est en mesure de fournir jusqu'à 5 Go de données mobiles aux abonnés. Aux opérateurs, évidemment, de répartir cette surfacturation dans leurs offres (ou de l'absorber à travers les coûts opérationnels). L'approche de l'équipementier tend à relativiser grandement la vision de surinvestissement souvent avancée par les opérateurs.
Pour parvenir à soutenir la charge financière, NSN rappelle l'évolution du tout IP qui favorise l'émergence de nouvelles architectures (et les économies qui les accompagnent). L'industriel finlandais met surtout en avant sa nouvelle génération d'équipements : les bases Flexi et leur technologie Single Ran, une solution radio logicielle capable de gérer toute la largeur du spectre (GSM, 2G, 3G et 4G) depuis la même station physique. Ce qui permet de lisser les coûts d'exploitation sur l'ensemble des réseaux. « Il y a danger quand les coûts d'exploitation sont différenciés selon les réseaux », soutient Marc Rouanne. D'où l'avantage économique de ces réseaux autoconfigurables.
Une stratégie adoptée par Free Mobile qui a fait le choix d'équiper son futur réseau en bases Flexi. Un client parmi les 150 opérateurs qui s'équipent chez NSN et pourront mettre à jour quelques 100 000 sites compatibles dans le monde.