L'Hadopi 2 entre au Journal Officiel
Publié par Christophe Lagane le | Mis à jour le
La loi qui vise à lutter contre l'échange illégal de contenus en ligne entre en vigueur. Ne manque plus que les décrets d'application pour définir précisément son fonctionnement.
L'entrée en vigueur de la loi relative à la protection pénale de la propriété littéraire et artistique sur internet (dite « Hadopi 2 » ou encore « Création et Internet ») n'a pas traîné. Une semaine après sa validation dans sa quasi intégralité par le Conseil constitutionnel, le texte de la loi vient d'être publié dans l'édition du 28 octobre du Journal Officiel.
Rappelons que la loi instaure la Haute autorité pour la diffusion des oeuvres et la protection des droits sur l'Internet qui sera chargée de la surveillance, par l'intermédiaire de prestataires privés mandatés, des internautes qui s'échangent en ligne sans autorisation des contenus protégés par le droit d'auteur. Musiques et films sont essentiellement concernés mais le développement des livres électroniques pourrait également venir à l'ordre du jour. Les réseaux d'échange de type P2P (peer-to-peer) sont principalement visés. L'Hadopi remplacera l'inutile Autorité de régulation des mesures techniques instaurée en 2007 suite au vote de la toute aussi désuète Dadvsi votée en 2006.
Après courrier d'avertissement, l'internaute pris en défaut (où plus exactement le titulaire de la ligne) verra son accès Internet coupé pour une durée d'un mois à un an. Avec interdiction de se réabonner à un autre service d'accès. Le non respect de cette interdiction sera sanctionné d'une amende pouvant aller jusqu'à 3750 euros. En revanche, les services de téléphonie et de télévision transitant par la même ligne téléphonique devront continuer à être fournis. Ce qui ne va pas faciliter le travail des opérateurs auquel l'internaute concerné devra continuer de payer son abonnement mensuel.
Les opposants à la loi ne manquent pas de mettre en avant l'inapplicabilité du projet et les risques d'erreurs (via le piratage des lignes ou l'usurpation des adresses IP sur lesquelles se baseront les prestataires chargés de surveiller les réseaux) qui pourraient en découler. Dans ce cadre, signalons l'ouvrage La bataille Hadopi écrit par un collectif d'une quarantaine d'experts et de personnalités (dont Jacques Attali, Patrick Bloche, Jérôme Bourreau-Guggenheim, Daniel CohnBendit, Benoit Sibaud, Richard M. Stallman.) qui entend dénoncer un « arsenal de répression couteux qui ne rapportera pas un centime supplémentaire aux créateurs et plongera l'internaute dans une insécurité juridique totale ».
D'autres insistent sur l'aspect obsolète de l'Hadopi. Les internautes n'ayant pas attendus l'instauration de la loi pour chercher d'autres moyens plus discrets que les réseaux P2P pour continuer à échanger ou consommer des contenus. Que ce soit par des services de streaming(diffusion des contenus à la volée tels que Megavidéo) ou de partage privés (soit par des réseaux chiffrés VPN payants ou des réseaux anonymes de confiance type Freenet et ses dérivés) ou encore l'usage de proxy qui cachent l'adresse IP de l'utilisateur (TOR.).
Il restera donc à vérifier l'efficacité de l'aspect pédagogique (ou de la peur du gendarme) d'Hadopi qui incite au développement d'offres légales simples à utiliser. Offres pourtant actuellement mises en oeuvre par les fournisseurs d'accès à travers leurs services de vidéos à la demande ou de forfaits de musique.
En attendant, il reste à publier les décrets d'application. Ceux-là doivent préciser le point concernant « la négligence caractérisée » induite par la loi et qui marque l'absence de sécurisation de l'usage du Net (notamment via l'installation d'un système de contrôle parental pour maîtriser la navigation des plus jeunes). La question de la défense des contrevenants sera également à préciser. La procédure accélérée proposée dans la première version de la loi (retoquée par le Conseil constitutionnel) devra faire place à une enquête approfondie. Quant à la Haute autorité, elle devrait être créée en novembre. Les première lettres d'avertissement sont attendues début 2010.