Montebourg : «Le retour à 3 opérateurs mobiles reste d'actualité»
Arnaud Montebourg était entendu, mercredi soir, par les commissions des affaires économiques et des finances*, aux côtés de la toute récente secrétaire d'Etat au Numérique Axelle Lemaire. La situation du secteur des télécoms constituait évidemment le sujet central de l'intervention du ministre de l'Économie, du Redressement productif et du Numérique au lendemain du rachat de SFR par Numericable.
Aucune consolidation
Rappelons que le ministre, dont les fonctions étaient alors à l'époque «limitées» au Redressement productif, s'était ouvertement prononcé en faveur de Bouygues pour le rachat de SFR. Principalement (et officiellement) pour des raisons de concentration du secteur mobile et des questions de solidité financière face aux investissements nécessaires à la construction, par le secteur privé, de l'infrastructure très haut débit (THD) de la France. « C'est pourquoi nous nous sommes inquiétés de la vente de SFR à Numericable car elle ne procède à aucune consolidation laissant subsister 4 opérateurs et que Numericable fait dans le câble, pas la fibre. Or, le câble c'était il y a 15 ans, la fibre c'est pour les 40 prochaines années », a déclaré Arnaud Montebourg.
Le ministre a rappelé les objectifs du gouvernement en matière de THD?: 50% des foyers couverts en 2017, 100% en 2022, avec 80% de la population desservie par la fibre à domicile. Or « les opérateurs tirent la langue pour équiper le pays. Si ce ne sont pas les opérateurs, ce sont les contribuables qui paieront. »
Reconcentrer, reconsolider
Pour éviter d'en arriver à cette situation, « le gouvernement veut reconcentrer, reconsolider. » Autrement dit, faire fusionner Free et Bouygues Telecom. « On peut se demander quel sera leur avenir s'ils ne fusionnent pas, ce qui ne semble pas d'actualité », a indiqué le ministre malgré les informations évoquées en début de semaine.
Les engagements de Drahi
Néanmoins, Arnaud Montebourg dit avoir, courrier à l'appui, obtenu de Patrick Drahi, le patron d'Altice (proriétaire de Numericable) avec lequel il s'est entretenu mardi 8 avril, « un certain nombre de choses ». A commencer par le maintien de l'emploi dans le nouvel ensemble qui devrait compter plus de 10?500 salariés (2000 de Numericable et 8500 de SFR) et continuera de recruter des ingénieurs commerciaux pour développer le marché de l'entreprise.
En matière d'investissements, Patrick Drahi a répété que les objectifs du plan THD du gouvernement seraient respectés puisque SFR-Numericable prévoit de relier 12 millions de foyers d'ici 2017 et 15 millions en 2020. Sans préciser pour autant la part du câble (coaxial en bout de réseau) et de la fibre (FTTH) de ce réseau densifié qui servira également les entreprises et assurera l'interconnexion pour la 4G et la future 5G.
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Investissements réduits dans les RIP
Apparemment rassuré sur ce plan, le ministre s'est néanmoins montré plus inquiet sur les investissements auprès des collectivités. Patrick Drahi s'est engagé investir 50 millions par an dans les réseaux d'initiative publique (RIP) fibrés. Or, « ces 50 millions ne correspondent pas tout à fait aux engagements pris initialement par SFR, a précisé Arnaud Montebourg. C'est l'un un point de divergence qui nous conduira à être vigilent, attentif et peut-être très actif pour calquer les engagements de la nouvelle structure à l'ancienne. »
Rappelons que le plan du THD prévoit que les collectivités doivent investir 13 milliards dans le déploiement des RIP dont 3 milliards apportés par l'Etat et 7 milliards par les opérateurs. A 50 millions par an, on sera loin du compte d'ici 2022 pour SFR-Numericable. Néanmoins, en tant que membre de la Firip (Fédération des industriels des réseaux d'initiative publique) et de ses offres en direction des collectivités (notamment dans l'Ain), le «?câblo?» semble disposer d'une connaissance approfondie des besoins des collectivités.
Altice coté à Paris
Sur le patriotisme économique, au-delà de privilégier les industriels nationaux quand cela se justifie, Patrick Drahi a proposé de mettre en ouvre la double cotation d'Altice à Euronext Paris en plus de la Bourse d'Amsterdam où l'entreprise est cotée. Un nouveau point gagné, et défendu, par le ministre, du moins oralement.
« Numericable a avancé vers les objectifs gouvernementaux malgré les réticences sur le déploiement de la fibre, a souligné Arnaud Montebourg en guise de conclusion avant d'ajouter que il y a une redistribution des cartes mais le retour à 3 [opérateurs mobiles] reste d'autant plus d'actualité. Nous avons besoin d'opérateurs puissants qui louent des alliances avec d'autres opérateurs européens. » Prochain dossier?: Bouygues-Free en l'occurrence.
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