GAIA-X : comment la France veut développer ses « data spaces »
Briques fondamentales pour la structuration de GAIA-X, les data spaces commencent à émerger en France. Passage en revue des premières initiatives.
Santé, finance, mobilité, aérospatiale, green deal. Autant de secteurs dont relèvent les « data spaces » présentés lors de la première plénière du French GAIA-X Hub.
Pour Jean-François Cases, directeur général délégué d'Amadeus, il s'agit de « systèmes où la sémantique est réglée pour que les différents acteurs se comprennent ». Du côté d'Hubert Tardieu, qui pilote le projet GAIA-X par intérim, on parle de « jumeaux numériques des objets de l'écosystème qui seront traités par les infrastructures ».
Ces objets et ces infrastructures constituent les deux unités de base de GAIA-X.
Les data spaces leur donnent une raison d'être, en apportant des cas d'usage. Sectoriels dans un premier temps et à plus long terme, transversaux. Leur substrat : l'échange - et la valorisation - de données dans un contexte souverain.
Par « souverain », il faut entendre la capacité des propriétaires de données à en disposer pleinement. C'est-à-dire de décider à la fois de leur localisation, de qui peut les traiter et à quelles fins. Une telle démarche suppose de définir une architecture et un mécanisme de gouvernance standardisés à destination des fournisseurs et des utilisateurs de services. Avec, comme boussoles, la transparence, l'interopérabilité, la décentralisation et la confiance.
La version initiale, présentée en mai 2020, s'assortit d'ajouts spécifiques à certains data spaces. Elle doit faire l'objet d'une mise à jour d'ici à la fin du 1er trimestre 2021. La constitution juridique de GAIA-X sera alors effective. Elle prendra la forme d'une AISBL (association internationale sans but lucratif). Et pourra alors véritablement s'impliquer dans le développement des data spaces.
Health Data Hub et GAIA-X
« Nous ne nous engagerons que dans [ceux] où il existera une présence suffisante des membres de l'association, avertit Hubert Tardieu. Pour les autres, nous comptons sur les hubs nationaux ».
Ils existent déjà dans trois pays : l'Allemagne, la Belgique. et donc la France, sous la houlette du Cigref, de l'Académie des technologies, de la DGE et du pôle de compétitivité Systematic.
C'est effectivement à ce niveau qu'il a été choisi de faire démarrer les réflexions. Chaque data space compte à sa tête un « préfigurateur » qui met sur pied un groupe de travail, réunit des entreprises intéressées, puis dialogue avec les acteurs de la filière industrielle du cloud.
Pour les rassembler, la création d'un comité au niveau européen est à l'étude.
En attendant, des jonctions se dessinent, notamment entre les data spaces « Énergie » et « Mobilité ».
EDF emmène le premier, en contact avec les hubs allemand et belge, ainsi que la compagnie italienne Enel. Parmi ses cas d'usage potentiel de l'infrastructure GAIA-X, la maintenance des turbines éoliennes, les plans de prévention des risques hydrauliques et la gestion du cycle de vie des véhicules électriques. Le second se focalise sur les services aux voyageurs, sous l'impulsion d'Air France-KLM, d'Aéroports de Paris, de Mines-Télécom et d'Amadeus.
Parmi les hubs les plus « matures », il y a celui dédié à la finance et à l'assurance.
La Cour des comptes l'a impulsé en juin 2020. Ses initiatives à moyen terme comprennent le développement de coffres-forts de données, de services de tokenisation et de stable supply chain finance (produits fondés sur la synchronisation des flux physiques des supply chains et des flux de financement).
Il y a aussi le data space « Santé », le fameux Health Data Hub, dont la mise en production sur Microsoft Azure a provoqué des protestations au sein du secteur IT hexagonal.
Data spaces : nouveaux pôles de compétitivité ?
L'essentiel des data spaces constitués en France s'alignent sur ceux qui figurent dans la stratégie européenne pour les données, présentée en février 2020.
Le data space « Espace » fait figure de principale exception. RHEA, 3DS Outscale, CS Group, Airbus D&S, Capgemini, Thales Alenia Space et Safran Data Systems en sont membres.
Des hubs « Éducation » et « Industries culturelles et créatives » devraient bientôt s'y ajouter. L'objectif étant de fournir un maximum de livrables d'ici à fin 2021.
L'échéance est proche, mais on ne part pas d'une feuille blanche. Frédéric Sutter, directeur de la plate-forme open data Skywise chez Airbus (data space « Aérospatiale »), en témoigne : « Il existe déjà, dans notre industrie, de multiples standards de data lakes ». Même chose sur le data space « Agriculture », avec Jean-Marc Bournigal, directeur général de l'AGPB (Association générale des producteurs de blé). « Nous sommes déjà structurés autour de cas d'usage, avec des projets comme Numagri », confie-t-il.
Autre support existant : le modèle d'architecture de référence qu'a défini l'association International Data Spaces. Ses origines remontent à 2015, au sein de l'institut Fraunhofer. Elle avait alors déjà formalisé le concept du data space tel que GAIA-X* le présente aujourd'hui.
Des acteurs français comme Atos avaient fini par se greffer au noyau allemand, aux côtés de groupes comme Deutsche Telekom et Volkswagen.
* GAIA-X aussi est d'origine allemande. La France avait rejoint l'initiative après la publication du manifeste franco-allemand pour l'industrie.
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