Le numérique est une priorité de la « nouvelle France industrielle »
Promues par Arnaud Montebourg, les 34 priorités industrielles françaises dévoilées jeudi 12 septembre par le président de la République François Hollande font la part belle au numérique.
Fruit d'un travail d'un an mené au sein du ministère du redressement productif avec le soutien du cabinet McKinsey, ce plan de « reconquête industrielle » cible les filières les plus prometteuses. Il vise à accélérer la création d'emplois et à augmenter la part de l'industrie dans le PIB français. Il sera financé par l'État et le secteur privé.
La « nouvelle France industrielle » telle que la rêve l'exécutif français s'appuie sur trois axes stratégiques : la transition énergétique et environnementale, la santé et le numérique : des logiciels au Big data, en passant par le Cloud et les objets connectés.
Logiciels, Cloud et Big data
Le gouvernement veut « construire la France de l'intelligence des objets et des systèmes » en consolidant le secteur et soutenant l'innovation « pour faire émerger des entités puissantes et exportatrices », en particulier dans l'édition de logiciels embarqués.
De son côté, le Big data est à la fois un enjeu stratégique, celui de la « souveraineté numérique » à travers le traitement et la protection de données massives, et économique : la création de valeur liée aux Big data à l'horizon 2020 étant estimée à 8% du PIB européen. La France possède dans le domaine de nombreux atouts : « ses talents en mathématiques et en informatique, son tissu d'entreprises numériques, comme par exemple Talend, Criteo, Capgemini, Atos ou Exalead/Dassault Systèmes », souligne le ministère.
Bercy, qui a lancé un plan Big data en début d'année, veut faire de la France « la référence mondiale dans ce domaine » en levant les freins au développement du secteur. Le plan couvre la formation de « data scientists », l'ouverture d'un centre de ressources technologiques pour accélérer la croissance des start-ups, le soutien à la R&D et le financement de fonds d'amorçage dédiés.
Le Cloud Computing constitue aussi un enjeu stratégique (stockage, protection et sécurité des données) et économique. Ce marché a généré plus de 2 milliards d'euros en France en 2012 et sa croissance est estimée à 25% par an (source : IDC). La France, qui a investi dans Cloudwatt et Numergy, possède d'autres références en la matière, dont OVH et Gandi. Le gouvernement veut soutenir le renforcement de l'offre dans ce secteur, accompagner les éditeurs de logiciels dans le passage de leur offre en SaaS et structurer la filière.
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Du calcul intensif à l'usine du futur
La France veut également se donner les moyens de devenir une référence en matière d'objets connectés et de puissance de calcul. Le pays dispose d'ailleurs d'acteurs nationaux couvrant toute la chaîne de valeur de la simulation numérique, dont Dassault Systèmes, leader mondial de la simulation et de la conception assistée, et Bull, actif dans le domaine des supercalculateurs.
Il en est de même pour la sécurité numérique avec des entreprises comme Cassidian, Thales ou encore, dans la carte à puce, Gemalto et Oberthur. Le gouvernement veut donc mettre en place « des projets vitrine de déploiement de solutions de cybersécurité » et promouvoir l'ANSSI (Agence nationale de sécurité des systèmes d'information).
Enfin, le numérique est au cour de « l'usine du futur » qui associe prototypage, hyperconnexion des entreprises, interfaces homme-machine, robotique, réalité augmentée, impression 3D, intelligence artificielle et design.
Le soutien de la filière numérique
Colbertisme 2.0 ? Le plan pour une « nouvelle France industrielle » a été salué par l'industrie du numérique.
« Avec ces 34 plans, qui font la part belle au numérique, le Président de la République et le ministre du redressement productif ont envoyé un signal très positif à l'industrie et ouvert de vraies perspectives pour la croissance et l'emploi » a déclaré à la rédaction Jamal Labed, président de l'Association française des éditeurs de logiciels et solutions Internet (AFDEL).
« Toutes les technologies clés ont été citées, notamment le Big data qui mobilise fortement l'AFDEL. L'Association a travaillé de près avec la ministre de l'Économie numérique Fleur Pellerin sur l'élaboration d'un plan national depuis plusieurs mois » a-t-il ajouté. Jamal Labed a aussi rappelé la nécessité de « garantir un environnement, notamment fiscal et réglementaire, le plus propice possible à l'éclosion de ces révolutions ».
De son côté, le syndicat professionnel Syntec Numérique présidé par Guy Mamou-Mani a salué une initiative qui place le numérique au cour « de la transformation de toute l'industrie ».
La bataille du « Made in France »
Les 34 projets, dont l'état d'avancement sera vérifié tous les six mois, vont être animés par des chefs de projet issus du mode industriel. Pour financer ces projets, l'État se déclare prêt à investir 3,7 milliards d'euros, notamment par le biais des investissements d'avenir, et constituer un puissant effet de levier sur l'investissement privé.
Selon les estimations du cabinet McKinsey, ces actions pourraient se traduire par la création ou le sauvetage de 480.000 emplois industriels en dix ans. Le plan pourrait dégager 45 milliards d'euros de valeur ajoutée sur la période, dont près de 40% à l'export.
Sans surprise, le ministre du redressement productif, qui met l'accent sur des projets conjuguant « action publique et initiative privée », juge l'initiative « réaliste et très volontaire ». Guillaume Cairou, président du Club des Entrepreneurs, reste sceptique.
« Arnaud Montebourg nous indique que ces projets doivent créer 475.000 emplois en 10 ans sauf qu'il faut mettre en face les 750.000 emplois industriels perdus dans les dix dernières années », a-t-il déclaré. Il ajoute qu'une partie des investissements d'avenir est simplement « réorientée vers l'industrie » et regrette que le budget ne soit pas consacré « à la baisse de la fiscalité des entreprises ».
Le ministre balaie la critique et déclare vouloir « redonner le goût de l'industrie et de l'innovation ». Pour Arnaud Montebourg : « engager la bataille du Made in France, c'est d'abord croire en nous-mêmes. C'est poser un regard résolument optimiste sur les capacités de notre pays à se redresser ».
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