"Best of breed" et "vendor lock-in" : 4 regards croisés sur l'approche multicloud
Jean-Pierre Chamarande (Skale-5), Stéphane Aisenberg (Linkbynet), Jérôme Dilouya (InterCloude) et Stéphane Estevez (Splunk) analysent les enjeux d'une stratégie multicloud entre le choix d'une approche « best of breed » et le risque de « vendor lock-in.
Jean-Pierre Chamarande - directeur général de Skale-5 : » Vouloir être agnostique vis-à-vis des fournisseurs cloud est une hérésie »
« L'indépendance à tout prix vis-à-vis des fournisseurs cloud ne doit pas être le but recherché, car c'est se priver de beaucoup d'innovation qu'ils apportent. Dans le multicloud, plutôt que chercher à développer des applications à cheval sur plusieurs cloud (ce qu'il ne faut surtout pas chercher à faire), l'important est de répartir les applications entre les différents cloud. Aujourd'hui, les seuls critères de choix entre les grands cloud providers sont les connaissances et les compétences de l'entreprise sur le fournisseur, la présence d'applications Windows et de son écosystème et, enfin, les prix et services négociés. Ce sont finalement les trois seuls critères valables pour choisir un cloud aujourd'hui. Choisir deux cloud providers est sain pour une grande entreprise qui pourra répartir ses ressources auprès de différents fournisseurs, sachant que vouloir déployer une même application sur plusieurs cloud reste une mauvaise idée à la base. »
Stéphane Aisenberg - cofondateur de Linkbynet : » On peut accepter un certain niveau de lock-in »
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« Passer d'un cloud à un autre n'est jamais simple, car une workload n'est jamais exclusivement du compute ou du stockage. Les applications mettent en ouvre de multiples services Paas.
Les entreprises qui choisissent une plateforme cloud lui sont fidèles en général. En revanche, elles choisissent le plus souvent de répartir leurs IT sur plusieurs cloud pour tirer le meilleur de chacun. Elles vont placer leur IoT chez Azure, leur big data chez Google Cloud, et utiliser AWS pour développer leurs nouvelles applications.
Les DSI font de plus en plus du picking de solutions chez les différents CSP et, si le lock-in est un piège, c'est vrai, c'est aussi le moyen d'utiliser la R&D de ces grands CSP afin d'accélérer le time to market des applications.
Cette approche leur permet d'entrer dans une logique d'accélération et de performance pour leur propre transformation et, en cela, c'est une approche qui peut être très positive pour une entreprise. Tout n'est pas tout blanc ou tout noir, on peut accepter un certain niveau de lock-in si les gains attendus sont supérieurs aux inconvénients que cela engendre. »
Jérôme Dilouya - CEO InterCloud : » On ne consomme plus les réseaux comme dans les années 80 «
« L'époque où il fallait appeler un opérateur et remplir un formulaire pour activer le moindre nouveau circuit réseau auprès de son opérateur est achevée. Cette approche est désormais incompatible avec la façon de produire les applications d'aujourd'hui. Avec les approches DevOps et CloudOps, on peut provisionner 1 000 machines chez un Cloud provider en 1 seconde, il n'est plus possible d'avoir à envoyer un formulaire et attendre plusieurs semaines pour activer le réseau. L'infrastructure doit elle aussi pouvoir être activée en une ligne de code, le réseau doit être aussi programmable que ne l'est un PaaS. Alors que le SD-WAN vient se placer au-dessus du réseau, en tant qu'underlay, nous avons pour vocation de le rendre programmable : pour connecter des applications hébergées dans 50 datacenters Cloud différent, nous le faisons en 50 lignes de code et le réseau est opérationnel en quelques minutes. »
Stéphane Estevez - directeur produit chez Splunk : « La France est un pays où les entreprises restent encore très orientées cloud hybride »
» Les grandes entreprises ont encore beaucoup de ressources on-premise dans leur système d'information et ont créé, en parallèle, des entités digitales pour porter de nouveaux projets sur le cloud. Elles ont donc quasiment toutes une approche hybride et ont fréquemment un à deux CSP. Il est plus rare de voir des clients français qui s'appuient sur trois ou quatre fournisseurs cloud, alors que c'est quelque chose de courant aux États-Unis.
C'est pour toutes ces raisons que les entreprises ont de plus en plus besoin de simplifier leur outillage, car entre les chaînes d'intégration continue et le volet administration de ces infrastructures, ce sont des dizaines d'outils différents que l'entreprise doit maîtriser. »
Propos recueillis par Alain Clapaud
Approfondir le sujet avec notre dossier : Multicloud : comment développer la bonne approche « best of breed »
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