Diem : la crypto origine Facebook mise en échec

Libra Diem Facebook

Dissolution actée pour l’édifice Diem qui s’est constitué ces dernières années en support des ambitions de Facebook dans les cryptomonnaies.

« De notre dialogue avec les régulateurs, il ressort clairement que le projet ne pourra pas aller plus loin. » C’est en ces termes que l’association Diem a jeté l’éponge. Et annoncé la vente de ses actifs. L’acquéreur : la maison mère de la banque californienne Silvergate. La somme supposée : 200 millions de dollars.

Diem portait une initiative d’envergure que Facebook avait officialisée à la mi-2019. Dans les grandes lignes, il s’agissait de créer « une devise et une structure financière mondiales […] au service de milliards de personnes ». Un écosystème que porterait une cryptomonnaie « stable, basée sur une blockchain open source […], garantie par une réserve d’actifs réels et régie par une association indépendante ».

La blockchain en question était issue des travaux d’une filiale de Facebook : Calibra, enregistrée en Suisse quelques semaines en amont. Elle utilisait le langage de programmation Move, qui permet de mettre en œuvre des smart contracts.

La réserve devait provenir, d’une part, des utilisateurs qui achèteraient des Libra (nom de la crypto). De l’autre, d’investisseurs qui acquerraient des « Investment Tokens ». Ces jetons permettraient de recevoir, à terme, des dividendes sur les intérêts générés par les « actifs à faible risque » dans lesquels serait investie la réserve.

L’association Libra, organisation indépendante à but non lucratif basée à Genève, serait seule habilitée à créer et à détruire des Libra. Le stock pourrait grandir ou rétrécir en fonction de la demande. Avec, dans tous les cas, un collatéral d’une valeur au moins équivalente à la valeur faciale des « pièces » en circulation.

Sus aux monnaies souveraines ?

Les entités souhaitant pouvoir opérer un nœud de validation sur ce réseau de paiement devaient remplir certains critères. Par exemple, pour les entreprises privées, de valorisation et de notoriété. Et investir au moins 10 millions de dollars dans des « Investment Tokens ». Ce qui leur donnerait par ailleurs un vote au conseil d’administration.

Un premier cercle de 27 membres s’était constitué. Parmi eux, des sociétés technologiques, des institutions académiques, des fonds d’investissement, des fournisseurs de services de paiement (Visa, Mastercard…) et des groupes télécoms tel Iliad.

Avant même l’officialisation de la démarche, le Sénat américain avait, dans la lignée d’un article du WSJ, adressé une lettre ouverte à Facebook. Il s’enquérait du fonctionnement de cette crypto alors encore hypothétique. Depuis, les sénateurs ont eu l’occasion d’auditionner Mark Zuckerberg. Ils ne sont pas les seuls – et de loin – à avoir demandé des comptes.

S’est notamment posée la problématique de la souveraineté monétaire. L’association Libra a dû faire des concessions. Notamment accepter le principe de stablecoins adossés à une seule devise. Et non à un « panier d’actifs à faible volatilité », comme c’était le cas au départ.

Devenue Diem en décembre 2020, l’association a dû mettre de l’eau dans son vin sur d’autres aspects. En particulier sur un objectif à moyen terme : aller vers une blockchain sans permissions. Qui devait permettre à quiconque d’agir en tant que nœud. Tout en restant sur un consensus de type byzantin (base : protocole HotStuff).

Diem : les concessions n’ont pas suffi

Le top management de l’association avait par ailleurs évolué. Avec, placé aux manettes, Stuart Levey, ancien du Trésor et avocat chez HSBC Holdings. Les activités avaient en outre été relocalisées aux États-Unis. En toile de fond, un partenariat avec… Silvergate. La banque était devenue le seul émetteur autorisé du stablecoin adossé au $. L’association avait quant à elle retiré sa demande d’agrément comme établissement de paiement déposée en septembre 2019 auprès du gendarme suisse des marchés financiers.

Le dernier communiqué de Diem remontait à octobre 2021. Il y était question de l’intérêt du Congrès américain pour le projet. Et plus particulièrement de ses inquiétudes en matière de blanchiment et « d’autres activités criminelles ».

« Diem n’est pas Facebook », déplorait, à cette occasion, l’association. Elle faisait référence à Novi, un projet rattaché à Facebook… et qui, dans l’absolu, lui survit aujourd’hui. Derrière cette marque, un portefeuille numérique que développe Calibra. L’objectif initial était de le lancer au 1er semestre 2020. D’abord sur WhatsApp et Messenger, puis en tant qu’app mobile autonome. Avant tout pour les paiements entre particuliers. Puis, à plus long terme, pour le règlement de factures, les achats dans les petits commerces ou encore les transports en commun.

Aux dernières nouvelles, Novi est en test aux États-Unis et au Guatemala. En partenariat avec Coinbase. Il gère une seule devise : l’USDP (Pax Dollar), cryptomonnaie officielle de la blockchain Paxos. L’idée était de faire la transition vers le réseau Diem dès lors qu’il aurait le blanc-seing des autorités…

Illustration principale © Diem