Gestion des actifs logiciels (SAM) : l'Europe, terre de services managés
Le Magic Quadrant des services SAM managés dénote le poids de l'Europe sur ce marché, autant en termes de fournisseurs que part de clientèle et de revenus.
Le SAM managé, avant tout une affaire européenne ?
En termes de revenus comme de volume de clientèle, l'EMEA (Europe, Moyen-Orient, Afrique) pèse en tout cas plus que toute autre région géographique, selon Gartner. En parallèle, trois des quatre "leaders" du Magic Quadrant que le cabinet américain dédie à ce marché sont basés en Europe. Nommément, Crayon (Norvège), Livingstone Group (UK) et SoftwareOne (Suisse). L'autre - Anglepoint - est établi aux USA, mais Crayon est son actionnaire majoritaire.
Ces "leaders" sont les mêmes que l'an dernier. Des huit autres offreurs que Gartner avait distingués, il en reste six. Bytes est sorti du Magic Quadrant faute de respecter les critères de distribution géographique du revenu et de quantité de ressources dédiées au SAM managé. Même sort pour DXC Technology, faute de services FinOps/gestion des licences cloud et de services ESG.
Ces deux types de services n'étaient, en eux-mêmes, pas obligatoires. Mais ne proposer ni l'un ni l'autre était éliminatoire. Ils faisaient effectivement partie d'une liste de 9 éléments "essentiels"... et il fallait en fournir au moins 8. Gartner a imposé une deuxième série de fonctionnalités, dont certaines spécifiques au SAM dit "continue". Celui-ci s'oppose au SAM "planifié". Une question de cadence de livraison. Sont en l'occurrence considérés comme "continus" les services de cartographie des actifs, de FinOps et de gestion des droits d'usage délivrés au moins une fois par semaine. Pour la partie développement durable, c'est au moins une fois par mois. Idem pour la mesure de valeur produite.
La photographie que donne ce Magic Quadrant correspond à la situation à fin avril 2024. Les fournisseurs sont jugés sur deux axes. L'un, dit "vision", se centre sur les stratégies (sectorielle, géographique, commerciale, marketing, produit...). L'autre, dit "exécution", sur la capacité à répondre effectivement à la demande (expérience client, performance avant-vente, qualité des produits/services...).
Sur l'axe "exécution", la situation est la suivante :
Rang | Fournisseur | Évolution annuelle |
1 | Anglepoint | = |
2 | KPMG | + 1 |
3 | Livingstone Group | - 1 |
4 | Crayon | + 1 |
5 | SoftwareOne | + 2 |
6 | Deloitte | - 2 |
7 | Accenture | nouvel entrant |
8 | Insight | - 2 |
9 | Noventiq | - 1 |
10 | SHI | - 1 |
11 | EY | nouvel entrant |
12 | ITAM Solutions | - 2 |
Sur l'axe "vision" :
Rang | Fournisseur | Évolution annuelle |
1 | Anglepoint | = |
2 | Livingstone Group | + 1 |
3 | Crayon | - 1 |
4 | SoftwareOne | = |
5 | KPMG | + 2 |
6 | Insight | - 1 |
7 | SHI | + 1 |
8 | ITAM solutions | + 4 |
9 | Noventiq | + 2 |
10 | EY | nouvel entrant |
11 | Deloitte | - 5 |
12 | Accenture | nouvel entrant |
Prix élevés chez Anglepoint
En 2023, Gartner avait salué l'exhaustivité du portefeuille d'Anglepoint (expertise sur plus de 500 éditeurs, panel d'une trentaine d'outils SAM et de plates-formes de gestion du SaaS). Lequel se distinguait aussi par ses proportions - sans égales au Magic Quadrant - de clients utilisant tous ses services et de grandes entreprises ayant recours à son SAM continu. Il avait également eu un bon point pour son implication dans des organisations qui définissent les standards du SAM (ISO, FinOps Foundation...).
Cette année, Gartner apprécie le niveau d'unification des composantes SAM, FinOps et greenIT. Il salue aussi un parcours client bien défini, centré sur le pilotage de la maturité à renfort d'une méthodologie modulaire. Bon point également pour l'amélioration continue des services (diversité des canaux de feedback, protocole détaillé d'escalade...).
L'an dernier, la présence géographique avait valu un point de vigilance à Anglepoint (ressources et clientèle concentrées essentiellement en Amérique du Nord). Autres éléments : pas le meilleur des temps de réponse (surtout sur les fuseaux horaires hors USA) et une tendance à se concentrer sur le modèle continu (et donc à ne pas s'engager sur des projets ad hoc type gestion d'outils SAM).
Cette fois encore, la présence géographique est un point noir, même si elle s'est étendue en EMEA. Gartner pointe aussi un manque de transparence autour de la flexibilité des prix et les juge élevés en comparaison au niveau de service parfois délivré. Il y ajoute un point d'interrogation sur les ressources humaines mises à disposition : leur volume a reculé d'une année sur l'autre. Et avec lui, le niveau d'expertise, d'après certains clients.
Crayon peut progresser sur le FinOps
En 2023, Crayon fut crédité d'un bon point pour son expertise sur la gestion des coûts du cloud et du BYOL. Même chose pour la profondeur de son offre et sa couverture internationale, notamment à travers ses centres de compétences et d'excellence.
Cette fois-ci, les appréciations positives concernent le niveau de standardisation de l'offre (étendue de la gestion des licences et des fournisseurs secondaires, en particulier), l'alignement des services sur les objectifs des clients (SLA, méthodos pour des données de confiance, services de négociation...) et l'innovation (chatbot pour l'analyse des contrats de licence, détection d'anomalies pour la brique FinOps, suivi des émissions de CO2 sur Azure...).
L'an dernier, Crayon n'avait "pas pleinement démontré la nature transformative de ses services" (Gartner lui reprochait en fait de ne pas avoir fourni d'informations sur ses innovations dans l'IA, ni sur des enjeux tels que les bots et les conteneurs). Il était aussi souligné qu'il gérait moins de déploiements "complexes" que ses concurrents, qu'il disposait de moins de ressources dédiées que la moyenne du Magic Quadrant... et que la qualité de services variait en fonction des éditeurs comme des CSP.
Cette fois-ci, Gartner note un retard par rapport aux autres "leaders" pour ce qui est de la capacité à démontrer des capacités de gestion à grande échelle. Certains clients regrettent, en particulier, une certaine incapacité à gérer les fournisseurs secondaires. Attention aussi à la disponibilité limitée de ressources hors EMEA et à l'expertise parcellaire sur la partie FinOps (pour Google Cloud notamment).
Livingstone Group et son approche "fragmentée"
En 2023, Livingstone Group s'était distingué pour son niveau d'engagement sur les ROI. Et plus globalement pour sa "maturité contractuelle" au-dessus de la moyenne. Autre point fort : les proportions de ressources dédiées et de clients exploitant tout le portefeuille. Ainsi que les investissements dans la consolidation des données entre outils d'inventaire, MDM, SIRH, ITSM, cloud et SaaS.
Cette année, Gartner salue les investissements sous l'angle de la gestion multiplateforme, toujours avec le pilier data en toile de fond. Il apprécie aussi l'exécution opérationnelle, entre équipes dédiées et processus d'assurance qualité. Autre point fort, l'IA, appliquée entre autres à l'analyse de contrats, au data mining et à la rationalisation du parc applicatif.
L'an dernier, la gestion des CSP avait valu un mauvais point à Livingstone Group, focalisé essentiellement sur les environnements Microsoft. Gartner avait aussi noté un niveau de croissance sous la moyenne. Et un effectif qui s'était réduit d'une année sur l'autre ; y compris en EMEA, où se trouve la plus grande partie de la clientèle.
Autre angle cette fois-ci : une croissance lente en Amérique du Nord et qui semble surtout liée à l'extension de contrats existants. Attention aussi à une approche que Gartner perçoit comme "fragmentée" sur l'aspect technologique (usage potentiellement difficile par le client). Quant aux prix, ils peuvent poser des problèmes au renouvellement.
SoftwareOne : un problème de mise en action
En 2023, SoftwareOne s'était distingué pour la flexibilité de son modèle d'affaires (options de conso et de delivery, résiliation de contrat...). Gartner avait aussi souligné ses capacités d'engagement ; et d'extension de ses outils propriétaires, y compris dans des segments où l'offre manquait, comme l'automatisation de l'analyse des accords de licence utilisateur final.
Cette année, SoftwareOne a pour lui une tarification flexible, un volume important de ressources humaines et la capacité à gérer des déploiements importants. Gartner salue aussi des améliorations (dans le FinOps, la gestion du SaaS, l'automatisation...) alignées sur la demande.
L'an dernier, Gartner avait fait remarquer que SoftwareOne avait le plus faible taux de client utilisant ses services FinOps. Et qu'il devait encore livrer des services axés sur le développement durable. Autres point faibles : la quantité de ressources dédiées par client et la qualité des données d'inventaire.
Cette fois-ci, Gartner met un bémol sur la capacité à mesurer la valeur produite et à mettre en oeuvre les actions correctives. Il pointe aussi des manques en matière de visibilité du service delivery et une baisse généralisée de la croissance des effectifs dédiés au SAM managé.
Illustration © Sergio Donà Itestro - Fotolia
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