Bruxelles n'en a pas fini avec Microsoft
Le torchon brûle à nouveau entre la Commission européenne et Microsoft. Quelques mois après avoir bouclé une première et très longue procédure pour abus de position dominante, Bruxelles revient à la charge avec « de nouvelles enquêtes ». On notera l'emploi du pluriel.
Encore une fois, le premier éditeur mondial de logiciels est accusé d'abus de position dominante dans les domaines de la bureautique avec Office et Excel et de la navigation Internet avec Internet Explorer. L'ouverture de ces enquêtes « n'implique pas que la Commission a des preuves d'une infraction »,précise néanmoins le communiqué de la Commission.
Ces enquêtes font suite à des plaintes, notamment de la part d'Opera qui conteste l'intégration par défaut d'IE dans Windows. Opera - qui affirme se faire le porte-parole des consommateurs lassés de se voir imposer un choix monopolistique - demande à la Commission d'exiger de Microsoft qu'il ne livre plus son navigateur avec Windows, ou alors qu'il intègre en standard d'autres navigateurs dans son système d'exploitation.
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Opera va plus loin et souhaite que la Commission demande à Microsoft de faire adhérer ses navigateurs aux standards de l'industrie. Microsoft empêcherait ainsi les développeurs de concevoir des programmes qui fonctionnent sur les autres navigateurs « en ne suivant pas les standards Web reconnus. »
« Microsoft exerce un contrôle unilatéral sur les standards sur certains marchés ce qui crée un standard de facto qu'il est plus coûteux de supporter, plus difficile à maintenir et techniquement inférieur, et qui peut même exposer les utilisateurs à des risques de sécurité« , a surenchéri Opera.
Pour Microsoft, la plainte n'a pas lieu d'être. L'éditeur a rappelé qu'IE est un produit à part de Windows depuis une décade. » Nous allons bien évidemment coopérer avec toute demande de renseignements sur ces questions, mais nous pensons que l'inclusion du navigateur dans le système d'exploitation profite aux consommateurs, et que les consommateurs et les fabricants de PC sont déjà libres de choisir n'importe quel navigateur ils souhaitent. »
Bruxelles indique aussi avoir été alertée sur l'incorporation à Windows « d'autres produits logiciels » (Windows Live, Desktop search).
Le groupe américain refuserait aussi de divulguer à ses concurrents des informations techniques permettant d'assurer l'interopérabilité d'une « large série de produits », dont la suite Office et des produits pour les serveurs.
Bref, Microsoft est bien sur le point de s'offrir un tour gratuit sur le grand manège de la Commission.
En septembre dernier, la justice européenne confirmait la condamnation de 2004 de Microsoft pour abus de position dominante. Outre une amende de 497 millions d'euros, une goutte d'eau pour le géant de Redmond qui a payé sans sourciller, Bruxelles a imposé de retirer Media Player de Windows en Europe (considérant que la firme se sert de son quasi-monopole sur les OS pour éliminer tous ses concurrents) et a exigé une interopérabilité totale entre Windows et les produits de la concurrence.
Si Microsoft a accepté plusieurs modifications de taille dans son modèle économique, et notamment de vendre en Europe une version de Windows XP sans Media Player, le groupe a longtemps traîné des pieds en matière d'interopérabilité avec la concurrence. Une affaire qui envenime les relations entre la Commission et le groupe depuis plus de trois ans.
D'ailleurs, en juillet 2006, le géant américain écope d'une nouvelle sanction de 280 millions d'euros pour ne s'être pas encore plié à sa condamnation de mars 2004.
En mars 2007, Bruxelles menace à nouveau d'une amende journalière de 3 millions d'euros, toujours pour les mêmes raisons.
En octobre dernier, la Commission européenne annonce que finalement, après d'âpres négociations, Microsoft s'est finalement plié à ses dernières exigences, notamment en matière d'interopérabilité.
Microsoft fournira notamment à un prix acceptable les informations nécessaires pour assurer l'interopérabilité entre les PC et serveurs fonctionnant sous Windows et les serveurs équipés d'un autre système d'exploitation, comme la Commission le lui avait ordonné en 2004.
Concrètement, Microsoft accepte de fournir des spécifications sur certains « protocoles », y compris pour les fournisseurs de logiciels en « open source ». Elle devra actualiser ces informations au fur et à mesure qu'elle innove.
Les royalties à payer pour utiliser ces informations seront réduites à un paiement unique de 10.000 euros, au lieu de 2,98% des recettes tirées des logiciels créés.
Les royalties exigées pour prendre une licence valable dans le monde entier, y compris pour les produits sous brevet, passeront de 5,95% à 0.4% des recettes, soit moins de 7% de ce que Microsoft exigeait initialement de ses concurrents.
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