Commission Copé : les opérateurs taxés jusqu'à 0,9%
C'est ce mercredi que la Commission Copé a remis son rapport sur l'arrêt de la publicité sur le service public et sur les moyens de compenser la perte de chiffre d'affaires. On le sait, cette commission, après quatre mois de « réflexion », ne fait que reprendre les pistes déjà évoquées par le Président Sarkozy en janvier.
Concrètement, la publicité sera suprimée en deux étapes d'ici 2011. Au départ, seuls les spots après 20H disparaîtront des écrans. Du côté du financement, rien de neuf. La redevance pourrait être indexée sur l'inflation, les chaînes privées devront verser une part de leurs chiffre d'affaires publicitaire. Surtout, les opérateurs télécoms et Internet devront passer à la caisse.
La surprise pourrait venir de l'importance de cet effort. Si la commission Copé préconise une taxe de 0,5%, Nicolas Sarkozy s'est prononcé pour une taxe allant jusqu'à 0,9%.
Ainsi revue à la hausse, cette taxe permettrait de dégager jusqu'à environ 380 millions d'euros, contre 210 millions d'euros dans le projet de la commission.
Pour cette dernière, les opérateurs« bénéficiant des images issues du secteur audiovisuel, il est légitime qu'ils y participent financièrement, par une taxe contribuant au fonctionnement de France Télévisions » . La Commission estime également que les revenus conséquents du secteur (42 milliards d'euros) et ses potentiels de développement lui permettent de voir venir.
Une telle taxe ulcère les opérateurs qui se sont réunis en lobby au sein de la FFT, la Fédération française des télécoms. Et les menaces de répercussion de cette hausse sur la facture de l'abonné sont à peine voilées.
« Une taxe qui s'appliquerait au seul secteur des télécoms ne serait pas appropriée (.) car il n'existe aucun lien direct entre la télévision publique et nous », expliquela FFT.
« C'est pourquoi, dans le cas où nos entreprises seraient amenées à supporter une taxation spécifique, elles pourraient n'avoir d'autre choix que de la répercuter sur leurs factures », écrit Frank Esser, président de la FFT. le massage est clair : au final, ce sont les consommateurs qui trinqueront.
« Dans le même temps, les opérateurs taxés seront moins enclins à investir dans le développement des réseaux (très haut débit, fibre optique.) ainsi que dans leurs opérations de communication, eux-mêmes figurant parmi les plus importants des annonceurs publicitaires », commente de son côté l'IAB, l'Internet Advertising Bureau..
En janvier dernier, Julien Allisy, directeur marketing du MVNO Virgin Mobile nous confiait déjà : « Commencer à nous taxer, ne serait-ce que d'1%, pourrait remettre en cause la santé financière de tout un secteur. Cette taxe irait en fait à l'encontre de la raison d'être des MVNO, c'est à dire générer plus de concurrence. Les MVNO ont déjà assez à faire avec la concurrence acharnée des opérateurs de réseau, si on nous rajoute une taxe, les plus faibles disparaîtront. Une augmentation des tarifs peut faire partie des mesures que l'on pourrait mettre en place. Il faudra bien compenser l'impact de cette taxe sur notre business ».
Mais pour Jean-François Copé, les menaces d'augmentation de tarifs sont de la poudre aux yeux. « Quoi qu'ils disent, chacun sait qu'ils sauront trouver les mots pour être commercial (.) il y a une grande concurrence entre les uns et les autres », a-t-il insisté.
La mesure inquiète également la Commission européenne qui travaille depuis des années à faire baisser la facture télécoms des foyers. Bruxelles se dit « peu enthousiaste »au projet, ce qui veut dire carrément hostile. Et pourrait taper du poing sur la table si ces propositions se transforment en projet de loi.
« Une première réaction initiale de Viviane Reding, la commissaire responsable pour les médias, n'est pas enthousiaste », a commenté mardi le porte-parole de la Commission, Martin Selmayr, ajoutant que la Commission européenne« n'est pas en faveur d'un nouvel impôt sur les secteurs qui sont moteurs de la croissance » comme les nouveaux médias.
Une position balayée par Copé.« La législation européenne n'est pas une législation qui dans ce domaine peut interdire », a-t-il dit sur LCI.« Elle peut à juste titre exprimer des réticences si c'était une taxe gigantesque et à ce moment-là s'y opposer. Mais c'est au contraire une toute petite taxe qui porte sur le chiffre d'affaires à un taux qui est faible », a-t-il expliqué.
Enfin, la Commission pourrait créer une redevance spéciale pour ceux qui regardent la TV sur leurs PC et qui ne possèdent pas de téléviseurs (ils échappaient jusqu'à aujourd'hui à l'impôt). On peut se demander comment sera appliquée cette redevance.
Selon Jean-François Copé, qui présidait cette commission de parlementaires et de professionnels de l'audiovisuel, le texte devrait être co-produit par l'exécutif et le législatif au cours de l'été et être présenté à l'Assemblée nationale à la rentrée.
Le président du groupe UMP à l'assemblée a dit sa volonté d'en être le rapporteur et a indiqué début juin qu'il espérait que la loi soit votée et les décrets d'applications publiés avant fin 2008.
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