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Haut débit : la fibre, point faible du futur service universel ?

Dans le cadre de sa réflexion sur le futur service universel « version haut débit », l'Arcep réaffirme sa circonspection quant à certains pans du déploiement de la fibre en métropole.

Publié par Clément Bohic le - mis à jour à
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Haut débit : la fibre, point faible du futur service universel ?

Sauf à souscrire un accès par satellite, plus de 400 000 logements de la zone AMII n'auront toujours pas accès au haut débit fin 2020. L'Arcep le soulignait dans un avis rendu en décembre dernier. et qu'elle vient de publier. En ligne de mire, l'évolution du service universel. Celui-ci verra son périmètre modifié avec l'entrée en vigueur du nouveau Code européen des communications électroniques. Au service téléphonique s'ajoutera l'accès au haut débit.

Le gendarme des télécoms envisage un indicateur de débit évolutif pour caractériser le futur service universel. Le point de départ serait à 8 Mbit/s descendants. Il pourrait ensuite évoluer vers les 30 Mbit/s - seuil qu'on qualifie aujourd'hui de « très haut débit ».

Pour dresser un état des lieux prévisionnel, l'Arcep s'est appuyée sur les données de son site « Ma connexion internet » et de sa carte des déploiements fibre. Elle y a associé les intentions de déploiement des opérateurs et des collectivités. Selon ses estimations, à fin 2020, 2 % des locaux sur le territoire ne pourraient prétendre à au moins 8 Mbit/s, hors réseaux hertziens spatiaux.

Et 28 % n'atteindraient pas les 30 Mbit/s. Taux qui passerait à 19 % fin 2021, à 14 % fin 2022, puis à 10 % fin 2023.

Zone AMII : des opérateurs trop gourmands ?

Environ un tiers des quelque 900 000 locaux « inéligibles » aux 8 Mbit/s à fin 2020 se situent dans des zones d'initiatives publiques (RIP et AMEL). Pour beaucoup, la 4G fixe se présente comme la meilleure technologie terrestre pour bénéficier du haut débit. Mais elle induit des risques de saturation, un abonné consommant en moyenne 10 fois plus de données qu'un client 4G mobile.

Les ZTD (zones très denses) regroupent près de 200 000 de ces locaux « inéligibles ». Sans obligation réglementaire de complétude, l'Arcep estime qu'il pourrait falloir encore trois ans pour parvenir à une couverture totale.

Qu'en est-il de la zone AMII (appel à manifestation d'intention d'investissement) ? Elle résulte d'une procédure qui remonte à 2010. Les quelque 3600 communes qu'elle englobe en territoires urbains et périurbains totalisent 13,7 millions de locaux. Deux opérateurs se sont positionnés. Orange, sur 11,1 millions d'entre eux ; Altice/SFR, sur le reste. Le premier avait promis, pour fin 2020, au moins 92 % de logements raccordables et le reste « sur demande » ; c'est-à-dire dans les 6 mois après sollicitation. Altice/SFR avait annoncé les mêmes seuils. Leurs engagements sont juridiquement opposables.

Dans la pratique, les deux opérateurs sont en retard. La dernière vague de l'observatoire trimestriel des marchés des communications électroniques l'illustre. Fin 2020, Orange en était à 76 % de locaux raccordables ; SFR, à 91 %. À cette cadence, considère l'Arcep, le haut débit ne pourra être généralisé dans cette zone que fin 2022.

Tarifs sociaux : l'enjeu du passage au haut débit

S'agissant du service universel, l'Arcep finalise actuellement des décisions de régulation pour les marchés de gros. Elle prévoit deux obligations pour les opérateurs d'infrastructure. D'un côté, publier les indicateurs de qualité de service de leurs offres. De l'autre, respecter des seuils de qualité que fixera l'Autorité. Orange aura quant à lui à publier ses résultats en matière de QoS pour ses offres régulées, notamment le dégroupage cuivre.

Le mécanisme des tarifs sociaux suscite aussi la réflexion. À l'heure actuelle, Orange, seul opérateur de service universel, applique le principe d'une réduction fixe. Son offre, vendue 6,49 ? TTC par mois, fournit un accès Internet 56 k. Fin 2018, elle comptait 55 600 clients sur 3,7 millions potentiels. Assez pour démontrer, selon l'Arcep, sa faible pertinence, qui s'ajoute à des démarches administratives complexes.

Le nouveau code européen semble privilégier un service universel proposé par tous les opérateurs. Il laisse, en outre, la possibilité d'un tarif social fixe ou d'une réduction fixe.
Cette dernière option pourrait engendrer des écarts de prix importants selon les technologies disponibles et les opérateurs présentes sur ces technologies. Et si d'aventure on calibrait la réduction, cela soulèverait un risque d'effet d'aubaine pour les clients, tout en élevant potentiellement le coût du dispositif.
Effet d'aubaine il y aurait aussi avec un tarif fixe, mais pour les opérateurs. En l'occurrence, ceux dont le tarif de détail et/ou le coût de production est élevé.

Ces considérations, entre autres, ont conduit l'Arcep à envisager un mécanisme de désignation d'un seul opérateur de service universel, par l'intermédiaire d'un processus de type enchères, avec un montant de compensation souhaité par client.
Sur les 18 homologues européens qui lui ont répondu, 6 ont déclaré pratiquer des tarifs sociaux. Seule la Roumanie a opté pour un système à plusieurs opérateurs.

Illustration principale © brixendk / CC BY 2.0

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