Digital workplace : l'empreinte de Microsoft sur les intranets
Publié par Clément Bohic le | Mis à jour le
Absent du Magic Quadrant des solutions packagées d’intranet, Microsoft reste néanmoins un des déterminants de ce marché.
Microsoft, absent du Magic Quadrant des intranets malgré SharePoint ? En effet... et Gartner s'en justifie exhaustivement.
Le cabinet américain s'est plus précisément intéressé aux « solutions packagées » d'intranet. Il les définit comme « prêtes à l'emploi »... par opposition à SharePoint, qui nécessite des composantes externes, en tout cas pour satisfaire aux critères fonctionnels évalués. Ce en dépit, notamment, de l'existence de la brique Viva Connections.
Microsoft reste toutefois l'éditeur avec lequel tous les fournisseurs de solutions packagées d'intranet doivent composer. Certains se greffent d'ailleurs sur des locataires Microsoft 365 (Akumina, Appspace, LiveTiles, Powell Software...), quand d'autres mettent en place des intégrations, avec des éléments comme Active Directory et le Microsoft Graph.
Frontline workers, stratégies sectorielles et grandes entreprises : en voie d'acquisition
Entre autres tendances, Gartner constate, chez les offreurs concernés, une propension à s'orienter plus nettement vers les grandes entreprises - qui tendaient, historiquement, à assembler leurs propres intranets. Émerge, dans ce contexte, le défi de s'adresser davantage à l'IT qu'aux métiers.
Pour ce qui est de la couverture des frontline workers (employés hors bureau, dans les grandes lignes), beaucoup de fournisseurs sont encore en « phase d'apprentissage », pour reprendre les termes de Gartner. Il existe toutefois des spécialistes - Beekeeper, WorkJam, Zipline, Zebra Technologies, etc. - qui ne sont pas l'objet de ce Quadrant.
Autre aspect encore largement en phase de développement : la « verticalisation » des offres. Peu de fournisseurs parmi ceux classés proposent des solutions centrées sur des secteurs d'industrie, alors même que les besoins sont distincts (régulations, écosystèmes applicatifs...).
Reflet de la demande, les solutions furent axées, ces dernières années, sur le cas d'usage « communication et engagement des employés ». Mais cette demande évolue et les offres pivotent en conséquence, pour toucher notamment à ce que Gartner dénomme les « services de connaissances » (knowledge services). Certains dépriorisent en outre le deuxième use case le plus populaire : les « services aux employés » (employee (self)-services). Raisons possibles : d'une part, ce use case est difficile à couvrir (il induit souvent des workflows et des intégrations complexes). De l'autre, ceux que les vendeurs ont identifiés comme leurs acheteurs ne sont pas responsables des services aux employés.
Le terme « intranet » lui-même est en voie de disparition dans le marketing des offreurs. Qui lui préfèrent, en particulier, la notion de « plate-forme d'expérience employé » - l'intranet n'étant alors perçu que comme un canal parmi d'autres.
Quinze fournisseurs, sept « leaders »
Pour être classé, il fallait couvrir au moins trois des six use cases pris en considération. Outre la communication employé, le service aux employés et les services de connaissances, il avait les portails d'applications, la gestion du travail et les frontline workers.
Sur le volet business, le palier d'inclusio était à 10 M$ de CA (période : début avril 2022 à fin mars 2023).
Le positionnement au sein du Quadrant résulte d'une évaluation sur deux axes. L'un prospectif (« vision »), centré sur les stratégies (sectorielle, géographique, commerciale, marketing, produit...). L'autre centré sur la capacité à répondre effectivement à la demande (« exécution » : expérience client, performance avant-vente, qualité des produits/services...).
La situation sur l'axe « vision » :
Rang | Fournisseur |
1 | Simpplr |
2 | LumApps |
3 | Unily |
4 | MangoApps |
5 | Firstup |
6 | Akumina |
7 | Workvivo |
8 | Staffbase |
9 | Interact |
10 | LiveTiles |
11 | Powell Software |
12 | Appspace |
13 | Haiilo |
14 | Igloo |
15 | Axero |
Sur l'axe « exécution » :
Rang | Fournisseur |
1 | Simpplr |
2 | Unily |
3 | Staffbase |
4 | LumApps |
5 | Workvivo |
6 | Firstup |
7 | Interact |
8 | Akumina |
9 | LiveTiles |
10 | Appspace |
11 | Axero |
12 | MangoApps |
13 | Powell Software |
14 | Haiilo |
15 | Igloo |
Firstup : extensibilité et support limités
Firstup a pour la une stratégie marketing et un modèle économique qui lui ont permis d'entrer sur le marché des solutions packagées d'intranet depuis un segment adjacent (communications d'entreprise). Gartner salue aussi l'étendue de ses partenariats (conseil et implémentation). Tout comme l'innovation sur la partie GenAI.
Firstup a cependant du retard sur les use cases service aux employés et portails d'applications. Attention, par ailleurs, au support hors de la plaque Amérique du Nord, qui est sa principale zone d'implantation. Ainsi qu'à l'extensibilité limitée de la solution.
Interact : une spécialisation qui restreint le spectre
La GenAI vaut aussi un bon point à Interact, notamment sur l'analyse de sentiment. Gartner apprécie aussi sa connaissance des industries sur lesquels il s'est positionné. Et, plus globalement, sa compréhension des besoins, autant lors de la vente que du déploiement.
Le manque de présence hors Amérique du Nord - et Europe - vaut aussi un mauvais point à Interact. Qui n'est, par ailleurs, pas le plus adapté pour les use cases hors de ses verticales de spécialisation. À noter également sa tendance à se concentrer sur les structures d'au moins 2500 employés.
LumApps : des efforts d'intégration à prévoir
L'absence de dépendance de LumApps à Microsoft 365 ou Google Workspace est vue comme un point positif. L'intuitivité de l'interface l'est aussi. Comme l'innovation sur l'expérience utilisateur, à renfort d'assistants et de nudges.
On ne peut pas en dire autant de la stratégie verticale : LumApps préfère cibler des use cases « universels ». Attention aussi aux conflits potentiels avec la roadmap de Microsoft. Et aux efforts de développement/déploiement/design nécessaires pour adopter la solution.
Extensibilité et support également limités chez Simpplr...
Simpplr se distingue par une adoption plus fréquente que ses concurrents sur les use cases hybrides (desk + frontline workers). Les clients ont par ailleurs tendance à mieux connaître et maîtriser les possibilités de sa solution que chez d'autres fournisseurs. La facilité de mise en place et d'usage est un autre point fort.
Appréciation moins positive concernant l'extensibilité. Idem pour le support (présence concentrée aux États-Unis). Et pour la stratégie verticale.
... et chez Staffbase
Staffbase a pour lui son focus historique sur les frontline workers. Il a aussi son héritage de la communication multicanale et ses intégrations avec l'écosystème Microsoft.
La stratégie verticale est aussi une faiblesse pour Staffbase. Tout comme le support hors Amérique du Nord et Europe. Ainsi que l'extensibilité.
Unily : la réactivité du support questionnée
L'extensibilité vaut au contraire un bon point à Unily. Gartner l'en crédite d'un autre sur le volet innovation (exemples donnés : résumé par IA et mode hors ligne pour les frontline workers). Il salue aussi la brique Universe, à mi-chemin entre gestion des connaissances et des communautés.
Certains clients déplorent la lenteur du support chez Unily, affirme Gartner. Le cabinet américain pointe aussi une prise en charge du use case gestion du travail moins importante que chez la concurrence. Et de moindres investissements sur les partenariats d'implémentation hors Amérique du Nord.
Workvivo : les inconnues de l'ère Zoom
Workvivo est « un des rares fournisseurs » à proposer une offre exhaustive sur la gestion de communautés. Il arrive plus globalement à éviter les conflits avec l'existant (solutions de productivité, de gestion des tâches...). L'acquisition par Zoom a renforcé sa notoriété au sein des short-lists.
Cette acquisition peut aussi soulever des inquiétudes (risque de dépendance), en premier lieu pour les entreprises à forte empreinte Microsoft. Comme d'autres, Workvivo est présent surtout sur les plaques Europe et Amérique du Nord. Et son approche verticale « manque de nuance ».
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