Didier Lombard : "Si l'exclusivité disparaît, c'est un modèle qui explose"
Face aux assauts de la concurrence, France Télécom plie mais ne rompt pas. Il faut dire que l'opérateur historique français (qui sera définitivement baptisé Orange en 2012) traverse actuellement une tempête juridique et y laisse des plumes. Suite à des plaintes de ses concurrents, le groupe a perdu coup sur coup l'exclusivité de la distribution de l'iPhone en France et n'a plus le droit de réserver à ses seuls clients certains contenus exclusifs acquis à prix d'or. Dans un entretien accordé aux Echos, Didier Lombard, le président de l'opérateur revient sur cette actualité et sur les perspectives du groupe.
-La justice se trompe
Pour Didier Lombard, les récentes condamnations de France Télécom ne prennent pas en compte la réalité du marché. « Regardez la décision du tribunal de commerce sur Orange Sport, elle ne se prononce pas sur la question de l'exclusivité, dont a été saisie l'Autorité de la concurrence. Mais elle revient à interdire, à nous comme à nos concurrents, la vente du « multiple play ». Or aujourd'hui le marché, c'est le « multiple play », avec l'Internet, le PC, la télévision, les contenus et les services ».
-L'exclusivité : clé de voûte de la stratégie d'Orange.
L'opérateur s'est lancé dans une stratégie de contenus exclusifs dans le sport (football) et dans le cinéma. Une politique pertinente : pour compenser le recul des activités fixes, un opérateur historique comme France Télécom se doit d'investir dans les contenus. Mais cette stratégie est remise en cause par la justice. Et si les récentes décisions sont maintenues, l'opérateur estime que c'est toute la chaîne de valeur qui est remise en cause.
« Si l'exclusivité disparaissait, c'est un modèle qui explose, pour les créateurs de contenus, du football et du cinéma que nous contribuons à financer mais aussi pour nos concurrents.Car, à partir du moment où une décision s'applique, elle s'applique à tout le monde. Au-delà de la polémique, l'exclusivité est un élément clef pour rentabiliser l'investissement dans l'innovation. Ce carburant de l'innovation est indispensable ».
-. mais pas la seule
France Télécom ne met néanmoins pas ses oeufs dans le même panier. Outre les contenus, le groupe est dominant dans le haut débit mobile et compte aussi développer d'autres marchés afin de préserver sa capacité d'investissement. « Les contenus ne sont pas notre seule activité de croissance. L'audience et l'e-santé, par exemple, qui permet de faire un check-up chez soi et d'envoyer les données à l'hôpital ou d'autres services de ce type, devraient représenter une part substantielle de nos ventes à l'horizon 2012 ».
iPhone : vendre le terminal ne suffit pas
La concurrence a désormais le droit de ventre le terminal d'Apple. Didier Lombard ne remet pas en cause cette décision mais estime que SFR et BouyguesTel devront investir. « Ce n'est pas si simple de vendre un téléphone de ce type. Il faut développer des services, mettre à jour les serveurs et les plate-formes techniques. S'ils ne le faisaient pas, les autres opérateurs vendraient une simple brique en plastique ».
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Position dominante : Vivendi se trompe
La maison mère de SFR et de Neuf a porté plainte auprès de la Commission européenne, accusant France Télécom d'abus de position dominante et de surfacturation des lignes dégroupées. Un faux procès pour Didier Lombard. « Dans le coût du réseau, ils oublient le coût de la maintenance et bien d'autres choses. Nous employons 37.000 personnes en France pour faire ce travail. Je veux bien louer le réseau sans maintenance, mais ça risque d'être compliqué pour les autres de l'utiliser ! Et je constate que ces prix de gros régulés n'empêchent pas nos concurrents de dégager de fortes marges, tant s'en faut ! »
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