Consolidation : le nouveau scénario Orange-Bouygues Telecom
Publié par Christophe Lagane le | Mis à jour le
L'acquisition de Bouygues Telecom par Orange permettrait à Martin Bouygues d'entrer au capital de l'opérateur historique et faire contrepoids à l'Etat actionnaire.
Avec les rumeurs d'acquisition de Bouygues Telecom et TF1 par Orange, la question de la consolidation du secteur des télécoms revient sur toutes les lèvres. Y compris celles d'Emmanuel Macron. Interrogé par des confrères, le ministre de l'Economie et des Finances a déclaré n'avoir « pas de proposition de principe » sur un retour à trois opérateurs en France. Pourtant, il y a peu, le même déclarait que « la consolidation n'est pas aujourd'hui souhaitable pour le secteur ». Même si, deux jours plus tard, il modérait ses propos en affirmant n'avoir « pas de religion » sur la question.
Il n'en reste pas moins que, en tant que ministre de l'Economie d'un Etat qui s'inscrit comme le principal actionnaire d'Orange, Emmanuel Macron peut difficilement rester indifférent à une concentration possible du secteur. Car, si Bouygues Telecom a démenti son intention de sortir du marché des télécoms, sans néanmoins préciser s'il était ou non en discussions avec l'opérateur historique, le marché s'accorde à penser que le secteur des télécoms en France doit continuer sa concentration afin que les opérateurs puissent rentabiliser leurs investissements massifs dans les infrastructures fixes et mobiles. Et face à cette situation, Bouygues Telecom s'inscrit comme la cible idéale face aux mastodontes Orange et SFR (Numericable-SFR) où à l'ambitieux Free que l'on voit mal aujourd'hui se faire racheter.
Qu'y gagnerait Orange ?
On peut néanmoins se demander ce qu'Orange aurait à gagner à racheter Bouygues Telecom (au-delà de l'activité médias du groupe Bouygues qui lui permettrait de remplir ses tuyaux face à un SFR agressif qui vient de lancer sa propre plate-forme de diffusion de contenus Zive). Numéro 1 du marché, Orange serait probablement obligé de céder l'infrastructure de Bouygues Telecom à la concurrence (Free en l'occurrence) et devoir tailler dans les effectifs de l'opérateur pour ne pas (trop) alourdir ses charges structurelles. Un scénario à trois déjà évoqué l'année dernière qui s'était soldé par le renoncement d'Orange.
Qu'est-ce qui a changé depuis pour que ce dernier puisse repartir à la charge?? L'intérêt du gouvernement, avancent les observateurs. A La Tribune, Vincent Maulay de Oddo Securities estime que l'opération constituerait « le scénario idéal pour Bouygues, le gouvernement, voire Orange ». Selon l'analyste, Orange profiterait, comme ses concurrents, d'un «?marché réparé?» avec une stabilité relative sur les prix, voire leur remontée. Mais surtout, l'acquisition de Bouygues Telecom pourrait passer par un échange de capital permettant à Martin Bouygues de détenir 25?% d'Orange quand le gouvernement n'en compte «?plus que?» 23?%. Ce qui permettrait à Stéphane Richard, président de l'opérateur historique, d'avoir un contrepoids dans ses discussions avec le gouvernement. Et même permettre à ce dernier une sortie ou une réduction de sa participation. Finalement, quand Bouygues indique qu'il « n'a aucun projet de sortie des secteurs des télécoms et médias », cela ne veut pas forcément dire qu'il maintiendra l'existence de l'opérateur en tant qu'entité indépendante.
Emplois préservés ?
Enfin, l'acquisition de Bouygues Telecom par Orange constituerait le scénario le moins cauchemardesque pour le Gouvernement sur la question de l'emploi face à une éventualité de rachat par Altice via sa filiale SFR (Numericable-SFR) et son dirigeant Patrick Drahi dont la réputation de chasseur de coûts n'est plus à faire. Bouygues Telecom compte environ 9?000 salariés aujourd'hui. Enfin, la récupération par Free du spectre hertzien de Bouygues Telecom permettrait à Iliad de poursuivre son développement sur un marché mobile relativement équilibré.
Reste que Martin Bouygues avait refusé l'offre à 10 milliards d'euros de Patrick Drahi. Et que l'opérateur a récemment présenté ses plans de développement pour 2017 qui confirmerait la volonté de revanche de Bouygues sur le marché des télécoms. Orange saura-t-il se montrer suffisamment convainquant??
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