Sagemcom se lance dans les objets connectés sous LoraWAN
Publié par Christophe Lagane le | Mis à jour le
Modules radio, concentrateurs des données, solutions serveur. Sagemcom va proposer une offre de bout-en-bout pour opérer l'Internet des objets en direction des opérateurs comme des fournisseurs d'énergie et des industriels.
On n'attendait pas nécessairement Sagemcom dans l'Internet des objets (IoT). Et pourtant. « On est venu à l'IoT par le comptage intelligent », explique Patrick Sévian, PDG du fournisseur mondial de box ADSL, câble, décodeurs TV et de compteurs d'énergie. Sagemcom a notamment été retenu dans les appels d'offre pour la fourniture des compteurs électroniques Linky (électricité) et Gazpar (Gaz) notamment. Signalons au passage que l'industriel inaugurera prochainement à Dinan une usine de production, entièrement automatisée, de ces compteurs. Une centaine de personnes y travailleront.
Le choix du standard
Mais revenons à l'IoT. Car pour assurer le service de relève à distance de ces compteurs, il faut bien s'appuyer sur une technologie de communication. Si la remontée des informations de consommation des compteurs électriques s'appuie sur le courant porteur en ligne (CPL) du réseau électrique, ce n'est pas possible pour les compteurs de gaz et d'eau (et même des boîtiers électriques situés au-delà de 5 ou 6 km du centre de réception des données). D'où l'intérêt que Sagemcom a porté, il y a trois ans, aux solutions dédiées aux objets connectés sans fil pour adresser un marché de centaines de millions d'unités en Europe (pas moins de 30 millions en France pour chaque énergie).
En la matière, le choix de l'entreprise française s'est arrêté sur le protocole LoRaWAN. Un choix aussi bien technologique que stratégique. « Nous déployons des produits personnalisés à base de technologies standards », insiste Patrick Sevian. Si la standardisation du protocole à la base développé par Semtech n'est pas encore à l'ordre du jour auprès des instances de normalisation, la technologie LoraWan s'appuie sur les connexions IP, standard elles, pour opérer sur des réseaux libres de licences. Surtout, le protocole est désormais animé par la Lora Alliance qui réunit une soixantaine de membres aujourd'hui dont Bouygues Telecom en France, KPN aux Pays-Bas, Swisscom, Singtel en Asie. Il se murmure d'ailleurs qu'Orange et Numericable-SFR pourraient rejoindre l'alliance à l'occasion de l'Assemblée générale de l'organisation qui se tiendra les 9 et 10 juillet prochains à Paris. Et comme pour afficher sa volonté de créer un véritable écosystème autour de Lora, l'alliance vient d'annoncer l'accès public aux spécifications de la version R1.0 du protocole (disponibles à partir de ce formulaire).
Des coûts d'exploitation inférieurs au cellulaire
Côté technique, Sagemcom, également membre fondateur de l'alliance, met en avant les qualités du LoraWan. A savoir une communication bidirectionnelle, aux débits variables entre 300 bit/s à 50 Kbit/s, l'agrégation de liens sur la bande de fréquences libres ISM, et la capacité de localisation des objets par triangulation des stations de base (ce qui évite d'installer une puce GPS gourmande en énergie sachant que les composants visent des autonomie sur batterie de l'ordre de la décennie). « LoraWan apporte une souplesse dans la gestion du spectre radio, donc de la consommation de la batterie, explique Thierry Lestable, responsable Technologie et Innovation chez Sagemcom. Cela permet des coûts d'exploitation bien inférieurs à ceux d'une offre cellulaire type M2M. » Et une bonne manière de se distinguer du champion médiatique du moment Sigfox à la technologie pourtant plus limitée (100 bit/s de bande passante, voie de retour développée après coup, pas de géolocalisation native.). Ce qui ne l'empêche pas de recevoir le soutien appuyé de Samsung. « Sigfox a créé le marché », reconnaît Patrick Sévian.
Fort du protocole LoraWAN, Sagemcom se lance donc dans le développement de produits pour proposer une offre de bout en bout. A savoir les modules radio pour terminaux communicants (dont le coût varie entre 5 et 20 dollars selon le nombre de capteurs intégrés), les émetteurs récepteurs sous forme de passerelles et autres gateway d'intérieur comme d'extérieur pour la réception/émission des données, ainsi que les solutions coeurs de réseau de serveur de gestion radio et les logiciels de redistribution des données aux fournisseurs de services (Cloud). Le constructeur projette même d'intégrer des antennes Lora (femtoLora) dans les boîtiers xDSL/FTTH, ce qui permettra de densifier le réseau dédié aux objets communicants en basse consommation et ouvre la convergence des compteurs et des box résidentielles.
La France couverte en Lora en 2016
Un réseau qui se construira par les opérateurs, qu'ils soient propriétaires comme Sigfox qui adresse des marchés verticaux, ou de manière horizontale via les opérateurs cellulaires. Précurseur en la matière, Bouygues Telecom avait annoncé vouloir couvrir 500 villes de son réseau Lora avant la fin de l'année. Selon Patrick Sévian, pour les opérateurs, qui pourront s'appuyer sur leurs infrastructure mobile, le coût de déploiement d'un réseau Lora « est bien inférieur à 20 millions d'euros ». Une peccadille en regard des centaines de millions à investir dans un réseau comme la 4G. Selon le dirigeant de Sagemcom, qui lancera la commercialisation de ses équipements à partir d'octobre 2015, la France sera couverte en Lora d'ici la mi-2016. Une aubaine pour les fournisseurs d'énergie qui pourront alors opérer rapidement des services de télérelève et pour les opérateurs qui s'empresseront de mettre leurs réseaux au service de ces nouveaux services.
Et pour Sagemcom qui vendra d'un côté des compteurs communicants aux distributeurs d'énergie et toute une infrastructure réseaux aux opérateurs qui pourront alors développer leurs propres services. Sans oublier un nombre incalculables d'autres secteurs. A commencer par exemple par La Poste. Il se murmure que le distributeur de courrier pourrait lancer un service de lettre recommandée à base de puces Lora afin que l'expéditeur suive son acheminement précis en temps réel. Patrick Sévian est également convaincu de l'intérêt que la logistique portera à l'IoT, notamment dans la gestion des palettes. Dans tous les cas, les objets connectés représentent un fort potentiel de croissance pour Sagemcom. La société mise sur un chiffre d'affaires de 100 millions d'euros dans le secteur de l'IoT pour 2018. Un bon début pour l'entreprise qui a produit 22 millions de terminaux en 2014 pour un chiffre d'affaires de 1,3 milliard d'euros.
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