BI : photographie d’un marché passé au langage naturel

Magic Quadrant BI 2024

Quels sont les principaux fournisseurs sur le marché de la BI et sur quels aspects se distinguent-ils ? Coup d’œil sous l’angle du Magic Quadrant.

Du glisser-déplacer au langage naturel, un grand saut pour la BI ? Un « grand changement », en tout cas, pour reprendre les termes de Gartner.

Le cabinet américain évoque cette évolution dans son dernier Magic Quadrant consacré à ce segment de marché. Il n’en fait pas pour autant la toile de fond, s’attardant presque plus sur le cas Microsoft.

Celui-ci garde, dans la projection de Gartner, une nette longueur d’avance sur ses concurrents. Si la croissance de Power BI se poursuit, elle doit beaucoup à son inclusion dans la suite Microsoft 365 E5, « à un prix très réduit ». Les jonctions avec Teams pèsent aussi dans la balance.

Vingt fournisseurs, six « leaders »

L’an dernier, deux autres fournisseurs étaient dans le carré des « leaders » : Salesforce (avec Tableau) et Qlik. Ils y sont toujours, mais voisinent désormais avec Google, Oracle et ThoughtSpot. Pour le premier, c’est la conséquence d’une progression sur l’axe « vision ». Pour les deux autres, sur l’axe « exécution ».

L’axe « vision » est centré sur les stratégies (sectorielle, géographique, commerciale, marketing, produit…). Les fournisseurs classés s’y positionnent comme suit :

  Fournisseur Évolution annuelle
1 Microsoft =
2 Pyramid Analytics + 10
3 Salesforce (Tableau) + 1
4 ThoughtSpot – 1
5 SAP =
6 Oracle – 4
7 Google + 7
8 IBM =
9 Spotfire (TIBCO) + 1
10 SAS – 3
11 Qlik – 5
12 Tellius – 1
13 AWS + 4
14 Domo – 1
15 MicroStrategy + 3
16 Sisense – 7
17 Alibaba Cloud + 2
18 Zoho – 3
19 GoodData – 3
20 Incorta =

 

L’axe « exécution » reflète la capacité à répondre efficacement à la demande (expérience client, performance avant-vente, qualité des produits/services…). Les fournisseurs s’y positionnent ainsi :

  Fournisseur Évolution annuelle
1 Microsoft =
2 AWS + 4
3 Salesforce – 1
4 Qlik + 4
5 Google – 2
6 Oracle + 6
7 Domo – 2
8 Alibaba Cloud – 4
9 MicroStrategy – 2
10 ThoughtSpot =
11 SAP – 2
12 Pyramid Analytics + 1
13 Incorta + 6
14 IBM + 3
15 Zoho =
16 Spotfire (TIBCO) – 5
17 SAS + 1
18 Sisense – 4
19 GoodData + 1
20 Tellius + 4

 

Google, Salesforce et ThoughtSpot distingués sur la modularité

Trois des « leaders » ont droit à un bon point sur l’aspect composabilité : Google, Salesforce et ThoughtSpot. Le premier pour son niveau d’intégration avec les plates-formes de BI tierces. Le second, notamment pour ses briques VizQL et Tableau Pulse. Et le troisième, entre autres pour ses options bring your own model et son framework ThoughtSpot Sync.

La gouvernance, défi persistant chez Microsoft

Comme dans bien d’autres Magic Quadrants (bases de données cloud, DaaS, digital workplace…), Microsoft se distingue sur la notion d’écosystème. D’un côté, pour l’intégration de Power BI avec Microsoft 365, Azure et Dynamics. De l’autre, pour les jonctions avec Power Apps et Power Automate. Il a aussi pour lui les fonctionnalités GenAI développées sous la marque Copilot.

Il reste, en revanche, des choses à prouver sur l’interopérabilité. En tout cas au niveau de l’architecture OneLake de Fabric. Un élément déjà pointé l’an dernier, de façon plus globale (retard sur les architectures ouvertes).
Autre élément toujours d’actualité : le déploiement de Power BI limité à Azure. Quant à la gouvernance, elle apparaît toujours délicate. Les déploiements ont en effet tendance à se multiplier, le produit étant « facile à mettre en place ».

L’écosystème, force et faiblesse d’Oracle

Oracle, qui couvre infra, data management, analytics et applicatifs, a aussi droit à un bon point sur l’aspect écosystème. Revers de la médaille : les cas d’usage sont limités hors de cet écosystème. La brique BI / analytics a en tout cas « moins de valeur » si on n’utilise pas OCI, EDM ou Fusion.

La gestion et l’intégration des données est un autre point fort (pipelines préconstruits, modèles d’IA). On ne peut pas en dire autant sur le viver de compétences : pas si facile de trouver des ressources familières à la fois d’OAC et d’OCI.

Qlik boosté par Talend, mais en perte de vitesse

Au contraire d’Oracle, Qlik manque d’un écosystème cloud et/ou applicatif. Il manque aussi de solutions sectorielles robustes. Gartner souligne également qu’il a perdu des parts de marché sur l’analytics. Il reste néanmoins dans le top 5 en termes de revenus, comme d’ailleurs sur le segment de l’intégration de données. L’acquisition de Talend a boosté son offre en la matière. Elle s’est assortie d’un « bond en avant » sur l’intégration de la data science et des LLM.

Par rapport à l’an dernier, pas d’alerte sur le pricing pour Qlik. Gartner avait pointé la complexité des licences et l’absence d’offres de type « lecture seule » qui auraient permis un ticket d’entrée plus bas.

ThoughtSpot rattrapé par l’ère GenAI ?

Même remarque pour ThoughtSpot quant au manque d’écosystème. Il a également de la marge de progression sur l’intégration de la data science et de fonctionnalités avancées de dataviz. Gartner pose en outre la question de la capacité à maintenir le caractère différencié de ses produits dans le contexte de la vague GenAI. Celle-ci déferle aussi chez lui, à l’appui de GPT-4 comme de Gemini, propulsant des briques comme le data storytelling.

Google bien positionné sur l’approche data & analytics

Gartner crédite Google d’un bon point pour l’intégration de Looker avec ses produits data et IA (BigQuery et Vertex AI en tête de liste, mais aussi Google Workspace). Le groupe américain a, plus globalement, une notoriété certaine sur ce segment de marché. Tout du moins à en juger le volume de requêtes à son sujet auprès de Gartner et le nombre de mentions dans ses Peer Insights.

Moins positif : Looker, avec son approche code first, n’est pas le mieux adapté aux métiers. Il n’est pas non plus le plus fourni en matière d’insights automatisés (en natif, pas de clustering ni de détection d’anomalies). Ni de data storytelling.

Tableau, à mieux intégrer dans Salesforce Data Cloud ?

Outre la composabilité, Gartner salue la décision de maintenir un management propre à Tableau. Il note aussi la croissance sur cette activité : + 16 % en 2023, soit mieux que de nombreux fournisseurs classés au Magic Quadrant de la BI.

L’approche data & analytics est moins développée que chez Google. Gartner estime en tout cas que pour rendre Tableau plus concurrentiel, il est nécessaire d’affiner son positionnement au sein du Data Cloud de Salesforce.
Attention aussi à la structure de prix (Tableau Embedded Analytics, facturé à l’usage, a complexifié un modèle traditionnellement fondé sur les rôles). Le portefeuille produit est aussi devenu plus complexe, en particulier sous la bannière Tableau Pulse.

L’an dernier, la relative « neutralité » vis-à-vis des sources de données, des applictions et des plates-formes avait valu un bon point à Salesforce. Comme la communauté d’utilisateurs de Tableau et l’expérience sur la partie analytics.

Illustration principale © Pro motion pic