Dégroupage total: les tarifs sont remis en question!
Dure semaine pour l'ART! L'Autorité de Régulation des Télécoms a été mise en difficulté par le Conseil de la Concurrence et le Conseil d'Etat sur deux dossiers sensibles: -le prix du dégroupage total, -la régulation du marché naissant de la voix sur IP (téléphonie sur Internet).
Le premier dossier concerne donc le dégroupage total qui permet de supprimer l'abonnement France Télécom obligatoire lorsqu'on souhaite accéder à l'ADSL. Sujet ultra sensible pour la concurrence. Et là, c'est le grand « n'importe quoi »! Le Conseil d'Etat a été invité ce vendredi 18 février par le gouvernement à annuler une décision de l'ART fixant les tarifs du dégroupage total prise en 2002. La commissaire du gouvernement chargée de dire le droit, Emmanuelle Prada Bordenave, a rappelé que l'ART avait fixé le tarif du dégroupage total à 10,50 euros alors que France Télécom demandait un prix proche de 14 euros. France Télécom, à l'origine de la saisine devant le Conseil d'Etat, estime que le gendarme du secteur a modifié son assiette en cours de route. Le gouvernement lui donne raison et appelle le Conseil d'Etat à se ranger derrière son avis. La décision finale est attendue dans 15 jours. Cette affaire concerne les anciens tarifs du dégroupage total. Car trait très amusant dans cette histoire, c'est que l'ART a autorisé récemment France Télécom à relever le prix de l'abonnement téléphonique mais a demandé et obtenu en contre-partie une baisse du prix de dégroupage total à 9,50 euros par ligne et par mois -tarif que l'opérateur national a accepté. Soit un euro de moins que le prix aujourd'hui contesté. Si France Télécom obtenait gain de cause, il pourrait réclamer des facturations rétroactives aux opérateurs pratiquant le dégroupage! Le montant a été évalué à environ 60 millions d'euros. Un « scandale » pour la concurrence qui dénonce le double langage de France Télécom. Mais si l'ancien tarif est annulé, quel sera alors la valeur du dernier tarif adopté? La commissaire au gouvernement a la réponse: elle a implicitement enjoint à l'ART de fixer très vite de nouveaux tarifs, et pourquoi pas les mêmes. Deuxième dossier sensible dans lequel une décision importante est contestée: la téléphonie sur Internet. L'ART estime que la VoIP ne doit pas être régulée -une position identique à celle la FCC aux Etats-Unis. Dans un avis rendu en décembre, le régulateur expliquait que la VoIP, lorsqu'elle est intégrée à des offres de FAI (Free, Neuf Telecom, Tiscali.) n'est pas assimilable à la téléphonie fixe classique. Les obligations pesant sur la voix traditionnelle ne s'appliqueraient donc pas à la VoIP. Par ailleurs, l'ART soulignait que ce marché est encore émergent. Dans un avis, le Conseil de la concurrence estime au contraire que ce marché a besoin d'une régulation. « Tant du point de vue de l'utilisateur que de celui des opérateurs, les services de voix sur large bande (VoIP) pourraient se présenter très rapidement comme un substitut crédible aux services de téléphonie fixe traditionnelle », indique le Conseil. Tout comme les opérateurs alternatifs, le Conseil craint un renforcement du monopole de France Télécom. L'opérateur historique, grâce à la prochaine apparition des accès ADSL « nus » (sans abonnement de base à France Télécom) pourrait en effet reconquérir des abonnés de téléphonie « fixe » en proposant des formules ADSL + VoIP. Il échapperait aux lois de la régulation, très sévères pour la téléphonie fixe classique. « Si les accès ADSL ont, dans un premier temps, été mis à disposition des utilisateurs uniquement pour l'accès à Internet, puis en supplément pour des offres de télévision ou de téléphonie, aucun obstacle technique ne s'oppose à ce que le service VoIP soit proposé seul sur accès ADSL », considèrent les Sages dans leur avis. Conclusion: une absence de régulation pourrait « entraîner des distorsions de concurrence sur le marché de détail des communications fixes. Et favoriser des pratiques de reconquête de clients par France Télécom ». D'un autre côté, certains FAI se demandent comment pourrait être régulé équitablement ce marché. En effet, comment évaluer le poids réel de la VoIP dans les offres 'triple play' (téléphone, Internet, TV-vidéo) des fournisseurs d'accès?
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