L'échec Orange-Bouygues, une bonne nouvelle pour l'investissement
Pour Sébastien Soriano, le président de l'Arcep (Autorité de régulation des communications électroniques et des postes), l'échec du mariage Orange-Bouygues est loin d'être une catastrophe pour le secteur des télécoms français. Il pense même que le maintien de quatre opérateurs sur le marché est bon pour les investissements. Contrairement au discours des opérateurs. « La consolidation du secteur des télécoms en Europe est un raccourci intellectuel qui a été entretenu par le monde de la finance », affirme-t-il dans une interview donnée au Figaro. Selon lui, la plus forte pression qui s'exerce à quatre plutôt qu'à trois pousse les opérateurs à redistribuer la marge dans la baisse des prix ou à investir plutôt qu'à distribuer les gains aux actionnaires.
Or, toujours selon le porte-parole du régulateur, après quatre ans de guerre des prix initiée avec l'arrivée de Free sur le marché mobile en 2012, on arrive à « la fin de la régulation pro-low-cost et le début de celle pro-investissement [.] II faut une équipe de France de l'investissement qui soit portée par la pluralité des acteurs. Il n'y a pas de bon modèle, à trois ou à quatre. La régulation ne doit pas opposer la politique industrielle et celle de la concurrence. Cette dernière n'est qu'un moyen, la priorité c'est l'investissement. » Un discours que ne renierait probablement pas son prédécesseur, Jean-Ludovic Silicani, à qui il a été reproché d'avoir introduit le très concurrentiel quatrième opérateur mobile sur le marché (oubliant dans les faits que l'attribution des licences mobiles étaient taillée pour 4 opérateurs dès l'origine). « Dans le mobile, nous allons nous assurer que les quatre sont bien dans une logique d'investissement », insiste Sébastien Soriano.
L'amorce de la fin de l'itinérance 3G de Free
Ce qui va pousser l'Arcep à accélérer la fin de l'itinérance 3G de Free sur le réseau d'Orange. Le régulateur a présenté début janvier sa feuille de route sur la question. Un dossier mis en suspens avec les discussions sur le mariage Orange-Bouygues. « Maintenant que ce dossier est clos, nous reprenons les travaux. Les opérateurs doivent nous remettre leurs conclusions le 15 avril. » Selon le dossier présenté par l'Autorité, l'extinction de l'itinérance doit commencer avant fin 2017 pour un arrêt total de la 3G entre 2018 et 2020, et avant 2022 pour la 2G. « Tout couper aujourd'hui, ce serait priver sans justification des millions de consommateurs de réseau, et le devoir du régulateur est aussi de protéger les utilisateurs. » Sébastien Soriano entend par ailleurs appliquer la même logique de traitement à l'accord de mutualisation des réseaux signé entre Bouygues Telecom et SFR dans les zones moins denses. « Pour l'itinérance 4G de SFR chez Bouygues Telecom, nous proposons des échéances fermes de sortie, entre 2016 et 2018. »
Côté, fixe, Sébastien Soriano constate un meilleur taux d'adoption de la fibre (autour de 20 à 25%) que le câble (10 à 15%). « Les investissements dans la fibre génèrent des abonnés et donc des revenus », assure-t-il. Des investissements essentiellement portés par Orange aujourd'hui. Au risque de réinstaurer un monopole?? Une situation que veut absolument éviter le président qui craint plus un duopole dans le très haut débit (THD) avec SFR. Quitte à « mettre à jour si nécessaire la régulation d'Orange ». Mais surtout en incitant les concurrents à déployer leurs propres réseaux fibre en augmentant les tarifs de dégroupage de l'ADSL dans le cadre du plan d'extinction du cuivre, ce qui les pousseraient à s'affranchir de la boucle locale opérée par Orange.
Démocratiser l'accès fibre aux PME
Sur le marché des entreprises, là aussi, le porte-parole de l'Arcep veut casser le duopole Orange Business Services - SFR Business au profit d'acteurs alternatifs de services (comme Coriolis) ou d'infrastructure (comme le tout nouveau Kosc) ou, naturellement, Bouygues Telecom, pour l'accès des PME à la fibre. Une concurrence nouvelle qui devrait générer des tarifs plus abordables pour elles. « C'est-à-dire 200-300 euros par mois, contre parfois plus de 1?000 euros par mois aujourd'hui », précise Sébastien Soriano. L'accès des PME aux offres très haut débit s'intègre d'ailleurs comme l'un des 12 travaux que l'Arcep entend accomplir avant la fin 2017.
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