Fibre : Orange accusé de bloquer la concurrence
La force de frappe d'Orange est une nouvelle fois sur la sellette. Dans le passé, l'opérateur historique avait été accusé de profiter de sa position pour prendre le contrôle du marché naissant de l'ADSL. Cette fois, c'est sur le marché de la fibre optique que le groupe est épinglé.
Selon l'association de consommateurs UFC Que Choisir, l'ex-France Télécom « bloque la concurrence »dans sa stratégie de déploiement de l'internet à très haut débit.
Explications. Comme le marché est loin d'être encadré, les opérateurs se lancent chacun de leur côté en déployant des réseaux dans les grandes villes. Free, Orange et Neuf Cegetel (les seuls à investir massivement dans la fibre) tentent d'arriver le premier dans un immeuble pour occuper le terrain face à un concurrent.
Mais Orange, grâce à ses nombreuses équipes, dispose d'un sacré avantage, selon l'association. L'opérateur « déploie beaucoup d'énergie pour gêner ses concurrents » : « d'une part ce dernier implante les points de mutualisation en pied d'immeuble, ce qui implique d'avoir d'importants effectifs pour couvrir un large territoire ».
« D'autre part, les boîtiers permettant la mutualisation sont localisés dans les immeubles, nécessitant une autorisation pour pouvoir intervenir ». Enfin « Orange refuse, contrairement à ses concurrents, de divulguer où se trouvent ces points de raccordement ».
Conséquence,« la concurrence, ne connaissant par les immeubles raccordés, n'est pas en mesure de proposer une alternative aux consommateurs fibrés par Orange », peut-on lire dans un communiqué.
Ce n'est pas la première fois que l'UFC critique les pratiques des opérateurs et d'Orange en particulier en matière de fibre. En octobre dernier, l'association exhortait les syndics d'immeubles à ne pas céder aux charmes des sirènes oranges.
« La conquête des foyers a commencé, les différents fournisseurs d'accès internet (FAI) déploient avec précipitation leurs réseaux pour préempter au plus vite les zones géographiques les plus intéressantes. En effet, l'équipement des bâtiments en fibre optique implique de lourds travaux de génie civil, coûteux et générant beaucoup de nuisances, qui ne pourront pas être dupliqués. Si bien que le FAI qui déploie en premier son réseau dans une copropriété, a de fortes chances d'être le seul à le faire ! Or, il n'existe aujourd'hui aucun cadre réglementaire contraignant les FAI à partager leurs réseaux. Le FAI qui a équipé un bâtiment est donc en position de monopole sur ce dernier. Il est libre de pratiquer les prix qu'il souhaite et si le consommateur n'est pas satisfait et souhaite changer d'opérateur il devra déménager ! »,expliquait l'organisation de défense des consommateurs.
Chez France Télécom, le plus actif en terme de déploiements, on rejette ces accusations. Pour René Pierre Bideaud, responsable national du raccordement fibre optique, France Télécom ne cherche pas l'exclusivité. « Nous avons toujours dit que nous étions pour la mutualisation des travaux en amont, ensuite, dans les immeubles, nous sommes parfaitement prêts à cohabiter avec nos concurrents. On ne cherche pas à avoir l'exclusivité », souligne-t-il.
Ce lundi, Orange réagissait officiellement par voie de communiqué. France Télécom « s'attache, depuis le démarrage de ses projets sur la fibre optique à respecter les règles de la concurrence ».
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L'opérateur rappelle ainsi qu'il a « mis au point une offre de mutualisation du génie civil et du câblage des immeubles ».
Et de poursuivre :« Les modalités d'intervention dans les immeubles fibrés par France Télécom prévues par cette offre ont été définies en collaboration avec la FNAIM Ile de France ainsi qu'avec l'Association des Responsables de Copropriétés. Les conventions signées prévoient ainsi que le propriétaire autorise France Télécom et les autres opérateurs FTTH bénéficiaires de la mutualisation du réseau interne passif en fibres optiques, ou leurs sous-traitants, à pénétrer dans les parties communes de l'immeuble, à poser et à exploiter le réseau de fibres optiques et à raccorder de nouveaux clients, dans les mêmes conditions que France Télécom. De la même façon, les travaux de raccordement de France Télécom sont aussi réalisés par des sous-traitants que les opérateurs tiers peuvent tout autant faire intervenir, ainsi que France Télécom le leur a rappelé ».
Mais ces offres sont-elles opérationnelles ? L'opérateur précise que les « détails opérationnels de cette mutualisation doivent faire l'objet d'expérimentations que France Télécom est très désireuse de mener avec les opérateurs tiers dans les plus brefs délais. A plusieurs reprises, France Télécom a affirmé auprès de l'ARCEP et des opérateurs tiers qu'elle était prête à raccorder sa fibre dans les immeubles fibrés par d'autres opérateurs et à permettre aux opérateurs de raccorder la fibre qu'elle a installée dans les immeubles. Ce processus pour être efficace doit toutefois être symétrique et la volonté de réaliser concrètement ces opérations réciproque ».
Enfin, le groupe dénonce cette attaque en règle : « il est dommage et préjudiciable, au premier chef pour les consommateurs, de voir circuler des affirmations erronées - engendrant une inquiétude auprès des propriétaires - et d'appeler au blocage de la progression du très haut débit ».
En attendant que les règles du jeu soient enfin fixées, l'UFC comme le régulateur appellent à une mutualisation des infrastructures tant en amont que dans les immeubles. Il faut imposer« la mutualisation au NRO (noeud de raccordement optique) comme modalité de raccordement par défaut »et contraindre« Orange et l'ensemble des acteurs à partager leurs informations pour que le consommateur puisse bénéficier d'un réel choix », tonne l'association.
Rappelons que la fibre optique est un enjeu majeur pour les opérateurs. Chez Free, le groupe a annoncé qu'il comptait investir 1 milliard d'euros dans la fibre d'ici 2012 dont 300 à 400 millions pour 2008-2009. Pour Orange, les investissements cumulés pour la période 2007-2008 sont évalués à 270 millions d'euros. Au 31 décembre 2007, 7.268 clients avaient choisi l'offre de fibre du groupe et 146.006 foyers étaient raccordables. Neuf Cegetel a annoncé un investissement de 300 millions d'euros d'ici 2009.
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