La Russie prête à fragiliser le chiffrement de messageries ?
L'initiative n'est pas sans rappeler celle de parlementaires et du FBI aux États-Unis. Une disposition d'une proposition de loi déposée à la Douma, la chambre basse du Parlement de Russie, prévoit d'obliger les services et applications de messagerie à fournir aux autorités russes les moyens de contourner le chiffrement des messages échangés dans le pays, et ce au nom de l'antiterrorisme. Les applications comme WhatsApp (Facebook), Viber et Telegram (des frères Durov) sont ciblées.
Le texte, qui a déjà obtenu l'aval de la commission sécurité de la Douma, prévoit d'infliger jusqu'à un million de roubles d'amende (soit 15 500 dollars environ) à l'entreprise qui refuserait d'obtempérer. Pas de quoi effrayer les éditeurs de solutions de messagerie. Pour un citoyen, en revanche, le refus de fournir une clé de chiffrement serait passible d'une amende de 3000 roubles (46 dollars), et passerait à 5000 roubles (77 dollars) pour un fonctionnaire. (Selon une analyse de la Sberbank, le salaire moyen russe est passé de 1058 dollars par mois en 2012 à 433 dollars par mois en 2016.).
La député Elena Mizoulina, rompue aux interventions tranchées sur la famille, s'inquiète que les messageries soient notamment utilisées pour « laver le cerveau » d'adolescents prêts à en découdre avec les forces de l'ordre, et ce en toute impunité. Elle voudrait relancer l'idée d'un « filtrage préalable » des messages pour prévenir le passage à l'acte. Mais cette idée se heurte au chiffrement de bout en bout, comme l'a rappelé Nikolai Nikiforov, ministre russe des communications.
La Russie sait, par ailleurs, que fragiliser le chiffrement peut aussi servir les desseins d'organisations criminelles et de gouvernements étrangers.
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