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RPA : premiers pas vers l’entreprise automatisée

La RPA propose une stratégie d’automatisation de processus en limitant les coûts et l’impact sur le système d’information. Comment s’y prendre et avec quelles perspectives ?

Publié par Clément Bohic le | Mis à jour le
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RPA : premiers pas vers l’entreprise automatisée

Dans la grande famille des technologies d’au­tomatisation, il est une lignée qui a la particularité d’engendrer rapidement du ROI, avec peu d’empreintes sur le SI. L’acronyme anglais RPA – que l’on traduit traditionnellement par automatisation robotisée des processus – s’est imposé pour la qualifier.

Toutefois, il s’agit moins d’intervenir sur les processus que sur les modes opératoires qui les composent. Comment ? À grand renfort de robots logiciels qui assistent les humains dans des tâches informatisées ou les effectuent à leur place. La RPA se prête particulièrement aux tâches définissables, répétitives, fondées sur des règles simples et des éléments structurés. Par exemple, les opérations de collecte, de vérification et de saisie de données qu’effectuent les fonctions support. L’approche « classique » consiste à transformer une interface utilisateur en interface machine.

Un enregistreur capture les actions des humains en reconnaissant les éléments à l’écran, puis génère un script. Les robots les exécutent avec divers degrés d’autonomie, allant du lancement manuel sur le poste de travail au fonctionnement en back-end, avec déclenchement sur la base d’événements ou d’API.

Quels avantages attendre de cette « main-d’œuvre numérique » ? En théorie, pour les entreprises, un développement du volume et de la qualité de la production, doublé d’une réduction des coûts. Et pour leurs collaborateurs, l’occasion de se positionner sur des tâches qui présentent davantage de valeur ajoutée. La RPA se met en œuvre sur des délais réduits, avec des investissements mesurés. Elle répond à des objectifs de performance opérationnelle. Le ROI baisse à mesure que l’automatisation se complexifie, par exemple lorsqu’elle implique de multiples systèmes.

On est alors susceptible d’être mieux servi, entre autres, par une suite de gestion des processus métiers (BPM) ou par une plate-forme d’intégration applicative. Reste que le périmètre fonctionnel de la RPA s’élargit. Les technologies cognitives y sont pour beaucoup. Leurs principales implémentations résident au­jour­d’hui dans la reconnaissance de formes et de caractères, dans la découverte de processus et dans le traitement du langage naturel. La gestion des exceptions et la coordination des robots demeurent des usages plus embryonnaires. Bien que centrée sur les tâches, la RPA ne dispense pas d’une compréhension des processus… et de la culture d’entreprise.

Pour faciliter l’appropriation de leurs outils, les principaux fournisseurs proposent aux métiers de développer des robots avec peu, voire pas de code (low-code ou no-code). La conception se fait en glisser-déposer, à travers des widgets. Ces environnements de création sont censés favoriser la collaboration avec les déve­lo­ppeurs . Dans la pratique, ces derniers gardent souvent la main sur ce volet.

1 Remplacer le copier-coller

Le cas de Châteauform’ en témoigne. « Mes clients internes ne veulent­ pas avoir affaire à l’informatique », affirme Thomas Durand, le DSI du spécialiste des séminaires et des événements professionnels. Pour se lancer dans la RPA, Châteauform’ a fait confiance à UiPath. Son premier projet remonte au début 2019. Il a consisté à automatiser la saisie de contrats : 4 000 à 5 000 par mois avec les travailleurs journaliers (extras) sollicités par son traiteur.
L’ERP dudit traiteur n’est pas connecté au système de paye de Châteauform’. Ainsi, une employée passait-elle sa journée à recopier dans un logiciel les contrats saisis dans l’autre. La tâche est maintenant prise en charge par un robot qui tourne une demi-heure tous les matins pour rentrer les contrats de la veille.

« Pour la personne qui faisait du copier-coller toute la journée, cela ne peut être qu’une délivrance » explique Thomas Durand. « Ce travail était telle­ment peu valorisant que tout le monde était content de pouvoir l’éliminer. » L’employée RH est désormais en relation avec les collaborateurs extérieurs pour gérer les aléas. Entre le début de la réflexion et la mise en production, il s’est écoulé deux à trois mois, dont :

– une semaine pour construire le cas d’usage du prototype ;

– une dizaine de jours pour implémenter ;

– cinq ou six jours pour compléter le paramétrage ;

– un ou deux jours d’ajustements pour traiter des cas particuliers, à l’instar des numéros de matricule en double.

La DSI n’a pas eu, depuis lors, de demande de modification du processus. Elle effectue cependant un contrôle tous les trimestres.

2 Maîtriser la RPA en interne

Châteauform’ a également automatisé un autre processus avec son traiteur : la saisie des recettes (on en compte 300 à 400, renouvelées tous les trois mois) dans l’ERP et dans le système de commande. Les factures fournisseurs ont également eu droit au traitement RPA. Le robot analyse les PDF, extrait les informations et les injecte dans l’outil de dé­ma­té­ria­li­sa­tion de l’entreprise. « En tout, nous avons une dizaine de traitements […] répartis entre deux robots », résume Thomas Durand.

Le contrat initial avec UiPath portait sur un robot en mode assisté. S’y est ajouté un robot autonome assorti d’un module d’orchestration destiné à piloter les processus sans déclenchement humain. Le robot autonome permet jusqu’à cinq exécutions parallèles. Il est déployé sur une VM, comme l’orchestrateur. Le robot assisté est installé sur un poste de travail dans un des bureaux. L’outil de conception se trouve sur un poste à la DSI.

Le premier projet s’est fait à quatre mains. D’un côté, un collaborateur de UiPath. De l’autre, un interne formé en une semaine. « Maintenant que le projet est fait, il y passe peut-être 10 % de son temps au quotidien. En phase de réalisation d’un nouveau processus, c’est peut-être 50 %. Assez vite, la connaissance va se dispatcher. Il y aura sans doute deux, trois personnes capables de le faire », poursuit le DSI, dont l’équipe compte une vingtaine de personnes.

3 EAI vs RPA ?

Châteauform’ a fait le choix de tout maîtriser en interne, mais apprécie de bénéficier d’interlocuteurs en France. « Concernant ce type d’éditeur, on sait qu’il est toujours difficile de mobiliser des experts à l’étranger » explique Thomas Durand.

Au sein du SI, la RPA cohabite avec un EAI (moteur d’intégration d’applications). L’un et l’autre entrent parfois en concurrence. Le choix est contex­tuel : « Dès l’instant où ce sont des interfaces en back-office, on passe plutôt en EAI. Quand un écran doit être ouvert, on passe en RPA. »

Le délai de mise en œuvre influe également : « Si une tâche doit être mise en place rapidement, on le fait plutôt en RPA, parce qu’on sait que ce sera fait en trois à quatre jours. Sur [l’EAI], on est plutôt à un mois pour un nouveau processus. »

Le cas s’est présenté pour intégrer, dans le CRM, des demandes de réservation effectuées sur le site web. Face aux changements très rapides sur le site, la DSI a choisi l’option RPA. Une solution transitoire qui « retombera à terme dans le bus de services. La RPA, ce n’est pas forcément la solution urbanisée [mais] c’est la solution de facilité qui nous sauve la vie dans bien des cas avant de redescendre vers le cœur de SI » conclut M. Durand.

4 RPA et agilité

Chez Bouygues Telecom, le premier PoC RPA remonte au printemps 2017, avec Automation Anywhere sur deux cas d’usage : le trai­tement de tickets de demandes clients et la saisie d’incidents. Une expérimentation mise dans les mains d’un profil junior qui n’était pas spé­ci­fi­quement formé sur la solution.

Quelque 80 robots sont aujourd’hui en production, pour 13 directions impliquées. Il s’agit essentiellement de RPA autonome (les tâches s’exécutent en back-office, sur des VM). « Nous nous focalisons sur la fonctionnalité de base, là où nous pouvons tirer beaucoup de valeur [et monter] facilement en compétence », explique Mark Rode, consultant SI, de Bouygues Telecom.

Dans le domaine de la RPA assistée, Bouygues Telecom évalue les jonctions avec les chatbots pour permettre le traitement des exceptions. Il lorgne aussi l’arrivée, chez Automation Anywhere, d’un connecteur Salesforce qui permettrait d’être « moins intrusif sur les postes de travail ». L’IA fait l’objet d’une réflexion depuis le troisième trimes­tre 2019. L’un des objectifs est de traiter les documents qui ne seraient pas toujours structurés de la même façon. En l’état, Bouygues Telecom n’a pas encore tranché entre un produit IBM (facturé au nombre de documents traités) et l’outil IQ Bot d’Automation Anywhere.

Les premières étapes ont été réalisées avec un prestataire. Puis, chaque direction a nommé un référent. Il est souvent accompagné de stagiaires , de développeurs RPA en prestation ou d’opérationnels qui se reconvertissent dans la réalisation de robots. Dans la stratégie de Bouygues Telecom, le RPA se positionne comme un « outil d’agilité ». Mark Rode précise : « Nous ne souhaitons pas atteindre un taux de service à 100 %. […] C’est à chaque direction de mesurer l’effort de développement qu’elle souhaite mettre pour atteindre plus ou moins de fidélité. »

La présence d’une équipe en France (une cinquantaine de personnes) a joué en faveur
d’Automation Anywhere. La démarche a été quasiment autofinancée : « Les premiers robots qui ont commencé à générer du ROI en quelques mois ont permis de financer les suivants, et ainsi de suite », affirme Mark Rode. Et d’ajouter : « On poussait les robots en production le plus vite possible, quitte à continuer à les améliorer au fur et à mesure. » Le passage à la RPA a, par ailleurs, donné des éclairages sur les possibilités d’amélioration des processus. Entre autres par l’intégration d’API.

Combien coûte un projet RPA ? Selon les différents témoignages recueillis, les investissements s’élèvent entre 15 000 et 35 000 € par an pour l’acquisition des solutions.

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