Assistants vocaux ou chatbots d'entreprise, place au langage naturel
Si l'on ne parle que d'elle, la technologie voix semble surtout trouver à s'imposer dans les foyers et en voiture. En entreprise, et ce malgré quelques belles initiatives, les assistants vocaux peinent encore à faire leur place. Cependant, il ne faut pas confondre interface et technologies de fond.
L'entreprise est le lieu idéal pour que s'exprime pleinement l'intelligence artificielle et les interactions en langage naturel entre l'homme et la machine. Raz-de-marée des assistants vocaux dans la vie privée Les technologies voix ont le vent en poupe ! La sortie en France d'Alexa fait les beaux jours de la presse IT grand public, et ses concurrents se bousculent aux portes des domiciles et des voitures connectées.
Oui les assistants vocaux sont très appréciés et c'est en tout état de cause une réponse parfaitement appropriée à toutes les situations où l'utilisateur n'a pas la liberté d'écrire et de lire (en sécurité au moins). Ces technologies vont aussi contribuer à remodeler le paysage commercial et pousser les enseignes à adopter de nouvelles stratégies pour gagner leur place dans le top 2 ou 3 des résultats d'une recherche.
En effet, difficile d'imaginer Alexa lister de longues minutes plusieurs dizaines de résultats qu'offre une recherche par navigateur. Cette forme de consommation du web s'est d'ailleurs largement érodée par l'effet des applications. Si la disparition de la sérendipité et de la diversité qu'offre la recherche par navigateur effraye beaucoup les soutiens de la neutralité du net, les assistants vocaux ne sont pourtant pas exactement destinés aux mêmes usages. Comme leur nom l'indique, il s'agit d'abord de disposer d'une assistance fiable et efficace.
Lire aussi : Du RAG aux agents, les choix GenAI de Doctolib
Trouver un itinéraire bis avant d'être bloqué dans les embouteillages, contacter rapidement quelqu'un, commander la fermeture des volets et le dîner dans la foulée, les cas d'usages sont multiples mais tendent principalement à exécuter rapidement une tâche. C'est dans cette optique que les agents conversationnels de productivité commencent à être étudiés pour leur introduction en entreprise.
La question d'une assistance vocale en entreprise fait évidemment son chemin. Proche du consommateur, à l'orée de la sphère privée, l'hôtellerie est un secteur propice au développement des assistants vocaux.
Le groupe Mariott International déploie déjà Alexa for Hospitality dans plusieurs de ses chaînes d'hôtels. La logistique et le transport annoncent également de nombreux développement en cours. FeDex par exemple a créé son custom skill pour Alexa, destiné à comprendre, à terme, des instructions de type « Alexa, prépare un envoi », affranchissant ainsi le collaborateur des formulaires à remplir. Reste que la commande vocale présente un certain nombre d'inconvénients qu'on ne peut pas ignorer en entreprise.
L'intelligence artificielle a connu des progrès fulgurants, la reconnaissance et l'adoption du langage naturel s'améliorent de manière continue, mais la technologie vocale elle, demeure tributaire de son environnement. En logistique, le bruit ambiant peut empêcher la bonne réalisation d'une commande.
En open space, les collaborateurs peuvent rapidement être gênés par ces déclarations, qu'on doit prononcer d'une voix claire et distincte. Sans compter l'existence d'une certaine pudeur à annoncer à haute voix sa volonté. C'est bien pourquoi d'ailleurs les assistants vocaux ont d'abord pénétré le marché de la sphère privée.
Qu'en est-il dans le domaine de la BI et de l'analytique ? La technologie voix, aussi impressionnante soitelle, en est à ses débuts et les questions de sécurité qu'elle pose sont loin d'être toutes réglées, comme en témoignent de récents articles (piratage par ultrasons, commandes comprises par erreur.). Or les plateformes de BI offrent par essence l'accès à ce qu'il peut exister de plus confidentiel au sein d'une entreprise (en dehors des brevets et R&D). Chiffre d'affaire, résultat net, répartition par zone géographique, évolution, prix et bien évidemment, stratégies commerciales pour ne citer que ces quelques exemples.
Difficile dès lors d'envisager d'ouvrir le SI à un assistant qui ne saura pas faire la différence entre la voix du PDG de l'entreprise et celle de toute personne venant de l'extérieur. De même, et à moins de disposer de locaux insonorisés, rien n'empêche un tiers de saisir les propos d'une intelligence artificielle prononcés en réunion. Au demeurant, un certain nombre d'informations à demander à son agent conversationnel reste envisageable. On pense aux chiffres de fréquentation d'un événement, ou toute donnée rendue publique ou destinée à l'être et à laquelle l'entreprise peut avoir besoin d'accéder rapidement, sans perdre son temps dans d'infinies et fastidieuses recherches.
Si l'assistance vocale n'est peut-être pas la technologie la plus adaptée dans un environnement d'entreprise, le traitement automatique du langage doit en revanche faire l'objet d'une sérieuse attention, en particulier dans le domaine particulier qu'est l'analytique. Les chatbots, lesquels s'appuient sur l'intelligence artificielle au même titre que les interfaces vocales, offrent le grand avantage d'avoir au préalable identifié leurs utilisateurs et maintiennent une discrétion d'usage certainement plus appropriée en analytique.
En outre, leur approche par langage naturel offre d'intéressantes perspectives à l'entreprise qui souhaite démocratiser la BI auprès de ses collaborateurs, en étendre l'exploitation, en favoriser l'apprentissage. Les chatbots sont par exemple très pertinents pour dépasser les appréhensions du débutant en data visualisation.
Les pionniers du langage naturel comme Narrative Science ou Automated Insights, connus pour leur capacité illimitée à produire des textes structurés à partir de milliers de données, viennent aujourd'hui au secours des utilisateurs de solutions d'analytique, en explicitant par le texte de mystérieux schémas, rapports et dataviz. De quoi démarrer rapidement un nouveau projet sans être freiné par le manque de spécialisation.
Tous les cabinets de consultants s'accordent à prédire que près de la moitié des interfaces visuelles seront remplacées par des interfaces vocales d'ici 2 à 5 ans. Tendance ? Effet de mode ? La sphère privée annonce certainement un bouleversement de fond. En entreprise, en revanche, il s'agira moins d'une question d'interface que de technologies à proprement parler, avec pour tête de pont l'implication de l'intelligence artificielle et du langage naturel.
Crédit Photo : AWS
Sur le même thème
Voir tous les articles Data & IA