Le verrouillage des CD légalisé? Adieu la copie privée...
Le gouvernement vient de lancer un signal rassurant à l'industrie du divertissement angoissée par le piratage de la musique et des films. Son projet de loi, visant à légaliser les systèmes de verrouillage des CD et des DVD, signifie la quasi interdiction de pratiquer des copies privées.
Ce serait une victoire pour l'industrie du disque notamment, qui voit ses revenus fondre de trimestre en trimestre. Elle accuse en priorité les méchants internautes téléchargeurs. Or, 80% de la copie est réalisée dans les pays de l'Est et en Asie. Le texte du projet de loi, présenté par le ministre de la Culture Jean-Jacques Aillagon, assimile le contournement de ces dispositifs techniques à de la contrefaçon, ce qui signifie des peines allant jusqu'à deux ans de prison et 150.000 euros d'amende. Discuté par le Parlement, ce projet de loi va certainement attirer les foudres des associations de consommateurs. Pour deux raisons. La première concerne le blocage des supports sur certains lecteurs comme les PC ou les auto-radios. De très nombreux consommateurs utilisent leurs ordinateurs comme une chaîne hi-fi. Vice caché Il y a quelques mois, une décision de justice a d'ailleurs donné raison à UFC-Que Choisir, qualifiant le système de protection de « vice caché » ouvrant droit à un remboursement. Qui dit protection ne doit pas dire limitation de l'usage. Ensuite, la légalisation de tels systèmes annule de facto le droit à la copie privée. En effet, la loi prévoit que le possesseur d'un support culturel a le droit d'en faire une copie pour son usage privé. Par ailleurs, depuis le temps des cassettes audio, le consommateur paie ce droit à la copie privée lorsqu'il achète des supports vierges! Même si le gouvernement indique maintenir le droit à la copie privée, ce droit risque d'être mis à mal par des verrous en empêchant son usage. Il faudra que les éditeurs de disque conçoivent un système de protection interdisant les copies à partir de deux exemplaires. Le feront-ils? « Ce qu'on appelle la copie privée est une exception au droit, ce n'est pas un droit », tente d'expliquer le ministre de la Culture Jean-Jacques Aillagon. « Il faut dans le même temps affirmer cette exception au droit mais bien veiller à ce que cette exception soit pratiquée de façon équilibrée, de façon mesurée, sans priver les auteurs et les interprètes de la juste rémunération de leur travail. ». Une exception au droit Sauf que le projet de loi n'aborde pas le sujet. Il indique seulement prévoir un collège de médiateurs indépendants chargé de régler les différends éventuels, notamment en ce qui concerne l'exception pour copie privée. Une belle usine à gaz en perspective. Que les droits d'auteur soient respectés, tout le monde est d'accord sur la question. Mais est-ce à l'utilisteur final d'en subir les conséquences? Qui dit qu'il continuera à acheter des disques surtout si son usage est limité? L'industrie du disque se contente donc d'une mesure répressive, écornant une fois encore son image. Des solutions alternatives existent pourtant pour redynamiser les ventes : Baisser le prix des disques et des DVD, obtenir une réduction de la TVA (dans le cadre d'une harmonisation européenne), généraliser la combinaison CD+DVD pour rendre plus séduisant le support, jouer la carte de la qualité et non plus des stratégies à court terme s'agissant de la production, etc.
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