L'informatique d'Etat emploie en moyenne 2 500 prestataires
Un rapport du Sénat apporte un peu de transparence sur le recours aux prestataires dans l'informatique de l'Etat. Ceux-ci représentent 12% des effectifs IT totaux. Le vrai problème se situerait plutôt dans la valorisation des carrières d'informaticiens du secteur public.
18 500 agents chargés des systèmes d'information de l'Etat et, en moyenne, 2 500 prestataires les aidant. Un rapport de la commission des finances du Sénat donne une photographie des effectifs des informaticiens de la fonction publique centrale, et de leur répartition. Premier constat : deux ministères phagocytent l'essentiel des forces : l'Economie et les finances (6 300 personnes) et l'Intérieur (5 900). Soit les deux tiers du total à eux deux. Avec ses 2 400 informaticiens, l'Education nationale fait, en comparaison, presque figure de nain.
Pour l'instant, ces informaticiens (à 40 % en catégorie A, soit les ingénieurs ; à 46 % en catégorie B, les techniciens, et à 14 % en catégorie C) appartiennent à 90 cadres d'emploi différents. « Un frein important à la mobilité des informaticiens » et un facteur qui « limite l'attractivité de l'Etat pour ces profils », regrette le rapport, rédigé par Michel Canevet, sénateur UDI. Qui souligne les effets positifs que devrait avoir à terme la création d'un corps interministériel des ingénieurs informaticiens, sous l'impulsion de la Dinsic, la DSI de l'Etat.
Un ingénieur sur 3 est un contractuel
Il n'en reste pas moins que cet émiettement des statuts pousse au recours à des contractuels, qui représentent 10 % des emplois dans le domaine (30 % pour les ingénieurs). Au sein des services du Premier ministre, la proportion atteint même 87 % ! A la Culture et la Justice, plus d'un poste sur deux au sein de la DSI est occupé par un contractuel. « Si la présence de contractuels n'est pas, en soi, un handicap, le cadre d'ensemble (absence de mobilité et de carrière) ne semble pas favoriser le recrutement. Se pose en effet la question de la capacité de l'État à attirer et à conserver les meilleurs profils », note le rapport.
D'où le recours fréquents à des prestataires. Parfois insuffisamment encadrés, comme l'avaient montré les analyses post-mortem des projets ONP (Opérateur national de paie, censé centraliser la paie des fonctionnaires, un projet arrêté en 2014) et Louvois (gestion de la solde des militaires, application vouée à être remplacée). Le rapport de Sénat se base sur les dépenses annuelles en prestations intellectuelles de l'Etat (460 millions d'euros) pour établir un chiffre moyen de prestataires travaillant pour les ministères. Sur la base d'un coût journalier moyen de 750 euros TTC, le budget annuel représente 2 500 équivalents temps plein. Soit environ 12 % des effectifs totaux impliqués sur les sujets informatiques. Pas forcément disproportionné par rapport aux équilibres des grandes DSI du secteur privé, même si cette moyenne cache probablement de grandes disparités (avec un poids plus important de la prestation sur les projets, notamment).
Fonction support pour les ministères
Mais, pour la Dinsic, interrogée dans le cadre de ce rapport, le vrai problème est ailleurs : tout simplement dans la méconnaissance des carrières informatiques au sein de l'administration. Ce qui freinerait « les stratégies d'évolutions des compétences, la mutualisation de certaines expertises rares et la formation des agents ». Un signe qui ne trompe pas et que souligne le rapport : les DSI des ministères seraient souvent limités à des grades de sous-directeurs. « Trop souvent, les DSI ministériels se retrouvent en position de maîtrise d'oeuvre de projets dont l'ampleur et les contours ont été fixés sans mesure des impacts techniques, technologiques ou mêmes organisationnels», explique la Dinsic dans le rapport. L'image de l'informatique comme fonction support aurait la vie dure dans les ministères. Avec des conséquences très concrètes sur les projets mais aussi sur le recrutement. Selon la DSI de l'Etat, 12 % des postes d'ingénieurs informaticiens de la fonction publique sont vacants. Soit 600 emplois qui ne trouvent pas preneur.
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