HP Moonshot : quelles cibles, avec quel écosystème ?
Londres. - Au lendemain du lancement du nouveau châssis HP Moonshot, ce 8 avril (cf. article: 'Nouveau format de serveurs cartouches'), des informations plus détaillées confirment le positionnement de cette nouvelle génération de serveurs sur 'cartouches' [cartridge servers].
Ils sont prêts à l'emploi, conçus pour être agrégés verticalement, en batterie ou fermes de serveurs, dans des châssis à haute densité (jusqu'à 45 cartouches par caissons de 4,3 U), et pour des applications prédéfinies - d'où le terme, très discuté ici, de 'software defined'.
Objectif : big data, services web, calcul haute performance.
Du fait du recours à des processeurs peu coûteux et peu gourmands en énergie - typiquement les Atom S1200 d'Intel et les ARM avec chipsets de Calxeda, par exemple - ces châssis HP Moonshot 1500 visent effectivement des traitements ou 'workloads' en gros volumes.
Il est donc question, sans surprise, de Big data avec des possibilités d'extension très souples. Le dispositif en meccano permettra effectivement de constituer de nouvelles fermes de serveurs à bas coûts - telles que les 'telcos' peuvent utiliser.
Lire aussi : NUVIA, une pépite au coeur du conflit Arm-Qualcomm
Les applications visées sont, par exemple, des applications de front-end très actives sur le web (typiquement, les jeux en ligne ou du télépaiement), des applications partagées sur le 'cloud' et à forte montée en charge, ou encore les systèmes analytiques, le calcul haute performance, certaines applications financières, mais également les traitements du génome, les systèmes de reconnaissance biométriques, l'analyse de séquences de vidéosurveillance, etc.
Pour David Chalmers, chief technologist, division Entreprise, de HP EMEA, il s'agit d'une « nouvelle équation entre performances et coûts, et encombrement. C'est une nouvelle "économie" des serveurs pour au moins une partie des datacenters ».
Il ajoute : « Non, Moonshot n'a pas vocation à tout remplacer. Ce sont certaines applications, certaines utilisations qui vont en déterminer le besoin. Ici, il s'agit bien de la possibilité d'aligner, en batteries, des milliers de serveurs dans un encombrement le plus dense possible et pour une consommation d'énergie la plus basse possible, sans refroidissement coûteux. Nous connaissons tous des entreprises qui consomment de la puissance serveur avec des unités de base 1000 voire 5000. »
Donc, en parallèle, « les serveurs blades conserveront leur légitimité, pour des utilisations plus critiques ».
À noter que le prix d'un tel serveur 'cartouche' HP ProLiant Moonshot (quel qu'il soit - orienté calcul, mémoire cache, stockage.) devrait se situer autour de 1000 euros pièce, - mais certainement un peu plus lorsqu'arriveront les configurations avec 4 processeurs de 8 cours.
En termes de puissance, selon Mark Burkels de LeaseWeb, intégrateur-hébergeur et bêta-testeur de Moonshot, basé à Haarlem (Pays-Bas), il ne faut pas s'attendre aux performances d'un serveur G5 de HP avec processeur Intel Xeon : « La puissance de calcul d'un 'serveur cartouche HP ProLiant Moonshot (avec processeur Intel Atom) est de l'ordre de 25 à 30% de celle de la génération 2008 sur Xeon quad-core. Mais le coût global, dont l'énergie et l'encombrement, est divisé par 8 ou 10 ! », explique-t-il.
Et il ajoute : « Cela va nous permettre de remplacer des systèmes lents et gourmands en énergie par des équipements beaucoup plus économiques. » Pour un service d'hébergement de sites web, il prévoit une densité de 400 serveurs par rack, pour un gain de performances de 50% dans l'encombrement voulu et une économie d'énergie de 80%.
'Software defined' ou plutôt configuration par applis.
Le concept de 'Software defined server' avancé par HP n'a pas manqué de susciter questions et commentaires.
Paul Santeler, VP Hyperscale Business à Palo Alto, parle de « cartouches optimisées par types d'applications ». Selon lui, c'est la voie vers le vrai 'software defined server' - comme c'est le cas pour les réseaux (Software defined networking), où, là, il y a bien automatisation de la commutation et du routage des flux de données avec une encapsulation d'informations dans les paquets de données).
Pour y parvenir côté datacenter, « il faut, explique-t-il, des standards ouverts, tels qu'OpenFlow, ce qui permettra de lancer du 'run-time', des fonctionnalités liées aux caractéristiques des 'workloads' (consommation ponctuelle ou non de mémoire cache, de GPU graphique partagé, de mémoire flash) ceci pour accélérer le traitement, garantir la redondance, sécuriser le load balancing, etc. »
Pour le moment donc, les pièces du meccano sont disponibles - dit HP. C'est aux développeurs, aux intégrateurs d'imaginer toutes les possibilités offertes.
« Jusqu'ici, le cycle de développement d'un serveur, avec son chipset, était de 3 à 4 ans. Avec cette modularité en 'cartouches' et la mobilisation de notre écosystème, ce cycle va tomber à moins de 6 mois », explique David Chalmers.
Un appel ou manifeste à l'attention de l'écosystème
HP joue ici une carte stratégique. Ce concept de 'cartouches' spécifiques par utilisation ou par application, très rapidement réplicables en dizaines voire milliers d'exemplaires, change la donne. Certains constatent déjà que le duopole Intel - AMD pourrait voler en éclats. À voir.
Le premier 'cartridge server' HP ProLiant Moonshot disponible utilise le processeur Atom S1200 d'Intel (ou Centerton: cf. l'article:'Intel Atom, Centerton'). C'est un processeur dual-core 64 bits, à 1,6 ou 2GHz - sans équivalent encore chez AMD ou ARM, explique HP. Il sera suivi avant la fin de l'année par un autre modèle Intel Atom, au nom de code Avoton, qui sera en technologie 22 nanos (contre 32 pour le Centerton: cf. article 'Intel et les processeurs Atom').
Lire aussi : IaaS : Google, plus "visionnaire" que les autres ?
Quelles sont les ouvertures ?
« Pour les CPU, nous n'avons pas encore de roadmap officielle. Oui, Intel est le premier à équiper nos 'cartridges servers', mais nous allons progressivement développer les partenariats en fonction des besoins des entreprises : serveurs de mémoire cache, modules accélérateurs, hébergement sur le cloud, etc. Une longue liste est en train de se constituer avec ARM et Calxeda, AMD, Texas Instruments (pour les circuits DSP à l'attention des télécoms, par exemple). Ce sont autant de fonctionnalités qui vont pouvoir s'intégrer. »
Peut-on imaginer que ces différents fournisseurs de CPU ou de chipsets soient associés sur une même cartouche serveur (cf. schéma, ci-contre : agencement du type SoC, System on a chip) ?
« Oui, on peut imaginer diverses combinaisons en termes de solutions mixed & matched, puisqu'il s'agit d'intégrer des fonctionnalités, du CPU, du GPU, FPGA, etc. sur un nouveau format, avec une granularité sans équivalent ailleurs », rétorque David Chalmers.
« On peut, par exemple, imaginer des architectures 'multi-tier' dans un tel châssis Moonshot, même si des phases de test s'imposeront », ajoute-t-il.
'Concierge', un catalogue de services spécifiques
Dans son communiqué, HP évoque une « feuille de route complète portant sur les serveurs HP ProLiant Moonshot optimisés en fonction des charges de travail (workloads) et intégrant des processeurs issus d'un vaste écosystème de partenaires HP, parmi lesquels AMD, AppliedMicro, Calxeda, Intel et Texas Instruments ».
L'écosystème d'innovation HP Pathfinder comprend « près de 25 fabricants de circuits intégrés, développeurs de systèmes d'exploitation et éditeurs de logiciels indépendants (ISV) spécialisés dans le développement rapide de nouvelles cartouches pour prendre en charge des charges de travail variées ».
De fait, AMD a annoncé, pour 2013 sous le nom Kyoto, un chipset avec processeur x86 sur 64 bits, combinant le CPU et le processeur graphique sur la même base silicium.
D'autres systèmes reposeront sur des 'chips' utilisant le design de d'ARM Holdings ARM, provenant, par exemple, d'AMCC (Applied Micro Circuits Corp.) ou Calxeda. De même Texas Instruments devrait introduire un 'chipset' KeyStone, combinant un processeur ARM et des circuits DSP (digital signal processors). Sur ses présentations, HP mêle fabricants de composants et éditeurs, affichant côté à côté les logos de Marvell, d'AMCC (Applied Micro), CouchBase (spécialisate OpenStack), Cavium, Mongo DB, NuoDB.
À noter, enfin, que HP annonce des services spécifiques, baptisés HP Moonshot Concierge : ils incluent les HP Discovery Labs et les solutions de conseil et d'assistance des services HP Technology Services pour la migration des plates-formes et l'efficacité énergétique.
La France est bien placée, puisque le site HP de Grenoble est l'un des deux sites mondiaux où Moonshot est en démo permanente pour les partenaires et grands comptes envisageant, par exemple des 'POC' ou projets pilotes.
Voir aussi
Quiz Silicon.fr - HP : du garage à la multinationale
Sur le même thème
Voir tous les articles Cloud