Guy Mamou-Mani : « remontée du chômage et pénurie de compétences »
Silicon.fr : Le chômage des informaticiens a connu une brusque remontée en juillet et atteint un plus haut depuis 2005. Le tout alors que Syntec Numérique continue à parler de pénurie de compétences. Comment expliquez-vous ce paradoxe ?
G.M.-M. : D'un côté, sur la catégorie des Bac +5, on observe bien un chômage frictionnel, autour de 4 %. Sur ce segment, les entreprises du numérique, qu'on parle de start-ups ou de grandes sociétés de services, ont des difficultés à recruter. Des sociétés comme Open (dont Guy Mamou-Mani est coprésident, NDLR) dépensent des centaines de milliers d'euros par an pour attirer ces profils. C'est bien la preuve que le problème existe. Mais, en parallèle, on observe une remontée du chômage dans les autres catégories, où le niveau de chômage est supérieur à 7 %. On est donc face à la fois à une pénurie de compétences et à un total de 38 000 chômeurs dans nos professions (les chômeurs de catégories A, B et C dénombrés par Pôle Emploi dans la catégorie Systèmes d'information).
Silicon.fr : Ce qui semble indiquer une inadéquation des politiques de reconversion ?
G.M.-M. : Il faut effectivement travailler sur l'employabilité des personnes au chômage. Le catalogue de formations de Pôle Emploi n'est probablement pas adapté aux besoins de nos entreprises. Nous sommes prêts à prendre nos responsabilités sur ce dossier. J'observe d'ailleurs que Syntec Numérique est une des rares organisations engagées auprès des pouvoirs publics sur le sujet. Nous travaillons par exemple à la création d'un centre d'apprentissage du numérique. Lors de notre dernière assemblée générale, j'ai également annoncé des initiatives dans le courant de l'année en faveur des personnes n'ayant pas un Bac +5, voire pas le Bac.
Silicon.fr : Cette hausse du chômage dans le secteur semble indiquer une dégradation des conditions économiques dans le secteur. Etes-vous inquiet pour la fin d'année ?
G.M.-M. : La remontée du chômage dans la profession est en ligne avec les conditions économiques du pays. En 2011 (dernier résultat connu, NDLR), le secteur avait été à l'origine de 15 000 créations nettes d'emplois. Le niveau devrait être bien inférieur cette année. Pour 2013, nous anticipons une stagnation de nos marchés en France, et une légère décroissance (- 1 %) pour les seules sociétés de services. Nous atteindrons au mieux ces niveaux. Les publications récentes de résultats de grands groupes cotés ne m'incitent guère à l'optimisme.
Silicon.fr : Vous êtes récemment monté au créneau pour dénoncer la multiplication des contrôles fiscaux portant sur le Crédit Impôt Recherche. Où en êtes-vous aujourd'hui sur ce dossier ?
G.M.-M. : Tous les jours, je reçois des appels d'une ou deux sociétés qui subissent des contrôles et des redressements fiscaux en raison du Crédit Impôt Recherche. Nous avons saisi les pouvoirs publics et, depuis juillet, une commission tripartite, réunissant le ministère de la Recherche, le ministère de l'Economie et le Syntec Numérique, travaille sur ce sujet.
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Nous reconnaissons la nécessité des contrôles par les services du fisc. Mais, aujourd'hui, ceux-ci reposent sur nombre d'interprétations : activités relevant de la recherche ou non, ouverture du dispositif pour les entreprises travaillant avec les établissements publics, définition de la sous-traitance. Les pouvoirs publics reconnaissent la réalité du problème et une circulaire va être publiée précisant les règles du jeu. Nous demandons notamment que les agents du fisc soient accompagnés, dans leurs contrôles, d'experts issus du ministère de la Recherche. Et nous réclamons un moratoire de six mois du fait du caractère d'urgence de ce dossier pour certaines sociétés, aujourd'hui en difficultés financières du fait du redressement qu'elles ont subi.
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