Les 13 travaux numériques de la SNCF
Maintenance prédictive, digitalisation des infrastructures, e-commerce… Le groupe ferroviaire consacre 2 milliards € par an au numérique pour améliorer l’expérience voyageur et optimiser le trafic sur ses lignes. Tour d’horizon de 13 projets innovants.
La SNCF est-elle devenue une entreprise tech comme les autres ? La question peut se poser au regard des chantiers ouverts par le groupe ferroviaire. L’e-commerce avec SNCF Connect, premier site marchand français, n’est que la partie émergée de l’iceberg.
Le numérique irrigue l’ensemble de ses métiers, de la maintenance des trains à la régulation
« intelligente » du trafic en passant par l’information voyageur ou l’exploitation des gares.
« Si on veut rester le leader des mobilités, il n’y a pas le choix que d’être un leader de la tech », martèle Christophe Fanichet, à la fois PDG de SNCF Voyageurs et directeur général adjoint au numérique du groupe SNCF. Les chiffres parlent d’eux-mêmes. La SNCF consacre un budget de 2 milliards d’euros par an au numérique, soit près de 5 % de son chiffre d’affaires. 4 550 cheminots travaillent à la transformation digitale du groupe public et 700 recrutements sont attendus cette année.
Les ambitions sont à la hauteur de cet investissement. Ouvrant la « Keynote numérique », qui s’est tenue le 8 février au siège social de Saint-Denis, Jean-Pierre Farandou, président du groupe SNCF, affiche des objectifs élevés. Avec les progrès en matière de maintenance prédictive, il espère atteindre le « zéro panne d’ici il y a une dizaine d’années ».
Le numérique doit également permettre d’augmenter la régularité des trains de 3 ou 4 points ou d’économiser 10 à 15 % de la consommation énergétique des rames grâce à l’écoconduite.
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Pour démontrer le bien fondé de sa stratégie digitale, la SNCF a ouvert le capot de son usine numérique pour dévoiler 13 projets innovants qu’elle juge emblématiques.
Digitaliser les postes d’aiguillage
La modernisation du réseau ferroviaire français passe par le déploiement de l’ERTMS (European Rail Traffic Management System), un système unifié européen de gestion de la circulation des trains, qui doit permettre de réduire l’intervalle entre deux trains, et donc augmenter la fréquence.
La SNCF se prépare à ce grand chantier en commençant par le déploiement d’une nouvelle génération de postes d’aiguillage digitalisés, baptisés Argos. Pilotables à distance depuis les tours de contrôles que sont les Commandes centralisées du réseau (CCR), les responsables d’exploitation peuvent optimiser la régulation du trafic et faire ainsi circuler plus de trains sur une même ligne. L’axe Marseille-Vintimille bénéficie déjà de cette avancée.
Avec l’écoconduite, jusqu’à 12 % de consommation d’énergie
Adopter un comportement vertueux au volant permet à un automobiliste de diminuer sa consommation de carburant, il en va de même des conducteurs de train.
Ancien conducteur lui-même, Didier Stewart a développé un logiciel indiquant au cheminot la vitesse idéale à adopter pour réduire la consommation d’énergie de son train tout en respectant les horaires d’un trajet.
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Ce programme dit Opti Conduite se base sur les caractéristiques du réseau – rayons des courbures, pentes, puissance des caténaires… – et sur celles du train – sa longueur, sa masse, sa capacité de freinage et d’accélération… La consommation d’énergie du train peut être ainsi réduite jusqu’à 12%. L’écoconduite prolonge, par ailleurs, la durée de vie du matériel roulant tout en améliorant le confort des voyageurs.
Des gares (enfin) intelligentes
Ascenseurs, escaliers mécaniques, portes automatiques… Une gare comprend un grand nombre d’équipements qui ont la fâcheuse tendance à tomber en panne. Smart Station est un outil de supervision centralisée de tous ces matériels connectés. En connaissant en temps réel l’état de fonctionnement, les agents de maintenance peuvent intervenir rapidement en cas de dysfonctionnement.
Les bénéfices sont multiples : optimisation de la maintenance, réduction des coûts d’entretien, amélioration de la satisfaction client, optimisation de la performance énergétique. 650 gares sont déjà équipées et 700 devraient l’être. Soit, à terme, 6 000 objets connectés déployés et 800 millions de données traitées.
En 2024, Smart Station s’étendra au suivi de la consommation d’eau et à au monitoring des installations d’éclairage, de chauffage, de ventilation et de climatisation.
Anonymiser les données des caméras de surveillance
Comment exploiter les flux vidéo des caméras présentes dans les gares et les trains sans sacrifier aux enjeux de sécurité et de respect de la vie privée ? Avec le projet TNI (Traitement numérique des images), la SNCF entend avoir une exploitation éthique de cette masse de données visuelles.
Avec TNI (Traitement numérique des images), la SNCF développe une exploitation éthique des données visuelles.
Elle a développé pour cela une IA qui supprime tous les attributs biométriques ou personnels qui caractérisent un individu – son visage, son corps, sa démarche – pour le transformer en une sorte de « halo ».
Cette anonymisation ne rend toutefois pas l’information obsolète. Cette dernière sert à connaître une affluence en temps réel en gare, à détecter des mouvements de foule ou à lutter contre le fléau des bagages abandonnés.
Un traducteur automatique en prévision des JO
En gare ou à bord des trains, les agents de la SNCF doivent répondre aux questions de voyageurs stressés et pressés – ils en ont l’habitude – mais aussi parlant les langues du monde entier. Hébergée sur leur smartphone professionnel, l’application multilingue « Trad SNCF » va leur servir de tour de Babel mobile.
Le voyageur pose sa question dans sa langue natale qui est traduite automatiquement en français par le moteur d’intelligence artificielle. Inversement, l’agent répond en français et sa réponse est traduite à l’écrit ou à l’oral dans le dialecte du voyageur.
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Le moteur qui reconnait 130 langues a été entraîné avec le vocabulaire propre à la SNCF et au contexte ferroviaire (index du nom des gares, par exemple). Testé lors de la coupe du monde de Rugby, ce traducteur automatique sera fort utile lors des prochains Jeux Olympiques de Paris avec 15 millions de voyageurs de plus de 200 destinations attendus.
Trois nouveaux services pour SNCF Connect
Depuis son lancement chaotique il y a deux ans, SNCF Connect s’est remis sur les rails et a trouvé son public avec 15 millions d’utilisateurs et 43 % de billets vendus de plus que du temps de feu OUI.sncf. Le premier site d’e-commerce français s’est enrichi récemment de trois nouveaux services.
Comme son nom l’indique, l’alerte « Train complet » répond à la frustration du voyageur confronté à un train complet. Celui-ci est placé dans une liste d’attente et est informé lorsqu’une place se libère. Il dispose alors d’un créneau qui oscille, en fonction de la date de départ de son train, entre 10 minutes et 2 heures pour finaliser la réservation. Depuis décembre et la mise en service de cette alerte, 84% des voyageurs inscrits ont eu la possibilité d’acheter une place qui s’était libérée.
JustGo permet cette fois de monter à bord sans billet. L’application SNCF Connect détecte la gare de départ d’un voyageur puis celui renseigne la gare où il descend. Il est alors facturé à la fin du mois sur la base de la distance parcourue et de la tarification la plus avantageuse. Depuis septembre, les voyageurs du réseau TER en Nouvelle Aquitaine bénéficient de ce service.
Enfin, SNCF Connect a développé depuis un an, avec la start up française Airweb, une offre de mobilité urbaine « enrichie ». Sur plus de 2 000 communes couvertes, l’application permet d’acheter un billet de bus ou de tram de l’un des trente réseaux de transports locaux. Une offre multimodale qui répond à la promesse d’aller jusqu’au dernier kilomètre.
Un ChatGPT made in SNCF
La SNCF ne pouvait pas passer à côté du phénomène de l’IA générative. Le groupe ferroviaire a développé son propre outil qu’elle met à disposition de ses agents sous forme d’instances dédiées et sécurisées. Evolutif, SNCF Groupe GPT intègre différentes grands modèles de langage (LLM) comme ChatGPT d’OpenAI ou Claude d’Anthropic et des tests sont actuellement menés sur le français Mistral.
Classiquement, l’IA générative permet de lire, analyser ou générer des textes ou des images, en attendant la voix et la vidéo. Elle est ouverte aux cadres dirigeants, aux métiers de la finance, de la communication, du marketing ou de l’IT et prochainement aux directeurs d’établissements.
La SNCF dispense parallèlement des formations à l’IA Gen à travers sa « prompt académie » et son réseau de labs 574.
S.DOT, le système d’exploitation du train
S.DOT (Service Digital On Train) est une plateforme ouverte qui regroupe un ensemble de services proposés à bord des trains. Cela concerne la sûreté des voyageurs et du personnel roulant grâce à des systèmes de vidéoprotection, ou d’enregistrement vidéo de la voie, ou le système d’information voyageur diffusé via le wifi embarqué.
S.DOT fournit aussi une aide aux exploitants en proposant, par exemple un dispositif de comptage automatique des voyageurs qui montent dans le train. Aujourd’hui, plus d’une centaine de rames TER sont équipées de la solution SDOT. A terme, et au gré des programmes de rénovation, ce sont près d’un millier de rames en France et au Luxembourg qui bénéficieront de ces services innovants.
La 5G industrielle déployée dans les technicentres
Répartis sur tout le territoire, les technicentres de la SNCF sont chargés de la maintenance du matériel roulant. Ils se voient progressivement couverts par la 5G qui, en substituant au wifi, apporte un certain nombre de cas d’usage. Couplée à l’intelligence artificielle, la 5G améliore le quotidien de agents de production, en les soulageant des tâches pénibles.
Au technicentre de Rennes, des robots mobiles autonomes (AMR) assurent, par exemple, la manipulation de pièces détachées pour les matériels de frein. Associée à la reconnaissance visuelle (computer vision), la 5G permet de réaliser un contrôle qualité afin de s’assurer de la bonne conformité des pièces.
La data au service de l’écomobilité
Lancé en 2022 par Hove, une filiale de Keolis, Patterns CO2 est un outil permettant de suivre et comparer, sur un territoire donné, l’empreinte carbone des différents moyens de mobilité proposés, qu’il s’agisse des transports en commun, de la voiture individuelle ou du vélo.
En exploitant les données GPS des smartphones du grand public, les algorithmes de la solution déterminent les points de départ et d’arrivée d’un individu, la durée du parcours ou le moyen de transport utilisé. Sur la base de ces métriques, les décideurs locaux peuvent évaluer si leur offre de mobilité atteint les objectifs de réduction de gaz à effet de serre. Les métropoles du Grand Nancy et de Rennes utilisent cet observatoire.
Une calculette pour mesurer son empreinte carbone
Application à destination des cheminots, Mon e.Carbone mesure leur bilan carbone numérique à partir de leur usage du matériel mis à leur disposition, ordinateur ou smartphone, du volume de données stockées (mails, documents) ou du nombre d’impressions.
A partir de ce bilan environnemental, l’application donne quelques préconisations pour un comportement plus vertueux comme supprimer des e-mails anciens ou volumineux ou des fichiers en doublon.
A l’échelle du groupe, un stockage écoresponsable reviendrait à 3 000 tonnes d’équivalent CO2 évités. La SNCF a placé cette application en open source afin qu’elle puisse être déployée dans d’autres organisations.
Le fret ferroviaire versus le transport routier
A nous de vous préférer le train… Encore faut-il le démontrer. Développée par Captrain France, filiale de Rail Logistics Europe, le pôle fret et logistique ferroviaire de la SNCF, la solution CapGreen collecte et analyse les données de trafic de ses entreprises clientes.
CapGreen collecte et analyse les données de trafic de ses entreprises clientes du pôle fret et logistique ferroviaire de la SNCF
Ce qui lui permet de comparer pour un transport de marchandises donné de X palettes, quels sont les coûts à prévoir selon que celui-ci emprunte la route ou la voie ferrée.
CapGreen calcule aussi l’équivalent en CO2 évité, les émissions de particules, les risques d’accidentologie ou les nuisances sonores associés à l’un ou l’autre mode de transport.
Mettre en relation expéditeurs et transporteurs
Proposée cette fois par Geodis, Upply est une place de marché qui vise à fluidifier la supply chain en mettant en relation les expéditeurs et les transporteurs. L’entreprise cliente dépose sur la plateforme sa demande de transport de marchandises et elle se voit proposer une sélection de transporteurs référencés avec le coût associé et le volume d’émissions en CO2.
De son côté, le transporteur fixe ses conditions et sécurise sa trésorerie (paiement à J+7). Accessible en France, en Espagne, en Allemagne et en Belgique, la plateforme devrait être déployée en Italie d’ici avril 2024 puis dans d’autres pays européens d’ici fin 2025.
Images illustration : © SNCF
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