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LSA : le partage de spectre hertzien fait ses premiers pas en France

La start-up Red Technologies va lancer une expérimentation de partage de spectre sur la bande 2,3 GHz exploitée par la Défense. Mais les opérateurs font pour l'instant défaut.

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LSA : le partage de spectre hertzien fait ses premiers pas en France

Ericsson, Qualcomm et Red Technologies ont inauguré, ce mercredi 6 janvier au siège de cette dernière à Paris, le démarrage du pilote d'une solution LSA (Licensed Share Access) de partage de spectre radio sous licence. Une première française et même mondiale, aux dires de Pierre-Jean Muller (photo de tête), président de la start-up parisienne fondée en 2012 autour des technologies de gestion du spectre et de reconfiguration automatique du réseau, et soutenue par BPI France. Un événement suffisamment important aux yeux d'Axelle Lemaire qui avait fait le déplacement. « Les fréquences sont le carburant invisible mais indispensable de l'accès aux technologies », a rappelé la secrétaire d'Etat chargée du Numérique.

Pour Axelle Lemaire, secrétaire d'Etat au Numérique, le LSA « est susceptible d'avoir des retombées économiques majeures en France ».

Mais un carburant qui tend à s'épuiser avec la croissance du trafic mobile. Et face à l'épuisement du spectre hertzien, « demander un usage exclusif sur les dernières bandes disponibles [sous les 6 GHz, NDLR] n'est pas forcément une bonne idée », estime Pierre-Jean Muller. D'où l'idée de partager les ressources aujourd'hui attribuées mais non utilisées en permanence. Comme c'est le cas pour les 100 MHz de la bande 2,3-2,4 GHz attribuée à l'Armée en France mais qui n'en utilise que 10% en temps normal et l'intégralité en période exceptionnelle. Le LSA met ainsi en oeuvre les recommandations du rapport Toledano. « Le LSA est avant tout une innovation réglementaire », commente le président de Red. Et « maintenant que le travail réglementaire est fait, il s'agit de le concrétiser », résume Axelle Lemaire.

Reconfiguration automatique du réseau

C'est tout l'enjeu de la plate-forme développée par Red Technologies avec ses partenaires Ericsson et Qualcomm qui apportent respectivement leurs technologies d'accès radio, d'agrégation de porteuses (LTE-A), et des terminaux 4G équipés d'un émetteur-récepteur radio multi fréquences (transceiver) compatible. La plate-forme de Red, qui offre une interface web de contrôle, s'appuie sur 3 piliers?: une notion primaire et secondaire pour garantir à l'exploitant (la Défense dans le cas présent de l'expérimentation) le contrôle de la disponibilité du spectre à l'utilisateur (les opérateurs éventuellement); un système de sortie du spectre par les utilisateurs supplémentaires (qui passe par l'installation d'une « blackbox » chez les opérateurs); et un outil d'analyse et indicateur de performance pour analyser les performances à posteriori et « éventuellement changer les règles de partage », soutient Pierre-Jean Muller.

Pour Franck Bouetard (Ericsson), le partage de fréquence ne peut qu'intéresser les opérateurs.

La démonstration à laquelle nous avons assistée nous a permis de constater comment l'ordre d'évacuation était envoyé par simple appui sur un bouton et exécuté automatiquement par les utilisateurs supplémentaires du spectre qui libèrent alors les cellules radio (les small cell DOT d'Ericsson en indoor dans le cas présent). La réattribution des ressources emprunte le même chemin. Si elle n'est pas parfaitement instantanée, la reconfiguration du réseau s'effectue elle en quelques minutes à peine pour des endroits localisés et à des fréquences précises. On peut donc bien parler de technologie dynamique en regard de la lourdeur de ce type d'infrastructures.

Convaincre les opérateurs

« L'idée est de convaincre les opérateurs que le spectre [de l'Armée] est disponible 99% du temps et doit être restitué temporairement dans certains cas d'urgence », explique le porte-parole de Red. Le LSA viendrait donc s'inscrire comme une capacité supplémentaire fournie aux clients finaux à travers les technologies d'agrégation de porteuse. Le blocage de l'accès à cette capacité supplémentaire serait quasiment imperceptible pour l'utilisateur final puisque le service d'accès au réseau mobile resterait assuré. C'est tout juste s'il verrait une différence de qualité lors du visionnage en streaming d'une vidéo (qui plus est temporisée par sa «?bufferisation?»).

Les opérateurs étaient en effet les grands absents de cette inauguration ce matin. « Le LSA les bascule dans un autre paradigme », reconnaît Axelle Lemaire en rappelant la logique d'exclusivité des fréquences qui animent jusqu'alors leur modèle. Mais « avec le partage de fréquence et l'agrégation de porteuses, le LSA leur permet d'accéder à des fréquences auxquelles ils n'auraient pas pu avoir accès, ajoute Franck Bouetard, PDG d'Ericsson France. Je ne vois pas pourquoi les opérateurs ne seraient pas intéressés. » « Le LSA ne faisait pas parti de leur agenda jusqu'alors », précise Pierre-Jean Muller. Il n'en reste pas moins confiant de leur intérêt et pense qu'Orange, voire Bouygues Telecom, participeront au pilote grandeur nature qui démarrera fin janvier pour trois mois environ.

Selon Wassim Chourbaji (Qualcomm), le LSA est une étape cruciale à la réalisation du marché unique des télécoms en Europe.

Une technologie 5G

Au-delà de l'intérêt d'accéder immédiatement à des ressources hertziennes supplémentaires, le LSA préfigure une des technologies qu'exploitera la 5G. « Le concept du LSA est extrêmement utile dans l'évolution des réseaux 4G et 5G, assure Franck Bouetard, c'est un point d'étape vers la 5G. » De fait, la normalisation est en cours auprès de l'ETSI (European Telecommunications Standards Institute), dont Red est membre actif, et devrait intégrer la Release 13 du 3GPP (l'association de standardisation des technologies mobiles) en fin d'année. La Rel 13 posera les premières briques normalisées de la 5G. L'adoption du LSA à l'échelle normative ouvrirait donc les portes d'un écosystème européen, si ce n'est mondial, à des technologies françaises avec toute la perspective économique qu'elle entraîne. « Le besoin de spectre est primordial, commente Wassim Chourbaji, en charge des affaires réglementaires chez Qualcomm. Les pays qui mettront en avant le partage de spectre sont ceux qui tireront les vrais bénéfices de l'innovation. » Avec Red Technologies, la France entend donc se positionner en bonne place dans ce domaine.

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